Journal Liens Protestants de novembre 2019

 

 

 

  © LIENS PROTESTANTS
   mensuel – novembre 2019

Veufs et veuves dans la bible

1.    Statut social des veufs

2.    Le statut inférieur des veuves

3.    Des veuves qui prennent en main leur vie et leur peuple

4.    Une image positive

5.    Les veuves restent aujourd'hui des victimes

 

1.    STATUT SOCIAL DES VEUFS

Dans l’ouvrage du père Roland de Vaux, Les Institutions de l’Ancien Testament, qui reste une référence, sur les soixante pages consacrées aux institutions familiales, une demi-page seulement est consacrée aux veuves et aucune aux veufs. Pourtant, les veuves sont au cœur de nombreux textes bibliques….

Pour ce qui est des veufs, cela n’est pas très étonnant, car aucun personnage de la Bible n’est présenté comme veuf. Cela peut s’expliquer de plusieurs façons. Comme aujourd’hui l’espérance de vie des femmes devait être plus élevée que celle des hommes, les veuves étaient donc plus nombreuses. En cas de polygamie celui qui avait plusieurs épouses pouvait en perdre une et être en deuil sans devenir veuf. D’autre part, il semble que les veufs se remariaient assez couramment. Abraham, par exemple, après la mort de Sarah, a pris pour femme (ou concubine ?) Qetoura (Genèse 25.1). Enfin, il n’y a pas grand-chose à dire sur le statut social des veufs et leurs conditions de vie économique, car leur veuvage ne changeait pas grand-chose pour eux.

2.    LE STATUT  INFERIEUR DES VEUVES

Qu’en est-il des veuves dans les textes bibliques ? L’image des veuves décrites dans l’Ancien et le Nouveau Testament est positive. Presque toutes sont en difficulté matérielle, mais ne sont pas passives. Elles font face avec détermination et ouverture aux autres et à Dieu.

Les textes bibliques indiquent que la situation des veuves était difficile. En Exode 22,21 on lit : Vous ne maltraiterez aucune veuve ni aucun orphelin. Suit, une menace de mort qui ferait, des femmes et enfants des contrevenants à leur tour, des veuves et des orphelins. Deutéronome 10,18 indique que Dieu rend justice à l’orphelin et à la veuve et aime l’émigré en lui donnant du pain et un manteau. Plus loin, en 16,11, l’Israélite est invité à célébrer la fête des Tentes dans la joie, avec toute sa famille, mais aussi le lévite, l’émigré, l’orphelin et la veuve du village. Il est interdit de prendre en gage le vêtement d’une veuve, elle a droit à une part de la dîme, au droit de glanage et on doit respecter tous ses droits (Deutéronome 24,17 et 22 ; 26,12-13 ; 27,19). Le cas des veuves est presque toujours cité en même temps que celui des orphelins et des immigrés, avec parfois rappel du fait que le peuple a connu la détresse en Égypte.

Parmi les recommandations et récriminations des prophètes on peut citer les injonctions d’Ésaïe (1,17 et 1,23) qui après avoir parlé du droit des orphelins parle de la défense de la veuve, de même que Jérémie (7,6) qui déclare n’exploitez pas l’immigré, l’orphelin et la veuve. Ézéchiel dénonce l’exploitation de l’orphelin et de la veuve (22,7), et Zacharie (7,10) rappelle : la veuve et l’orphelin, l’émigré et le pauvre, ne les exploite pas.

Dans la liste de ses actions bonnes dressée par Job dans le chapitre 29, il cite, après avoir parlé des pauvres, des orphelins et des mourants qu’il assiste, les veuves à qui il rendait la joie du cœur (verset 13). Enfin pour en rester aux textes généraux, en fin du Psaume 146, c’est le Seigneur lui-même qui soutient l’orphelin et la veuve.  

Il y avait donc une conscience de la condition difficile des veuves, principalement pour des raisons économiques défavorables qui découlent du statut général inférieur des femmes, des femmes seules en particulier. Elles dépendent toujours d’un homme, de leur père puis de leur mari. Quand elles sont veuves, elles n’héritent pas de leur mari sauf en l’absence d’un héritier mâle. Elles restent attachées à leur belle-famille, ne serait-ce que par les règles du lévirat (Deutéronome 25,5-10), ou elles retournent dans la famille paternelle où elles dépendent de leur père (Genèse 38,11 ; Lévitique 22,13). Quand il n’y a plus ni famille ni belle-famille la situation peut être catastrophique.

