Les sources de la confession de foi

Calvin et la confession de Guy de Brès

La confession de foi de Guy de Brès présente les caractéristiques d'une confession de foi calviniste dans la mesure où elle combat, dénonce et rejette les doctrines catholiques romaines et anabaptistes. Elle prend d'ailleurs ainsi ses distances par rapport à certaines options théologiques luthériennes : article 19 sur les deux natures et articles 27 et 29 sur l'Église qui sont d'expression nettement calviniste.

Dès les origines, dès la publication de la confession de foi son orientation calviniste a été soulignée par les commissaires qui en trouvèrent les exemplaires en 1562 dans la maison de Guy de Brès à Tournai. Leur rapport relate que « cet écrit est rempli des erreurs et doctrines perverses de Jean Calvin ».

Guy de Brès a donc selon toute vraisemblance été en contact avec Jean Calvin, celui-ci étant la figure marquante de la Réforme à cette époque. Selon les historiens et pour résumer succinctement la question, il y aurait au moins deux périodes et lieux où les deux hommes ont pu avoir un contact personnel direct : à Francfort et à Genève. L'on sait de manière certaine que Calvin a séjourné à Francfort pendant trois semaines en septembre1556 dans le but d'aider la communauté réformée locale. Guy de Brès qui, dans la même période, avait fort à faire pour s'opposer aux doctrines anabaptistes, pourrait avoir rencontré brièvement Calvin à cette occasion, mais les emplois du temps connus des deux hommes à ce moment là ne permettent pas d'établir avec certitude la réalité de cette rencontre.

Par contre, la composition de la bibliothèque de Guy de Brès à Tournai, nous donne des renseignements plus précis. Parmi les écrits découverts il y avait une lettre de Jean Calvin datant de 1566 dans laquelle le réformateur répond à Guy de Brès concernant certaines questions qui lui ont peut-être été adressées dans un courrier précédant. Les agents qui perquisitionnèrent établirent à partir de cela que les deux hommes avaient bien été en contact à Genève et Lausanne et que c'est là que Guy de Brès avait trouvé son inspiration.

Malheureusement nous ne possédons plus la lettre de Jean Calvin parce qu'elle a été détruite par les autorités soucieuses d'éradiquer toute trace de la prétendue hérésie. Par ailleurs, il est difficile de savoir si la lettre de Calvin écrite en 1566, c'est à dire pendant le temps où il se rendit à Francfort, fut rédigée après une rencontre avec Guy de Brès ou simplement suite à un courrier qui lui serait parvenu. Il faut noter toutefois que Guy de Brès se réfère à Calvin comme autorité sur les questions qui lui semblent nécessiter un avis sage.

Ce qui est certain cependant c'est que Guy de Brès à séjourné à Genève. Nous le savons grâce à la biographie du réformateur du Hainaut et des Pays-Bas qui a été établie par Jean Crespin dans son livre des martyrs : « Après cela, alors qu'il était désireux d'accroître sa connaissance nécessaire pour le ministère, il voyagea jusqu'à Lausanne et Genève à cet effet pour apprendre notamment le latin….après être resté en ces lieux quelque temps, lors de son retour aux Pays-Bas il réorganisa les églises de Lille, Tournai et Valenciennes ».

Selon les études précises de Van Langeraad, Guy de Brès quitta Lausanne pour Genève à la fin de 1556 ou au début de 1557 et l'on peut supposer qu'il revint en « Belgique » vers 1559. Entre la fin de l'année 1556 et la fin de l'année 1559, Guy de Brès a donc pu entendre un bon nombre de sermons de Calvin et étudier ses écrits.

La découverte de la bibliothèque de Guy de Brès à Tournai a permis d'établir qu'elle était composée d'ouvrages de Calvin, l'on ne dit toutefois pas lesquels et qu'on y trouva aussi, et ce n'est pas négligeable, des ouvrages de Luther, Melanchthon, Œcolampade, Zwingli, Bucer, Bullinger. Ceci nous permet de souligner que Guy de Brès fut influencé aussi par l'expression globale et diverse de la pensée réformatrice de l'époque. Cela ressort clairement de sa publication de 1566 contre les anabaptistes qui cite souvent comme sources Calvin mais aussi Lasko, Bullinger et Micron.

Selon ces éléments Guy de Brès a donc été l'étudiant, l'élève de Jean Calvin, mais pas uniquement. Il a aussi été influencé par d'autres figures de la Réforme, certaines d'entre elles appartiennent au calvinisme, d'autres sont plus généralement l'expression du protestantisme naissant.

