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Méditation sur Matthieu 22,
34-40 |
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Nous ne
pouvons nous suffire à nous-mêmes. Le récit que nous découvrons aujourd’hui met en scène les
pharisiens et Jésus ! La question posée est relative au cœur de la Loi.
Quel est le plus grand commandement ? L’Evangile de Marc 12, versets 28 à 34, contient le même
débat mais il s’agit là d’une question posée par un spécialiste de la Loi.
Ces deux récits témoignent du fait que le débat sur les commandements et le
centre de la Loi était important. Il est vrai qu’à l’époque de Jésus les légistes avaient eu
tendance à enrichir considérablement ce qu’ils pouvaient considérer comme
commandement. Ils en avaient édité 613 au total… De 10 nous voilà à 613. Une
complication qui peut-être partait d’un souci de sainteté, de pureté,
peut-être de crainte de Dieu dans le sens négatif du terme… peur de son
jugement. Cette complication avait finalement servi à servir les intérêts des
scribes et du parti des pharisiens. 613. Le Talmud (traité Makot 23b) nous enseigne qu’il y
aurait 613 commandements dont 248 positifs (tu feras) et 365 négatifs (ne
fais pas). Mais le Talmud ne donne pas la liste trop précise de ces
commandements qu’il nomme MITSVOT (commandements divers). Si les maîtres du judaïsme ont tenté de les collectionner,
d’en établir une liste, ils ne sont pas d’accord entre eux sur un petit
nombre des commandements. Le problème est de déterminer si une catégorie est
bien obligatoire, ou il si il en est de facultatifs. C’est à Maïmonide dans
son œuvre maîtresse Michné Torah
que l’on doit la tentative d’uniformisation postérieure, donc un débat du
récit de Matthieu. Beaucoup de ces commandements sont aujourd’hui caducs car
il n’y a plus de temple à Jérusalem. Et selon les sages les 10 commandements
contiennent par essence ne eux-mêmes les 613. Ceci nous paraît complexe. A l’époque de Jésu un autre débat existait au sein du
judaïsme. On se réclamait de Schammaï ou
d’Hillel. Deux maîtres de la Loi
qui donnaient de la pratique de celle-ci une vision différente. On prétendait
qu’Hillel était doux et Schammaï trop vif. Hillel était plus optimiste…
Schammaï était plus méfiant, plus rigoriste. Il ne faudrait pas conclure que
Schammaï était misanthrope ou implacable : il recommandait une attitude
amicale envers chacun mais pensait qu’il fallait adopter une application la
plus stricte de la Loi, avec sévérité pour être le plus juste possible …
Hillel était plus tolérant … Derrière l’image de ces deux hommes il y a le problème de
la nature humaine. Schammaï semble penser que l’on peut la discipliner au
point de ne commettre aucune erreur devant la Loi, et satisfaire Dieu. Hillel
pense que l’homme est toujours faillible et que l’intention avouée devant
Dieu est le chemin de la liberté plus que l’exigence. * * * * Les
hommes qui viennent voir Jésus (Pharisiens) veulent le tester, savoir ce
qu’il pense, Lui. Les
spécialistes de la Loi étaient agacés par sa manière de répondre
naturellement aux questions posées. Jésus ne se lancera pas ici dans une
démonstration compliquée. Il ne va pas citer de tête des litanies de grands
textes connus … il va reprendre simplement. Ces interlocuteurs ne sont pas
bienveillants, ils cherchent à le prendre en défaut ! Beaucoup de
pharisiens et de pratiquants de l’époque n’arrivaient pas à mettre en
pratique les règles et prescriptions des 613 Mitsvots ; mais ces hommes
s’interrogeaient et se posaient cette question : où est-ce qu’est
l’essentiel dans la vie avec Dieu, qu’est ce qui peut donner un sens à la
vie ? Question
piégeante, mais question vitale pour tous, pour vous, pour moi. Pour
Jésus ce qui est essentiel ne se situe pas dans les centaines de
commandements rituels qui régissaient la vie religieuse et sociale de ses
contemporains, et notamment des spécialistes de la Loi qui condamnaient
d’ailleurs ceux qui ne respectaient pas ou n’arrivaient pas à pratiquer
correctement ou pas du tout. Jésus
ne met pas la pureté rituelle au cœur de la vie. Il ne met le respect du
sabbat au centre de son message, il ne se préoccupe pas du jeûne, des
prières, des aumônes, de nombre de pas qu’il faut faire, sans les dépasser le
jour du schabbat. Il ne se souci guère des multiples codes de sacrifices. Ces
choses étaient au cœur des débats, pour lui elle sont stériles et très
secondaires. Dans
sa réponse Jésus dépasse le code religieux et rituel. Jésus rassemble toutes
les lois dans un seul commandement qui en lui-même est double : aimer
Dieu, aimer notre prochain ! Selon
lui ce qui est essentiel et central, ce n’est pas l’observation exacte et
précise des lois dites de Dieu … ce ne sont pas nos gestes religieux, mais ce
sont nos gestes envers ceux et celles qui nous entourent et que nous croisons
tous les jours. Le
respect de la religion, c’est important ; peut-être Jésus ne le critique
pas. Mais l’essentiel, c’est notre être, notre manière d’être devant Dieu. Si
nous cherchons une plus grande présence de Dieu ou communion avec Lui dans
des règles strictes nous nous égarons et nous serons toujours trouvés en
défaut devant l’une ou l’autre. Par
ailleurs il est temps de préciser quelque chose. Nous parlons, nous, de commandements.
