|
|
|
|
Titre
de l’ouvrage : Les racines juives du christianisme Auteur :
Frédéric Manns Edition :
Presses de la Renaissances Séquence 05 : pages
030 à 034 030 Les fêtes juives L’âme
d’un peuple s’exprime de façon vraie dans sa prière à Dieu. Une étude
sommaire de la liturgie juive, qui regroupait les juifs de toutes tendances,
s’impose donc. Elle est l’élément unificateur du peuple. La profession de foi
du Shema Israel, accompagnée du
commandement de l’amour de Dieu, avait façonné l’âme du peuple. Le
sabbat est pour le juif un jour de prière et de repos. Dieu s’était reposé
après son ouvrage de six jours. Le fidèle doit imiter son Créateur. En
Israël, l’institution du sabbat est ancienne : les codes d’alliance et
les rédactions du Décalogue y font allusion. Si
le sabbat est perçu comme imitation de Dieu, il est aussi rattaché à
l’histoire du salut. Il évoque la sortie d’Egypte en Dt 5, 12-15. Le repos
sabbatique préfigure ainsi une société où les classes sociales sont abolies.
De même que Dieu a libéré Israël de l’esclavage d’Egypte, le croyant doit se
délier de la servitude du travail. Le
sabbat est enfin un signe d’alliance entre Dieu et son peuple. Il fait
mémoire de la création du ciel et de la terre en six jours et du repos de
Dieu le septième jour. Observer le sabbat signifie reconnaître l’alliance et
s’ouvrir à la bénédiction divine. Tous
les travaux sont interdits le jour du sabbat. Durant la révolte des Maccabées
contre les Syriens un groupe de juif se laissa massacrer plutôt que de violer
le repos sabbatique avec son interdiction de porter des armes. Un
traité de la Mishna, intitulé Sabbat,
codifie les trente-neuf travaux interdits le jour du sabbat. Seul le danger
de mort ou une urgence spéciale peuvent en dispenser. Le chemin du sabbat est
un parcours de 031 deux mille
coudées, soit d’environ un kilomètre. Bref, le sabbat doit être totalement
consacré à Dieu. C’est
par la cérémonie du qiddush,
comprenant une bénédiction du pain et du vin, que débute la cérémonie
familiale du sabbat. La mère de famille allume deux bougies sur la table en
souvenir des deux verbes –« observer » et « garder »-
employés par la Bible pour évoquer l’observance du septième jour. Un repas de
fête suit. On y sert généralement du poisson, non pour faire pénitence, mais
pour anticiper le repas de fête annoncé par les prophètes qui rassemblera les
élus à la fin des temps. A ce repas, Dieu servira du vin clarifié et du
poisson exquis. Le sabbat ouvre ainsi une porte sur la joie des origines et
sur la joie eschatologique. L’office
synagogal du sabbat comporte la récitation de psaumes et d’hymnes célébrant
Dieu et la sainteté du septième jour. Une lecture d’un texte de la Torah,
suivie d’un passage des Prophètes, constitue l’essentiel de l’office. Une
bénédiction prononcée sur la communauté clôt la cérémonie. En
famille, le repas de fête réunit les enfants autour de la table. « Tes
fils : des plants d’olivier alentour de la table », chantait
l’auteur du psaume 128. En soirée, la cérémonie de la havdalah marque la séparation entre le sabbat et les jours
profanes. La bénédiction de la lumière et du vin, ainsi que des parfums clôt
la célébration. Le parfum du sabbat doit embaumer toute la semaine. La Pâque « C’est
au mois d’Abib que Yahvé ton Dieu t’a fait sortir d’Egypte. Tu mangeras la
Pâque durant la nuit. Tu 032 sacrifieras
l’agneau pascal devant Yahvé au crépuscule, ainsi que du petit bétail et du
gros bétail le lendemain […]. Avec la Pâque tu ne mangeras pas de pain
fermenté ; durant sept jours tu mangeras, pour son Nom, des azymes, un
pain de misère, car c’est en hâte que tu es sorti du pays d’Egypte. […] Tu
feras rôtir l’agneau et le mangeras au lieu que Yahvé aura choisi, puis le
matin, à l’issue de la fête, tu t’en retourneras pour aller à ta ville. Le
premier jour tu offriras la première gerbe et tu mangeras des azymes de
l’ancienne récolte, puis, pendant les six jours qui restent, tu seras
autorisé à manger des azymes de la nouvelle récolte. Le septième jour tu te
réuniras avec des chants de louange ; tu ne feras aucun travail. » Ce
texte de Deutéronome (16, 1-3, 5-8) met en évidence la théologie de la fête
de Pâque. Pâque évoque à la fois la nuit de la création, la nuit de la sortie
d’Egypte et la nuit de la rédemption finale. Cette théologie de la nuit
implique une réflexion sur l’espérance. Dieu n’oublie pas son alliance même
lorsque la nuit est noire. La Pentecôte « Vous
compterez sept semaines à partir du moment où vous commencerez à mettre la faucille
à moissonner dans le champ ; après la moisson de la première gerbe, vous
commencerez à compter sept semaines. « Vous
ferez la fête des semaines en présence de Yahvé, à proportion de l’offrande
spontanée de vos mains, selon que Yahvé vous aura bénis. Vous vous réjouirez
en 033 présence de
Yahvé, vous, vos fils et vos filles, vos serviteurs et vos servantes, les
lévites qui sont dans vos villes, l’immigrant, l’orphelin et la veuve qui se
trouvent parmi vous. » A
l’origine, la fête, comme toute la liturgie juive, a des racines naturelles.