La question qui nous préoccupe consiste à savoir si Calvin a influencé l'écriture et la rédaction de la Confessio belgica. Pour comprendre comment la Confessio belgica a vu le jour, il est important de faire un détour par la Confession de foi gallicane, celle qui deviendra la confession dite de La Rochelle.

François de Morel avait été chargé par le synode des Églises réformées du royaume de France d'adresser à Calvin la demande d'un modèle de confession de foi. Le réformateur Jean Calvin hésita d'abord puis, il envoya ses représentants au synode avec un canevas de 35 articles basés sur les trente cinq articles de la Confession de Paris de 1557. Dans sa forme cette confession initiale devint celle des églises Vaudoises, du Piémont et des réfugiés italiens de Genève.

 Morel répondit à Calvin que les Églises de France avaient accepté son projet, son « brouillon », mais qu'il avait été décidé d'y ajouter plusieurs éléments sans que cela ne change finalement l'esprit général du texte d'ensemble, cela se confirme particulièrement si l'on compare les deux confessions. Eu égard à cette réorganisation initiale la confession gallicane passa de 35 à 40 articles.

Confession de Paris

Confession gallicane

Article 1 - sur les fondements de la foi et de la révélation selon les Écritures

Article 1 - les attributs de Dieu

Article 2 - la doctrine de Dieu ses attributs, la trinité

Article 2 à 5 articles sur la révélation

 

Article 6 - la trinité

Le premier synode national de Paris en 1559 la complètera donc, la modifiera légèrement et adoptera le texte de ce qui deviendra la Confession de foi gallicane encore appelée Confession de foi de La Rochelle. Elle sera ratifiée au septième synode présidé par Théodore de Bèze à La Rochelle, le 13 avril 1571. Le réformateur Jean Calvin est donc l'auteur principal de la Confession de foi des Églises réformées de France.

Dans sa forme cette confession initiale devint celle des églises Vaudoises, du Piémont et des réfugiés italiens de Genève.

Si l'on s'intéresse maintenant à l'influence de la Confession gallicane sur la belgica il ressort que les articles n'ont pas été corrigés de la même manière. Comme nous avons eu l'occasion de l'écrire précédemment la Confessio belgica n'est pas née de rien, elle a été écrite dans un contexte particulier dans le but de témoigner de l'authenticité de la foi réformée dans le respect de l'Écriture et dans le souci de témoigner de la grâce de Dieu.

Si on la compare rapidement à la confession de La Rochelle, on peut remarquer que la belgica présente avec celle-ci de nombreux points de ressemblance : Elle est assez  similaire au « patron modèle » des 35 articles. Pour s'en convaincre il suffit d'ailleurs de comparer les deux premiers articles des deux confessions.

Confession gallicane

 (La Rochelle)

Confessio belgica

(Églises réformées des Pays-Bas et Églises wallonne)

Article 1

Nous croyons et confessons qu’il y a un seul Dieu, qui est une seule et simple essence, spirituelle, éternelle, invisible, immuable, infinie, incompréhensible, ineffable, qui peut toutes choses, qui est toute sage, toute bonne, toute juste, et toute miséricordieuse.

Article 1

Nous croyons de tout de cœur et confessons de bouche, qu'il y a une seule et simple essence spirituelle, laquelle nous appelons Dieu éternel, incompréhensible, invisible, immutable, infini ; lequel est tout puissant, tout sage, juste, et source très abondante de tous biens.

Article 2

Ce Dieu se manifeste tel aux hommes, premièrement par ses œuvres, tant par la création que par la conservation et conduite d’icelles. Secondement et plus clairement par sa Parole, laquelle au commencement révélée par oracles, a été puis après rédigée par écrit aux Livres que nous appelons Écriture Sainte.

Article 2

Nous le connaissons par deux moyens. Premièrement : par la création, conservation et gouvernement du monde universel, d'autant que c'est devant nos yeux comme un beau livre, auquel toutes créatures, petites et grandes, servent de lettres pour nous faire contempler les choses invisibles de Dieu, savoir sa puissance éternelle et sa divinité, comme dit l'Apôtre saint Paul. Toutes lesquelles choses sont suffisantes pour convaincre les hommes, et les rendre inexcusables.) Secondement : Il se donne à connaître à nous plus manifestement et évidemment par sa sainte et divine Parole, tout autant pleinement qu'il nous est de besoin en cette vie pour sa gloire et le salut des siens.

 

Les articles 3 à 7 suivent eux aussi le même modèle que la confession gallicane sauf pour la question relative aux livres apocryphes que la confession belge aborde dans un article séparé. Voir son article 6, alors que la Rochelle intègre brièvement cette question dans son article 4 en se contentant d’affirmer que sur ces autres livres ecclésiastiques bien qu’utiles il n’est pas possible d’établir d’article de foi.

