|
|
Exode 3,1-15 |
|
|
|
Fiche biblique L’épisode du buisson ardent : la vocation
de Moïse (Ex_3,1-15) L’épisode
du buisson ardent d’Exode chapitre 3, nous raconte ici comment Moïse reçoit
l’appel de Dieu. Cet appel le conduit à devenir Le Libérateur. Ce récit
d’appel et de vocation peut être comparé aux récits de vocations que l’on va
retrouver dans d’autres livres de l’ancien testament, notamment Amos 7, Esaïe
6, Jérémie 1, Ezéchiel 1 à 3. Le récit de l’appel de Moïse comporte des
différences mais le cadre est assez semblable : (i) Vision surnaturelle, (ii)
Parole de Dieu annonçant la mission, (iii) Mission qui consiste à aller
parler au nom de Dieu, (iv) Réaction du prophète troublé, hésitation,
discussion, (v) Certitude donnée par Dieu qui restera présent malgré la
faiblesse de l’homme, (vi) Geste ou signe donné par Dieu en liaison avec la
bouche du prophète. Moïse hésite, refuse. Dieu se fâche. Moïse, le berger, va
affronter Pharaon. Moïse est ici l’homme qui va faire passer le peuple hébreu
du statut de population servile à un peuple organisé socialement,
culturellement et plus tard politiquement. C’est un homme faible face à une
mission immense. L’on ne sait pas véritablement où a eu lieu la vision du
buisson. Il est question de la montagne de Dieu, Horeb. Ailleurs on dit que
cela se passe au Sinaï. Ces deux noms désignant la région en général. Et plus
particulièrement une chaîne de montagne avec un sommet précis. La tradition
biblique l’appelle la montagne de Dieu parce que c’est là que quelque chose
va se passer. Martin Buber pense que c’était un endroit particulièrement
remarqué par les bédouins à cause de la manifestation d’orages ou de
phénomènes météorologiques. Une région que l’on croyait habitée par les
puissances divines (phénomènes naturels : foudre, nuages). Ici
le récit souligne qu’il s’agit d’une intervention surnaturelle. Le Sinaï
devient le lieu de la Théophanie de Dieu qui apparaît dans la foudre,
l’orage, l’éclair, le feu (Exode 19, 16-18 ; Deutéronome 5, 22-27 ; Néhémie
9, 12). Selon une ancienne tradition ce n’est pas Dieu qui apparaît mais
l’ange de l’Eternel ; mais dès le verset 4 celui qui apparaît parle
comme Dieu. On a pensé que ce personnage est un ange, un ange particulier
chargé de grandes missions. Il parle comme s’il était Dieu. C’est la première
rencontre de Moïse avec Dieu qui se présente comme le Dieu d’Abraham, d’Isaac
et de Jacob. * * * * * Dieu
choisit de se révéler dans un buisson d’épines (symbolique : évocation de
l’humilité, de la souffrance et de la détresse). Il se révèle à lui comme le Dieu de son Père. Il
n’est pas totalement inconnu. Dieu le charge d’une mission. Que suggère le
buisson ardent ? Le feu est un double symbole de grâce et de jugement,
de purification : (i) Dieu est lumière, il éclaire et chasse les
ténèbres ; (ii) Sa présence réchauffe et ne saurait laisser notre cœur
froid ou tiède ; (iii) Dieu purifie les cœurs ; la flamme de Dieu
ne se consume pas. Deux êtres se rencontrent : Moïse et Dieu
croisent leurs regards. Du côté de Moïse, il y a volonté de connaître. Du
côté de Dieu il y a volonté de secourir le peuple asservi. Dieu interpelle
Moïse. Il le connaît par son nom. Pas de manière générale. Il ne lui dit pas
non plus : qui es-tu ? Il lui dit : je te connais … Je sais qui tu
es. Il invite Moïse à respecter le lieu. Et Dieu se révèle comme le Dieu des
patriarches. Mais aussi comme celui qui a compassion de son peuple. Il lui
dit (v. 7) : j’ai vu, j’ai entendu (7b), je connais (7), je ferai monter
le peuple d’Egypte vers un pays … (8c). Je t’enverrai, toi, Moïse. Dieu est
descendu vers son peuple. Dans le dialogue entre Dieu et Moïse, Moïse adresse
à Dieu des objections : - Qui suis-je pour aller vers Pharaon ? (Exode 3, 11)
- Ils ne me croiront pas et ne m’écouteront pas (Exode 4, 1) - Je ne suis pas
homme à la parole facile (Exode 4, 10) - Seigneur envoie qui tu voudras
(Exode 4, 13). En quelque sorte Moïse se reconnaît inapte, ignorant, sans
lettre de créance valable, handicapé par la difficulté à parler. Et il
démissionne. Dieu lui répond par quatre promesses : (i)- je serai avec
toi (Exode 3, 12), (ii) Tu parleras de « je suis » (Exode 3, 14), (iii) Je te
donne trois signes (Exode 4, 1 à 9), (iv) Je serai ta bouche et je t’adjoins
Aaron (Exode 4, 12). * * * * * Dieu
se révèle et donne son nom à Moïse.