Elle ne sera rattachée à l’histoire juive que
plus tard. Le rite principal de Pentecôte consiste dans l’offrande des
deux pains nouveaux au Temple. Plus tard, la fête évoquera le don de la
Torah. Chez les esséniens, la Pentecôte est plus qu’une fête agricole ;
elle fait mémoire de toutes les alliances que Dieu a conclues avec son peuple,
en particulier l’alliance au Sinaï. La fête des Tentes « Vous
ferez la fête des Tentes durant sept jours quand vous aurez achevé de
ramasser la récolte de vos aires et le vin de vos pressoirs. Vous vous
réjouirez au puisage de l’eau au son de la flûte. » A
l’origine, la fête des récoltes était l’occasion de réjouissances bien
méritées. Une valence religieuse fut rapidement attachée à la fête. Succot (« les tentes ») rappelle
le séjour au désert des juifs durant quarante ans. Pour actualiser ce
mémorial, tout juif doit habiter sous une tente pendant une semaine. Il faut
savoir quitter sa demeure fixe pour une demeure provisoire, car le passage de
l’homme sur terre est provisoire. La
cérémonie impressionnante de la libation d’eau attirait de nombreux pèlerins.
Chaque matin, les prêtres descendaient en procession à Siloé pour y puiser de
l’eau. En retournant au Temple, ils passaient par la porte des eaux qui
rappelle la prophétie de Zacharie : une source devait jaillir du Temple
et assainir les eaux de la mer Morte. 034 L’Evangile
de Jean situe dans ce contexte l’appel de Jésus : « Si quelqu’un a
soif, qu’il vienne à moi et boive. » Le
soir, on illuminait la cour des femmes avec quatre chandeliers. Des
réjouissances populaires donnaient à cette fête un charme particulier. C’est
peut-être dans ce contexte que Jésus a proclamé qu’il était la lumière du
monde. L’attente
messianique, ravivée par la présence des Romains, connaissait au moment des
fêtes une acuité particulière. Dans les milieux apocalyptiques, on attendait
le venue du Fils de l’Homme sur les nuées du ciel annoncée par Daniel (7,
13-14). Bref, ce n’est pas un messie ami des pécheurs et des publicains que
le judaïsme préconisait. Jésus dépassera l’attente d’Israël, tout en
l’accomplissant. C’est
dans le cadre de la liturgie que s’inscrit l’enseignement de Jésus.
L’Evangile de Jean le souligne plus que les autres. Lors des pèlerinages à
Jérusalem, Jésus est présent au Temple et s’ouvre à la mémoire de son peuple.
Sa vocation fut celle de rassembler les fils de Dieu dispersés et avant tout
les juifs divisés. Le choix des Douze le manifeste à l’évidence. La prière qui
conclut son testament, « Que tous soient un », témoigne que cette
pensée l’accompagna jusqu’à la fin de sa vie. Le passage de Jésus dans
l’histoire des hommes fut marqué à la fois par sa particularité juive et par
le dépassement de cette particularité dans l’accomplissement. Retour
au tableau d’assemblage des séquences … |
|
|
|
|