La « gallicane » consacre ses articles 10 et 11 à la chute et à la condition pécheresse de l’homme.

La « belgica » en compte trois, elle résume moins, détaille davantage et ajoute:

Article 16

Nous croyons que toute la race d'Adam étant ainsi précipitée en perdition et ruine par la faute du premier homme, Dieu s'est démontré tel qu'il est, savoir miséricordieux et juste : miséricordieux, en retirant et sauvant de cette perdition ceux qu'en son conseil éternel et immuable il a élus et choisis par sa pure bonté en Jésus-Christ notre Seigneur, sans aucun égard de leurs œuvres justes, en laissant les autres en leur ruine et trébuchement où ils se sont précipités.

 

Par ailleurs les questions abordées dans les articles 16, 34 et 36 sont plus détaillés que dans la confession gallicane.

(voir articles 35 à 37 de la confession gallicane).

L’article 34 de la belgica est un long développement sur le sens le sacrement et l’efficacité du baptême, un tel développement est absent de la confession gallicane qui se contente en ces articles brefs, relatifs aux sacrements de mentionner le baptême et développe un peu plus la question de la cène.

 

Quant à l’article 36 relatif aux autorités civiles, en partie semblable aux dispositions de la confession gallicane, il se dissocie nettement du comportement et des conceptions des autres mouvements religieux présents sur les terres des Pays-Bas : « …que nous menions une vie paisible et tranquille en toute piété et honnêteté. Et sur ceci nous détestons l'erreur des Anabaptistes et autres mutins, et en général de tous ceux qui veulent rejeter les autorités et Magistrats et renverser la justice, établissant communautés de biens, et confondant l'honnêteté que Dieu a mise entre les hommes ».

C’est par ailleurs un fait qu’au synode néerlandais d'Emden en 1571 nos pères estimèrent que ces deux textes pouvaient être considérés comme similaires et y adhérèrent en les signant tous deux. On peut voir en ce geste la confirmation du caractère pleinement calviniste de la Confessio belgica.

Nous nous sommes attachés à mettre en évidence les points de convergence entre les deux confessions mais il est plus important encore de remarquer que la confession belge s'inspire, dans l'expression de sa pensée, de l'Institution de la religion chrétienne de Jean Calvin. Bien que les deux ouvrages ne soient pas comparables au niveau du volume on peut identifier des similarités au niveau structurel. Les deux œuvres sont précédées d'une épître dédicatoire, à l'intention de François Ier ou de Philippe II. Par ailleurs la confession suit l'ordre et la structure de l'institution, elle est articulée de la même manière, suit la même logique de présentation : exposé sur Dieu le Père, sur le Fils et son œuvre, sur l'Esprit Saint, l'Église et les choses finales.

Les différences sont mineures, la belgica ne développe pas les trois offices du Christ tels qu'ils sont exposés par Calvin dans l'institution (2.15), et la terminologie de l'Alliance n'est abordée qu'au passage dans l'article 34 de la confession alors que Calvin y consacre un développement plus étendu au chapitre second de son institution, notamment aux livres 10 et 11.

L'influence d'un autre géant de la Réforme : Théodore de Bèze

Outre l'influence de la pensée de Jean Calvin sur la Confession de foi belgica il est possible de discerner l'influence d'un autre père de la réforme sur ce document en la personne de Théodore de Bèze.

Théodore de Bèze, né en 1519 dans une famille catholique romaine, vint à Orléans en 1528 pour étudier auprès de Melchior Wolmar, c'est pendant ce séjour qu'il adhéra aux idées réformatrices. Plus tard il écrivit une confession de foi dans le but de proclamer devant tous et devant son père qu'il était un « véritable chrétien » et non un impie ou un hérétique comme on le disait de lui et le rapportait dans son milieu.

Par cet écrit, il souhaitait exposer la vérité de son cheminement mais aussi tenter de gagner son père aux idées de la Réforme. En 1558 Théodore de Bèze deviendra professeur de grec à la nouvelle académie de Genève et un an plus tard il publiera sa confession de foi connue sous le nom de « confession de la foy chrestienne » ;  ou en français moderne : « confession de la foi du chrétien ».

Ce texte sera réédité dix fois entre 1559 et 1563 en langue française, traduit en latin en 1560 et se présente à nous en sept chapitres essentiels :

-       La Trinité

-       Dieu le père

-       Jésus Christ fils de Dieu

-       Le Saint Esprit

-       L'Église

-       Le jugement dernier

-       Le septième chapitre est consacré à la comparaison des doctrines papales et de la « véritable Église catholique ».

