La Confessio belgica
présentation du texte

Lors de son séjour à Tournai Guy de Brès va rédiger la Confession de foi des Pays-Bas. Ce document appartient aux textes symboliques de la Réforme au même titre que la Confession de foi de La Rochelle.

Cette confession n'est plus aujourd'hui le texte symbolique unique auquel se réfèrent les Églises protestantes en Belgique. Toutefois l'église Protestante de Belgique qui regroupe une centaine de communautés dispersées dans tout le pays est composée de paroisses qui se reconnaissent héritières de ceux qui ont confessé leur foi dans différents textes de référence depuis le Symbole des Apôtres jusqu'au Catéchisme de Heidelberg en passant par le Symbole de Nicée-Constantinople et la Confessio belgica. Elles inscrivent leur foi dans la tradition des Églises issues de la Réforme du XVIe siècle. Cette confession est aussi la référence de plusieurs Églises aux Pays-Bas, en Amérique du Nord et en Afrique du Sud.

Lorsque Guy de Brès rédigea en 1555 son Baston de la foi, il pensait déjà rédiger une confession. Le baston de la foi se voulait avant tout une réponse au Bouclier de la foi, ouvrage dû à la plume de Nicolas Grenier. Il répondait à l'auteur catholique et tentait d'établir l'ancienneté de la foi qu'il défendait.

Elle ne s'adressait pas aux Églises wallonnes seulement mais à l'ensemble des églises tant flamandes que wallonne des dix sept provinces des Pays-Bas.

La confession de foi est composée de 37 articles et est précédée d'un titre dans son édition initiale : « confession vraiment chrétienne contenant le salut éternel de l'âme » :

Article 01 - de Dieu

Article 02 - de la connaissance de Dieu

Article 03 - de la Parole de Dieu

Article 04 - du canon1 de L'Écriture sainte

Article 05 - de l'autorité de l'Écriture sainte

Article 06 - des livres apocryphes

Article 07 - de la perfection de l'Écriture sainte

Article 08 - de la Trinité

Article 09 - des témoignages bibliques de la Trinité

Article 10 - de la divinité de Jésus Christ

Article 11 - de la divinité du saint Esprit

Article 12 - de la création du monde : des anges

Article 13 - de la Providence de Dieu

Article 14 - de la création de l'homme : de la chute et de ses suites

Article 15 - du péché originel

Article 16 - de l'élection de Dieu

Article 17 - de la promesse du sauveur

Article 18 - de l'Incarnation du fils de Dieu

Article 19 - des deux natures du Christ

Article 20 - de la justice et de la miséricorde de Dieu dans la rédemption

Article 21 - de la réconciliation en Jésus Christ

Article 22 - de la justification par la foi

Article 23 - de notre justice devant Dieu

Article 24 - de la sanctification et des bonnes œuvres

Article 25 - de l'accomplissement de la loi en Christ

Article 26 - de la médiation de Christ

Article 27 - de l'église universelle

Article 28 - de la communion des saints

Article 29 - des marques de la véritable Église

Article 30 - du gouvernement de l'Église

Article 31 - des serviteurs de l'Église

Article 32 - de la discipline dans l'Église

Article 33 - des sacrements

Article 34 - du baptême

Article 35 - de la sainte cène.

Article 36 - des autorités civiles

Article 37 - du jugement dernier.

Ces articles s'articulent autour des neuf thèmes classiques des définitions de la foi chrétienne commune c'est ainsi que l'on peut facilement repérer :

- Une présentation de la révélation de Dieu aux hommes : articles 1 à 2

- Une synthèse sur le statut de l'Écriture sainte : articles 3 à 7

- Une explication sur la divinité et la Trinité : articles 8 à 11

- Un résumé de la thèse de la création de la place de l'homme et de la chute : articles 12 à 15

- L'explication de l'œuvre du salut en Jésus Christ : articles 16 à 26

- L'évocation du rôle de l'église : articles 27 à 32

- La place des sacrements : articles 33 à 35

- Puis en deux articles, la justification du pouvoir civil et l'annonce du jugement final qui appartient à Dieu : articles 36 et 37.

En ce qui, concerne la divinité, la confession affirme qu'il n'y a qu'un Dieu, essence spirituelle, éternel, incompréhensible, invisible, immuable, tout puissant, sage juste et bon, source de tous biens. Nous pouvons accéder à sa connaissance par deux moyens : la création et la sainte parole.

La Parole de Dieu, occupe cinq articles. Pour le réformateur des Pays-Bas, il est posé immédiatement qu'aucune parole n'a été apportée de manière humaine. Il cite ici la seconde épître de Pierre (II Pierre 1,21) :

  Il a commandé à ses prophètes et apôtres d'écrire et à lui-même de sa main gravé les tables de la Loi. Les Écritures sont ainsi marquées de l'œuvre divine ".

En ce qui concerne le canon des Écritures1, c'est-à-dire la liste des écrits qu'il faut regarder comme révélés, dignes de retenir notre attention pour guider les pas des fidèles : cette liste est très classique, il s'agit en fait des écrits que nous connaissons dans nos bibles protestantes et qui se réfèrent à la bible hébraïque. Pour faire bref et simple, 39 livres dans l'Ancien Testament et 17 dans le nouveau. Les livres deutérocanoniques  [intégrés par le concile de Trente pour l'église catholique] sont tenus pour apocryphes et clairement mentionnés comme tels dans l'article 7.

