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Etude biblique 3 (13
novembre 2009) L’évènement de la Pentecôte, 50 jours après Pâques 1. Introduction Les
apparitions du ressuscité ont pris fin. Désormais les disciples en attente
vont recevoir ce que le Ressuscité a promis (Luc 24, 49 et Hébreux 1, 4 à 8),
et cela va les rendre capables de proclamer le message de la bonne nouvelle.
Nous découvrirons ensuite la première prédication apostolique (2, 14 à 36).
L’Esprit Saint est donné. Il est là pour attester la vérité du message de
Jésus-Christ (Jean 15, 26 à 16, 7). Il est à l’origine de la foi (1
Corinthiens 12, 3). Mais pour Luc il est aussi Celui qui fonde la nouvelle
communauté croyante que l’on appellera plus tard l’Eglise. 2. La descente du Saint
Esprit La
première scène de notre récit évoque la descente de l’Esprit sous une forme
visible semblable à des langues (2, 3). Ces langues qui surgissent provoquent
l’étonnement des assistants présents en ce lieu (2, 7-11). Luc ne s’attarde
pas à détailler un évènement surnaturel. Souvent l’on s’interroge face au
texte sur les langues. Et l’on s’interroge sur ce langage qui pourrait
apparaître comme un langage extatique. Il me paraît difficile d’établir une
correspondance entre ce récit et le parler en langues évoqué en 1 Corinthiens
12 à 14. Il n’y a dans ce récit des Actes aucun parler extatique. Il ne
s’agit pas de glossolalie. Il est
plus logique en fonction du contexte et de l’intention lucanienne de voir
dans ce récit un épisode de xénoglossie,
c’est-à-dire la capacité de parler les langues d’autres peuples, des
langues étrangères et non, comme c’est le cas pour la glossolalie de
s’exprimer dans un langage extatique dont les paramètres vont de la transe au
charabia … !!! Selon
Luc le Dieu qui se révèle en Jésus-Christ et qui déverse son Esprit sur toute
chair demeure un Dieu d’ordre et d’harmonie qui poursuit un plan de salut
depuis les temps immémoriaux et qui en a donné un signe qui s’impose à tous
au Sinaï lors du don de la Loi. L’Esprit Saint ici répandu atteint tout homme
dans sa culture. Selon Luc si des parlers en langues se manifestent ils ne
peuvent être que des instruments audibles de la grâce, du Salut de Dieu. 3. L’Esprit Saint ici répandu atteint tout
homme dans sa culture Luc
considère que le message du Salut est polysémique.
Par ailleurs ce qui compte ce n’est pas tant que des voix résonnent et
proclament mais que le message soit entendu, compris. Et c’est peut-être cela
le véritable miracle. Il est écrit que chacun comprenait, entendait dans sa
propre langue le message. 4. Cet évènement se passe le jour de la
Pentecôte, déjà un jour de fête pour les juifs Pour
l’auteur cela se passe le jour de la Pentecôte. La datation de l’évènement
n’est pas fortuite. La fête juive de la Pâque est en réalité la fusion de
deux fêtes très anciennes. La première liée au travail des pasteurs (bergers)
nomades consistait en l’offrande et le sacrifice des prémices d’un troupeau.
L’autre est celle des sédentaires qui offraient la moisson des orges
(Deutéronome 16, 9). Les deux fêtes ont été fusionnées à cause de leur
proximité dans le calendrier. Elles ont ensuite été rattachées à l’histoire
du salut. Bien
avant la venue de Jésus-Christ, le judaïsme célébrait la libération de
l’esclavage d’Egypte et la traversée de la Mer rouge. La fête de Pentecôte en elle-même est d’origine païenne. Fête
agricole, elle célébrait la fin de la moisson des blés (Exode 23, 16 et 34,
22). On l’appelle d’ailleurs aussi fête des moissons (Exode 23,
16) ; son déroulement se trouve en Lévitique 23, 15 à 21. Elle devait avoir lieu 7 semaines
complètes après la Pâque (soit 50 jours après).Même s’il y a eu des hésitations
sur la date à laquelle il fallait la célébrer. Le Livre des Jubilés souligne que cette fête évoque l’Alliance de
Dieu avec Noé (Genèse 9). Elle devient un rite de renouvellement de
l’alliance noachite (Jubilés 6, 14 à 16). Ensuite la fête se transforma
en fête
du Don de la Tora au Sinaï. La date de la fête coïncidait à peu près
avec le calendrier de l’Exode (Exode 19, 1). Mais cela ne fit pas
immédiatement l’unanimité. Au 1er
siècle de notre ère, Pentecôte n’est pas encore officiellement la fête du Don
de le Loi. Mais pour certains juifs marginaux c’est déjà la fête
de l’Alliance. Les Pharisiens mettront du temps à commémorer Chavouot, le don de la Loi. Ce n’est
qu’au 2ème siècle de notre ère que les sages d’Israël en viendront
à associer Pentecôte et don de la loi. 5. Associer fête du don de la Loi, par
Moïse et fête du don du Saint Esprit, par le Christ Luc,
en rédigeant ce récit, aurait en quelque sorte associé Pentecôte et la fête
du renouvellement de l’Alliance (le don de la Loi au Sinaï). Il aurait coulé son récit dans la forme
du récit de la Théophanie d’Exode 19. a. La version grecque de l’Ancien Testament (version dite des
« soixante dix », septante ou LXX), dans sa traduction insiste sur
de nombreux éléments visibles dont on retrouve un écho en Actes 2. [Il
arrive le 3ème jour qu’il y est des voix (phônaï), des éclairs, une nuée ténébreuse … une voix de trompette
retentissait … le Sinaï était fumant … Dieu y était descendu dans le feu (puri). Les voix des trompettes étaient
de plus en plus fortes. Deutéronome 4, 12-13 ajoute : Le Seigneur vous a parlé au milieu du feu,
vous avez entendu une voix (phônèm) de
paroles et vous n’avez pas vu des formes, mais seulement une voix
(phônèm)]. b. Philon d’Alexandrie, dans son commentaire sur le décalogue
(qui se situe entre 10 et 40 de notre ère) en De Decalogo 32-33, 46 (les numéros 32-33 interprètent Exode 19,
16, tandis que le numéro 46 interprèterait Exode 46) écrit : 32-33 Les dix paroles ou oracles sont véritablement des lois ou des
statuts, le Père de l’univers les a édictés tandis que la nation était
assemblée, hommes et femmes ensemble. A-t-il émis personnellement une manière
de voix (phônès) ?