Elle se termine par un appel aux princes et magistrats pour qu'ils ne persécutent pas l'Église. Les chapitres sont plus ou moins longs selon les sujets abordés et leur importance pour l'exposé de la vérité des thèses réformées. Cet écrit a lui aussi influencé la trame de la Confessio belgica.

Les articles qui dénotent une influence de la confession de Théodore de Bèze sont les suivants : article 37 ( nous présenterons en fin de cet exposé la comparaison des deux documents ), les articles 10, 12, 13, 18, 22, 27, 29 et 33. Il y a aussi des expressions particulières qui sont utilisées dans le vocabulaire des articles 1, 9, 10, 12, 14, 15, 16, 19 et 28 qui soulignent une influence partielle.

Ce qui revient à dire que 17 des 37 articles de la belgica ont été imprégnés de la marque directe ou indirecte de Théodore de Bèze. Si la confession gallicane peut être considérée comme la source essentielle ainsi que le patron initial de la belgica, il n'en demeure pas moins que la confession de la foi du chrétien en est la source seconde.

Les tournures utilisées dans la confession que nous étudions que l'on retrouve aux articles 36 et 37 telles que : « finalement nous croyons « ne sont pas sans rappeler le chapitre VI de la confession de Théodore de Bèze qui commence elle aussi par « finalement nous croyons ».

Apparemment Guy de Brès partant de son canevas et de la confession gallicane, aurait décidé d'y intégrer, après avoir pris connaissance du texte de Théodore de Bèze, un certain nombre d'idées ou de phrases qui visaient à clarifier sa confession et, me semble-t-il, à l'harmoniser avec les textes réformés dans leur ensemble.

Il est intéressant de noter qu'en agissant de la sorte Guy de Brès a dû considérer qu'il n'y avait pas de différence fondamentale entre les positions théologiques des deux confessions.

L'on a souvent souligné que la théologie réformée a changé et évolué d'une théologie pastorale selon Calvin vers une théologie systématique scholastique basée sur la thèse de l'élection selon Théodore de Bèze.

Ce qui est évident c'est que la thèse des décrets divins occupe une place prééminente dans la théologie de Bèze. Cela apparait très nettement dans son premier chapitre. Si Guy de Brès n'insiste pas autant que Théodore de Bèze sur la prééminence du conseil de Dieu et de l'élection, il n'en demeure pas moins qu'il ne diffère pas théologiquement de Bèze sur la Providence et l'élection dans les articles 12 et 16.

Ainsi il est possible de trouver des marques de cette influence dans les différents articles que j'ai mentionnés précédemment...

Pour en donner une idée assez précise je me contenterai de présenter la comparaison entre l'article 37 de la belgica et le texte de la confession de Théodore de Bèze. Dans cet article l'influence du texte de Théodore de Bèze sur la confession belge est la plus évidente. Il s'agit d'un article relatif au jugement final de l'humanité et à la résurrection corporelle que nous citons ici en français de l'époque.

Confession du Chrétien de Théodore de Bèze

Confessio belgica

Finalement nous croyons, selon la parole de Dieu, qu'au temps ordonné de Dieu, et lequel les Anges mesmes ne scavent pas, lesus Christ voyant le nombre des eleus accompli, viendra du ciel corporellement avec sa Divine maiesté, estant ce vieil monde consumé par feu: Et lors comparoistront  devant luy tous les hommes qui auront este dés le commencement du monde.

Car ceux qui auront este morts au paravant, seront derechef unis avec les mesmes corps dont l'âme estoit séparée : Et ceux qui seront vivans
a l'heure de cest advenement seront changez en un moment changez, di-ie, quant à la qualité corruptible de leurs corps.

Finalement, nous croyons selon la parole de Dieu, que quand le temps ordonné du Seigneur sera venu, lequel est incongnu à toutes créatures, et que le nombre des esleus sera accompli, nostre Seigneur lesus Christ viendra du ciel corporellement et visiblement, comme il y est monté avec grande gloire et Maiesté, pour se declairer estre le luge des vivans et des morts : mettans en feu et en flambe ce vieil monde pour le consumer.

Lors comparoistront personellement devant ce grand luge toutes créatures, tant hommes que femmes et enfans, qui aurons este depuis le commencement du monde iusques à la fin, y estans adiournez par la voix et cris espouvantables des Anges et des Archanges, et par le son de la trompette Divine.