Jésus, lui, comme tous les juifs de son époque, en hébreu, ne parlera pas de
commandements mais de paroles. A la base Dieu livre à Moïse 10 paroles
qui ici deviennent une en deux. L’erreur
des débats des cercles du judaïsme de l’époque pour Jésus consiste à
transformer la Parole de Dieu en commandements exigeants. Les Paroles de Dieu
ne sont pas d’abord des exigences implacables mais des promesses.
Promesses faites à Abraham bien avant Moïse : Je serais avec toi. Et
Dieu sera fidèle à son engagement. Il voudra nous conduire nous-mêmes dans le
chemin de la fidélité envers ses promesses et sa parole. La sainteté ne
viendra pas de nos obsessions face à nos chutes mais par une ouverture, une
disponibilité à l’œuvre du Saint Esprit dans nos vies, qui accueille nos
fautes, nos faiblesses pour les transformer et faire naître en nous l’homme
nouveau de plus en plus proche et conforme au désir de Dieu, non pour
lui-même mais pour chacun de nous ! Dans
ce rapport aux autres et à Dieu (dans ces face à face) nous sommes invités
à nous décentrer de nous-mêmes, à ne plus être la norme absolue. A ne
plus nous considérer comme le centre de l’univers. Nous ne pouvons pas nous
suffire à nous-mêmes. Ce que nous sommes et devons être nous le devenons
par le cheminement face à Dieu et face aux autres. Dietrich
Bonhoeffer disait : « Croire
veut dire fonder notre vie sur une base en dehors de nous-mêmes ».
Les spécialistes de la Loi à l’époque de Jésus ne le faisaient pas ; ils
étaient devenus leur propre Loi. Le Christ nous invite à nous échapper, à
sortir de nos enfermements, à nous libérer de nous-mêmes, à nous laisser
transformer par la différence. Car Dieu fait en nous œuvre de libération. Il
n’y aura pas de dialogues entre religions féconds tant que les partenaires
n’accepteront pas ces principes de base. * * * * Pour conclure deux
axes sont donnés à la vie du fidèle qui veut cheminer avec Dieu malgré ses
faiblesses. Aimer
Dieu L’amour
de Dieu se communique par l’écoute de sa parole. Cet amour est gratuit,
accessible à tous. Il est rupture avec l’idolâtrie, avec nos images déformantes de Dieu. Il est
dialogue intense de notre être intérieur (âme) avec Dieu … ce qui suppose
l’humilité. Cette intimité permet de résister au mal et aux artisans du mal,
d’affronter et de surmonter l’épreuve. Cette
intimité à entretenir avec Lui conduit à ce que Dieu nous regarde comme ses
amis malgré nos différences. Abraham est devenu l’ami de Dieu, son confident.
Dieu révèle sa volonté. Moïse est devenu l’intime de Dieu (Exode 33,11). Ici
nous réalisons ce qu’est sa miséricorde, ce qui rend fécond notre
intercession.. Lorsqu’on se plonge dans cette présence de l’Amour de Dieu
l’on réalise que l’Amour triomphera toujours du péché et du mal. Qu’il réera
en nous un cœur nouveau. Que la miséricorde de Dieu l’emportera toujours sur
le jugement. Ainsi
notre prière et notre écoute de Dieu ne sont plus vaines et il peut nous
conduire à vivre des relations transformées et nouvelles avec tous :
envers les plus méprisés, envers nos ennemis. Il
est puissance de vie nouvelle et de résurrection ! Dieu
vient nous aider a sortir de nos enfermements. Il vient nous libérer pour
vivre à son service, pour être peu à peu véritablement nous-mêmes et au
travers des tristesses à trouver le chemin du bonheur. Frédéric Verspeeten |
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Méditation sur Matthieu 22,
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