Gardons-nous bien de le croire [ … ]. Dieu n’est pas comme un homme, pour
avoir besoin d’une bouche, d’une langue, de conduits pour le souffle. Il me
semble plutôt qu’il opéra, en cette occurrence, un très saint prodige. Il
commanda que se produisît dans les airs une voix invisible [ … ]. Après
qu’elle eut à l’air communiqué forme et tension et qu’elle se fut transformée
en un feu flamboyant*, elle fit retentir, à la façon du souffle
qui s’échappe d’une trompette une voix articulée su puissante que les
auditeurs les plus éloignés crurent la percevoir aussi distinctement que ceux
qui se trouvaient les plus près [ … ]. * la
voix n’émane d’aucun locuteur, bien que son message soit perçu par les yeux,
cf.Deutéronome 4, 12 46 Alors du sein du feu qui s’épanchait du ciel, retentit une voix
absolument saisissante, la flamme devenant le langage particulier familier
aux auditeurs. Les mots que proférait cette voix étaient prononcés avec une
netteté si éclatante qu’on croyait plutôt les voir que les entendre, comme
l’atteste la Loi dans laquelle il est écrit : Tout le peuple voyait la voix*. L’expression est
pleine de sens. La voix humaine est audible, la voix de Dieu est
véritablement visible. Pourquoi ? Parce que toutes les paroles que Dieu
prononce sont, non pas des mots, mais des actes dont lex yeux connaissent
plutôt que les oreilles. * Exode
20, 18 : voyait les voix c. Rabbi
Johanan (entre 90 et 130 de notre ère) va jusqu’à dire que la voix de Dieu se
divisa en 70 langues (parce que, selon Genèse 10, il y avait 70 nations dans
le monde). La Loi prenait ainsi un caractère universel et non exclusivement
adressé à Israël. d. Luc entremêle donc de multiples thèmes. L’Esprit remplit les
présents. La tournure est lucanienne. Le baptême de Jean annonçait la
repentance, la démarche vers Dieu. Ici l’Esprit lui-même rend ceux qui le
reçoivent capables d’énoncer, de déclarer à voix hautes, les merveilles du
salut de Dieu. L’Esprit Saint est le maître du discours. Il suscite leur
parole. A la différence des textes où il est question de la glossolalie
(Actes 10, 46 et 19, 6 ; 1 Corinthiens 12, 30 ; 13, 1 ; 14, 2
à 39) l’expression employée ici souligne que ceux qui ont reçu l’onction
parlent d’autres langues. L’adjectif ajouté « autres », vise à
orienter l’attention du lecteur du récit vers le verset 8 (langues
étrangères). Ils sont rendus capables de parler des merveilles et hauts faits
de Dieu comme Marie en Luc 1, 46-55 et Zacharie en Luc 1, 68-79. 6. Conclusion Plusieurs
remarques s’imposent maintenant après la lecture de ce court passage. D’abord
il semble important de dire que Luc rédige un récit précis. Selon Luc les
choses se sont passées ainsi. Les questions que l’on est droit de se poser
sont nombreuses. Mais l’interrogation reste entière. Plusieurs hypothèses se
présentent à nous : - Hypothèse 1. Cela
s’est littéralement passé ainsi - Hypothèse 2. Luc
met en scène, en s’appuyant sur les traditions antérieures, un récit qui marque
l’irruption de l’Esprit, comme l’Exode met en scène le don de la Loi au
Sinaï. En le faisant il érige un symbole autour de ce qui n’aurait pu être
qu’une expérience intime et secrète. « Il souffle sur eux et ils reçurent le Saint Esprit ». En le
faisant il insiste sur une nouveauté. Il n’invite pas ses auditeurs à rechercher
un quelconque baptême du Saint Esprit, postérieur à une supposée
« réelle conversion ». Frédéric Verspeeten |
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