3.    DES VEUVES QUI PRENNENT  EN MAIN LEUR VIE ET LEUR  PEUPLE

Tamar est la veuve d’Er, aîné de Juda. Le rédacteur de la Genèse (38,6-29) la déclare juste alors qu’elle a obtenu par ruse sa place de génitrice dans la lignée de Juda. Voilà une veuve qui garde une part de contrôle de sa situation. La veuve de Sarepta est très pauvre, mais elle accueille, loge et nourrit le prophète Élie. Elle sait aussi le solliciter fermement quand son fils tombe gravement malade (I Rois 17,8-24). Ce sont trois veuves qui sont présentées au début du livre de Ruth, Noémi et ses belles-filles Orpa et Ruth, qui habitent au pays de Moab. Noémi prend son destin en main, en retournant dans son pays d’origine dans la tribu de Juda. Ruth fait un choix décisif, contre les habitudes, en quittant son pays d’origine et en suivant sa belle-mère. Elles luttent contre leur dénuement et agissent pour trouver place et sécurité matérielle dans la famille de Noémi. Toute l’histoire est racontée avec l’idée que ces deux femmes ont confiance dans le Seigneur. Le cas de Judith, dans le livre deutéro-canonique qui porte son nom, est bien différent. Elle est la seule veuve de la Bible dont on nous dit qu’elle était riche, très riche même (Judith 8,7). Elle est une femme d’action et de foi, qui non seulement mène sa vie, mais prend aussi en charge le destin de son peuple.

4.    UNE  IMAGE  POSITIVE

Parmi les évangélistes, c’est Luc qui présente le plus de veuves dans ses récits. Il est le seul à parler de la prophétesse Anne, âgée de quatre-vingt-quatre ans et veuve depuis longtemps (Luc 2.36-39). Après Syméon, elle accueille Jésus et ses parents au temple de Jérusalem et est la première à parler de Jésus autour d’elle. On ne sait rien de ses conditions de vie sinon qu’elle est marquée par les jeûnes et les prières. On ne sait rien de la situation matérielle de la veuve de Naïn, qui s’apprête à enterrer son fils unique, mais le récit laisse entendre que la solitude dans laquelle elle devra vivre sera lourde, sans doute sur le plan relationnel et sur le plan matériel. Les entrailles de Jésus en sont remuées (Luc 7,11-17). Dans la parabole du juge qui se fait prier longtemps (Luc 18,1-8), la veuve qui peine à obtenir justice est certainement en difficulté matérielle à cause des agissements d’un malhonnête, mais elle lutte. Quant à la veuve qui met deux toutes petites pièces dans le tronc du temple de Jérusalem (Luc 21,1-4), il est évident qu’elle est très pauvre. Son geste simple et humble, révèle une personnalité forte et admirable. L’image de ces quelques veuves est positive. Presque toutes en difficulté sociale et matérielle, elles ne sont pas passives ; elles font face, avec détermination et ouverture aux autres et à Dieu.

5.    LES VEUVES  RESTENT AUJOURDH'HUI  DES VICTIMES

Parmi les évangélistes, c’est Luc qui présente le plus de veuves dans ses récits. Il est le seul à parler de la prophétesse Anne, âgée de quatre-vingt-quatre ans et veuve depuis longtemps (Luc 2.36-39). Après Syméon, elle accueille Jésus et ses parents au temple de Jérusalem et est la première à parler de Jésus autour d’elle. On ne sait rien de ses conditions de vie sinon qu’elle est marquée par les jeûnes et les prières. On ne sait rien de la situation matérielle de la veuve de Naïn, qui s’apprête à enterrer son fils unique, mais le récit laisse entendre que la solitude dans laquelle elle devra vivre sera lourde, sans doute sur le plan relationnel et sur le plan matériel. Les entrailles de Jésus en sont remuées (Luc 7,11-17). Dans la parabole du juge qui se fait prier longtemps (Luc 18,1-8), la veuve qui peine à obtenir justice est certainement en difficulté matérielle à cause des agissements d’un malhonnête, mais elle lutte. Quant à la veuve qui met deux toutes petites pièces dans le tronc du temple de Jérusalem (Luc 21,1-4), il est évident qu’elle est très pauvre. Son geste simple et humble, révèle une personnalité forte et admirable. L’image de ces quelques veuves est positive. Presque toutes en difficulté sociale et matérielle, elles ne sont pas passives ; elles font face, avec détermination et ouverture aux autres et à Dieu.

Que retenir de l’ensemble des données bibliques sur les veuves ? Il me semble quelles sont relativement transposables aujourd’hui. Les veuves souffrent toujours des inégalités entre femmes et hommes ! Peut-être même souffrent-elles plus qu’autrefois de la solitude ? En tout cas, elles étaient et restent pour une grande part d’entre elles, admirables d’énergie et de courage.

Olivier Pigeaud

   P.S.: Le cas des veuves est presque toujours cité en même temps que celui des orphelins

 

 

 

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