La Bible ainsi définie est considérée dans l'expérience de foi comme Écriture sainte marquée du sceau de la volonté divine et contient tout ce que l'homme doit croire. C'est pour cette raison qu'il ne saurait être question de n’accorder aucun crédit aux enseignements qui s'en sépareraient : aucun écrit humain même de l'homme le plus saint ne saurait jamais l'égaler. C'est là pour Guy de Brès une règle infaillible.

La doctrine de la Trinité quant à elle est extrêmement classique. Mais l'auteur précise non sans pertinence que si le Père est la cause, le Fils la parole et la sagesse et l'Esprit saint la puissance éternelle qui procède du Père et du Fils, il ne faut pas en conclure que cette distinction aboutisse à diviser Dieu en trois. Si l'Écriture enseigne que ces trois ont chacun leur subsistance distincte et leur propriétés, ces trois personnes ne forment qu'un seul Dieu !

Cette doctrine de la Trinité trouve appui dans les déclarations de l'Écriture. La doctrine de la Trinité est reçue par Guy de Brès parce qu'elle a toujours été maintenue ainsi dans la vraie Église depuis le temps des apôtres jusqu'à présent, contre les juifs et les mahométans et contre quelques faux chrétiens hérétiques tels Marcion, Manès, Sabellius ou Paul de Samosate ou encore Arius. En lisant ces lignes de l'article 9 de la confession il est évident que nous sommes sur le terrain de la stricte orthodoxie doctrinale de l'Occident dans la conformité aux premiers conciles œcuméniques.

Cette confession de foi se situe comme toutes les confessions de foi de la Réforme dans le prolongement des trois symboles : celui des apôtres, celui de Nicée et enfin le symbole d'Athanase.

Concernant la doctrine de Jésus Christ, pour la Belgica c'est d'abord de la divinité de Jésus Christ dont il est question : Jésus est le fils unique de Dieu. Éternellement engendré il n'a pas été fait ni créé mais il est d'une même essence avec le Père. Fils de Dieu, il est de toute éternité. Pour étayer son propos le texte se réfère à des citations de versets bibliques notamment (Jean 1,3 ; Hébreux 1,2 et Colossiens 1,16).

Quant au Saint-Esprit il procède du Père et du Fils et est considéré comme troisième dans l'ordre trinitaire.

Dieu est présenté comme le créateur du ciel de la terre et de toute autre créature. Le Fils, sa parole, en est l'agent et il a donné à chacune des créatures leur être, leur forme leur figure Mais la création ne s'arrête pas là. Dieu soutient et gouverne toute chose selon sa providence éternelle.

La confession évoque les anges crées bons pour être les messagers de Dieu au service des élus mais elle constate aussi que certains anges sont tombés dans la perdition éternelle alors que les autres sont restés dans leur premier état par la grâce de Dieu.

Les anges déchus de leur dignité sont devenus des démons ennemis de Dieu et de tout bien, désormais ils utilisent leur force à scruter l'Église comme des brigands pour détruire, gâter, tromper. Ils y emploient toute leur force et ils sont condamnés à la damnation perpétuelle.

La création n'est pas la fin de l'œuvre de Dieu. Il ne nous a pas abandonnés et continue de gouverner les choses selon sa volonté. Si bien qu'il n'arrive rien en ce monde sans qu'il l'ait ordonné. À ceci près qu'il n'est ni auteur, ni coupable du péché et du mal, les cheveux de notre tête sont comptés. Dieu contrôle les diables, nos ennemis. Rien ne peut nous nuire sans sa permission. Guy de Brès rejette donc les épicuriens qui affirment que Dieu ne se mêle de rien et laisse aller toutes choses à l'aventure.

Frédéric Verspeeten

 

 

 

Septembre 2012

 

 

1      Canon des Écritures : malgré les apparences, il ne s'agit pas là d'une arme, mais de la liste officielle (du grec " kanon " qui signifie " la règle ") des livres bibliques considérés comme inspirés par Dieu. Il semble bien que la clôture de l'Ancien Testament fut le fait des rabbins palestiniens retirés à Jamnia après la chute de Jérusalem et la disparition du temple en 70 de notre ère. Les livres rejetés furent qualifiés d'apocryphes.

À noter que la traduction grecque de la Septante, à Alexandrie, fit apparaître un second canon des écritures juives, légèrement différent du canon hébreu (la Septante intègre notamment quelques ouvrages tardifs écrits directement en grec). Ces deux listes se retrouvent dans les bibles chrétiennes, les Églises protestantes ne retenant d'ordinaire que les ouvrages de la liste brève (canon palestinien), tandis que l'Église catholique adopte traditionnellement la ligne de la Septante. Mais on notera, d'une part que ces légères divergences dans le nombre et le classement des écrits bibliques ne valent que pour l'Ancien Testament, d'autre part que la Traduction Œcuménique de la Bible (T.O.B.) donne désormais tous les livres de l'un et l'autre canon, quitte à classer à la fin les livres qualifiés de deutérocanoniques (c'est-à-dire ressortissant au deuxième canon).