LA CROIX DU NORD édition du 13 octobre 2006

Interview du pasteur Frédéric Verspeeten : avis de la CIMADE

 

 

LA CROIX DU NORD | 13.10.06 |

 

Régularisation maximale mais discernée

LA CIMADE A CHOISI et accepté de remplir une fonction sociale et juridique dans les centres de rétention car elle estimait indispensable au nom des droits de l'homme de soutenir et d'assister jusqu'au bout les personnes refoulées. Cette position a créé bien des remous au sein du mouvement, mais pour Frédéric Verspeeten, pasteur à Valenciennes et président de l'association, «la variété des opinions et des vues provoque des débats et nous fait avancer». Pour lui, la première chose importante est notre regard sur l'étranger. «Le migrant n'est pas une bête curieuse. C'est un homme ou une femme comme nous, qui a les mêmes besoins et aussi une grande richesse». Il exhorte chacun à ne pas tomber dans le piège des raccourcis tendant à assimiler clandestin et délinquant.

Revoir la liste des «pays sûrs»

S'il confirme que les relations entre l'Etat et les associations sont dans une logique d'écoute mutuelle et s'il témoigne de l'humanité avec laquelle la Préfecture traite les dossiers, il s'interroge toutefois sur les critères d'attributions du statut de réfugié politique délivré par l'OFPRA. «IL ne doit pas y avoir plus de 17% de dossiers au niveau national qui ont une suite positive, or j'ai vu des situations où la maltraitance et le viol étaient prouvés, et pourtant la personne n'a pas obtenu sa régularisation». Il s'interroge tout autant sur la liste des «pays sûrs». Il se demande si cette liste tient vraiment compte des réalités politiques locales... Il propose que cette liste soit réétudiée. En ce qui concerne le principe même de la régularisation, Il défend l'idée d'une régularisation «maximale» mais «discernée». Pas question pour lui d'une «régularisation aveugle». S'Il peut comprendre que des personnes poussées au désespoir en viennent à faire grève de la faim, Il ne l'approuve pas. D'une part parce que celle-ci n'est pas sans séquelle et sans risque pour la personne, mais parce qu'Il y a dans cette démarche, «une stratégie de force qui pousse à l'affrontement». Il précise : « La grève de la faim focalise sur des situations particulières, et masque la situation de tous les autres».

Face à la question de l'immigration, Il appelle à relativiser : «Les statistiques n'ont pas dramatiquement explosé», et rappelle que nous avons deux obligations : d'une part, tout mettre en œuvre pour aider à l'insertion des personnes présentes sur le territoire. D'autre part, créer de réelles solidarités avec les pays du Sud  «sans piller leurs richesses intellectuelles». La Cimade compte 5 antennes d'accueil sur le département où elle assure le suivi juridique, mais aussi le suivi psychologique et l'apprentissage du français pour les personnes étrangères.

 

Martine Paroes - La Croix du Nord du 13 octobre 2006