Car tous ceux qui auront paravant esté morts, ressusciteront de la terre, estans derechef l'esprit ioinct et uni avec son propre corps auquel il a vescu.

Et quant à ceux qui survivront, lors ils ne mourront point comme les autres mais seront changez et muez en un iect d'œil de corruptible en incorruption.

 

La Confession de foi des Églises des Pays-Bas s'enracine donc profondément dans les origines de la pensée calviniste.

Cette confession - dont nous ne pourrons ici développer les stades de réception par les églises puis de correction qui lui furent apportées lors de synodes ultérieurs - devint très vite un document qui s'imposera et fera autorité. Elle fut formellement adoptée par les synodes nationaux d'Anvers (1566), de Wesel (1568), d'Emden (1571), de Dort (1574) et de Middleburg (1581), et encore une fois lors du grand synode national de l'Église réformée néerlandaise qui s'est tenu à Dordrecht ou synode de Dordt. La première réunion eut lieu le 13 novembre 1618 et la session finale, la 154e, se tint le 9 mai 1619.

Des représentants des Églises réformées de huit pays étrangers furent aussi invités et participèrent aux votes, mais aucun français car les autorités françaises interdirent leur présence. Plusieurs chaises vides furent installées dans la salle où se tint le synode en l'honneur des huguenots absents ! L'objectif du synode était de régler une querelle théologique qui était née suite à l'apparition de l'arminianisme.

Précisions sur les objections arminiennes à la Confessio belgica

En effet, après la mort de Jacobus Arminius (1560 ? - 19 octobre 1609), ses partisans ont émis des objections à la Confessio belgica et à l'enseignement de Jean Calvin, de Théodore de Bèze et de leurs disciples. Ces objections ont été publiées dans un document appelé la Remonstrance publiée en 1610 : de ce fait, les partisans de l'arminianisme étaient aussi connus sous le nom de remonstrants. Leurs opposants calvinistes, menés par le professeur Franciscus Gomarus de l'université de Leyde, furent, quant à eux, appelés contre-remonstrants.

Dans la Remonstrance et dans quelques écrits postérieurs, les arminiens ont publié une alternative à la doctrine calviniste telle qu'elle est formulée dans la Confessio belgica : leurs divergences portaient sur cinq points. Ils enseignaient : l'élection sur la base de la foi prévue ; le pardon universel ; la dépravation humaine partielle ; la résistibilité à la grâce ; la possibilité d'une rechute malgré la grâce.

Simon Bischop fut le porte-parole des treize représentants des remonstrants convoqués devant le synode qui s'est conclu sur le rejet des positions arminiennes et la condamnation de Johan van Oldenbarnevelt, homme d'État très respecté et influent qui avait été le protecteur des remonstrants. Ce dernier fut la victime emblématique des troubles religieux survenus en Hollande au cours de la Trêve de Douze Ans : il a été décapité le 13 mai 1619, seulement quatre jours après la session finale du synode, pour le crime de trouble général de l'état de la nation, tant dans l'Église que dans l'État (pour haute trahison).

Le texte de la Confessio belgica à nouveau révisé lors de ce synode de Dordrecht fut alors reconnu comme l'une des trois références doctrinales (les Trois formes d'unité) à laquelle tous les ministres du culte des églises réformées étaient tenus de souscrire, les deux autres étant le catéchisme de Heidelberg et les canons de Dordrecht (nom sous lequel est connue la Décision du synode de Dordt concernant les cinq points principaux de la doctrine arminienne en débat aux Pays-Bas).

Conclusion

La Confessio belgica sera adoptée d'abord au synode provincial d'Anvers en 1565 puis lors du synode national d'Anvers en 1566. Ensuite retravaillée pour exprimer le plus clairement possible les thèses de la réforme calviniste, elle deviendra la base commune de tous les réformés et de leurs ministres. Son autorité sera considérablement renforcée lors des deux synodes de Dordrecht en 1574 et 1618-1619.

Pour conclure temporairement, il faut encore dire que cette confession a fait l'objet de nombreuses traductions en langues autres que le français (sa langue de rédaction) et en néerlandais puisqu'il en existe des traductions en allemand, en latin, en grec, en anglais (certaines d'entres elles sont plus spécifiquement nord américaines). Mais il y a aussi des traductions en langues indonésiennes, en espagnol, en portugais ; ces traductions témoignent du fait qu'elle a un rayonnement mondial qui est le fruit d'un effort missionnaire d'annonce de l'Évangile autour des grands principes du calvinisme. Elle est et demeure l'une des références essentielles de la pensée calviniste mondiale.

Frédéric Verspeeten

 

 

Septembre 2012