L’Eternel nous apprend son propre nom, YHWH, le tétragramme, le nom ineffable, imprononçable, un
tétragramme explicité par un double futur Je serai
qui je serai. Bien sûr pour que tout le peuple comprenne que Moïse
est bien l’envoyé de Dieu, Moïse pourra se présenter comme le Dieu d’Abraham,
d’Isaac et de Jacob, pour rappeler ce qu’il a déjà fait. Mais son vrai nom
est YHWH, Je serai qui je serai. Celui
qui se révèle par le buisson ardent, l’Être Eternel, celui qui est présent,
affirme sa présence en la déclinant au futur. Une manière aussi de dire que
le Créateur considère sa création comme inachevée dans ce monde présent, et
qu’il nous faut parachever l’œuvre, la parfaire. En nous révélant son nom,
Dieu nous oriente. Bien sûr le passé est important, utile, riche
d’enseignement, mais ce qui compte vraiment est à venir. Dieu
nous oriente vers le futur. Dieu sera qui il sera, mais nous aussi, nous
serons qui nous choisirons d’être, nous pouvons agir, changer, agir sur nous,
nous changer, nous corriger, nous parfaire, nous améliorer et nous pouvons
agir sur le monde, le changer, l’améliorer. Le partenariat que Dieu nous
propose, c’est celui-là : nous serons ce que nous choisirons d’être. L’espérance
dans le judaïsme est dans le futur, pas dans le passé, nous sommes orientés
vers le futur, vers ce qui n’est pas encore. Nous ne pensons pas que
« c’était mieux hier », au contraire. D’ailleurs hier, c’était
quoi, Caïn et Abel, la Tour de Babel, Sodome et Gomorrhe, l’esclavage, la
peste, le choléra, le paludisme, les marécages, la mortalité infantile, les
famines, les femmes qui mourraient en couche ou d’un avortement, la peine de
mort, la loi du plus fort, la guerre de Cent Ans, les guerres de religions,
l’inquisition, le stalinisme, le nazisme, la Shoah, les Khmers rouges… ? A
nous d’être orientés vers le futur et d’améliorer l’homme et la société. C’est
d’ailleurs toute la différence entre l’homme et la machine, entre
l’intelligence humaine et « l’intelligence » artificielle. Je mets
des guillemets car l’intelligence dans IA est un faux-ami, c’est le terme
anglo-saxon présent aussi dans CIA, Central Intelligence Agency. Il
s’agit, en français, non pas d’intelligence mais d’informations, de données.
L’intelligence artificielle est avant tout le traitement de données à très
grande échelle. Or, les données, par nature, sont celles du passé. Sans
données, pas d’IA. L’IA c’est de la Data Science, un outil formidable,
indispensable, mais un outil de Data Science, pas plus, pas moins. L’IA peut
déduire des résultats à partir de données. Et surtout pas penser out of
the box, en dehors du champ. L’homme en revanche, le peut, il peut bien
sûr déduire, mais il peut aussi intuiter, pas la machine. Abraham
a su intuiter, il a su penser out of the box, il a compris le non-sens
de l’idolâtrie. L’IA d’alors serait restée idolâtre. Moïse aussi a intuité,
il a compris que le temps était venu de se libérer de l’esclavage et d’en
finir avec l’exil. L’IA serait restée fils de Pharaon, ou esclave en Egypte. ·
A
nous à présent de comprendre qu’il est temps de
nous libérer, de ne plus être esclave de
nos habitudes, de nos défauts, de nos
outils… ·
A nous de penser, fabriquer et utiliser nos outils
pour qu’ils nous aident, nous soulagent,
nous permettent de monter en
gamme, nous augmentent et non pour qu’ils soient nos
nouveaux
maîtres et nous aliènent. · A nous d’être Homme, l’Homme est créé à l’image de Dieu, aussi parce qu’il
sera qui il sera, qui il choisira d’être. Nous avons à chaque instant la
possibilité de choisir entre le bien et le mal, nous serons qui nous
choisirons d’être, que ce soit grâce au passé ou malgré lui, quelles que
soient les données du passé. Nous pouvons faire un retour sur nous, et
changer, nous pouvons « faire techouva », c’est-à-dire regretter
le gâchis que nous avons fait et ne plus jamais recommencer. · A nous d’écrire le futur, notre futur. L’œuvre n’est pas achevée, nous
n’aspirons pas au repos, nous choisissons de nous améliorer et d’améliorer
l’Homme et la Société. * * * Le
Messie, le Christ nous dit : Je suis avec tous les jours ; dans la
Nouvelle Jérusalem, moi, l’Agneau je serai le flambeau. Il y a du travail,
alors retroussons-nous les manches, gloire au travail, mettons fin à
l’esclavage, à tous les esclavages, et vive la liberté prochainement
retrouvée. Ici, suite à cette rencontre, Moïse va
devenir prophète, chef et libérateur de son peuple. Philippe Vernet Document de travail : Patrick PILCER, 2025.
Ici et maintenant : lecture républicaine de la Torah, préface de Haïm
KORSIA, grand rabbin de France ; éditions David REINHARC, voir pages 96
à 100. Fiche biblique |
|
|
|
Exode 3,1-15 |
|