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Les chemins de l’Exode :
étude biblique 1 introduction

Dans l’une de ces tablettes, les vassaux cananéens
se plaignent auprès d’Akhenaton d’incursions d’Habiru ou Hapiru

Une des tablettes de la correspondance diplomatique
déterrée à Tell el-Amarna, Egypte, en 1887

 

Leur nom pourrait venir
d’Afar, "poussière"

On a tenté de les rapprocher ces populations nomades des Hébreux.

 

En fait ils n’apparaissent pas comme un groupe ethnique homogène mais comme des va-nu-pieds d’origines variées

 

 

 

 

 

Avant d’étudier l’Exode

L’Exode, ce n’est pas seulement le livre de l’Exode.
L’Exode dans la Bible
c’est le livre de l’Exode, le Livre des Nombres et Le Lévitique

Quand a-t-il eu lieu ?

Les trois livres (Exode, Nombres, Lévitique) forment un ensemble littéraire homogène. Il n’y a pas de césure nette entre Genèse et Exode :

-          plusieurs récits de l’Exode ont des parallèles avec le livre des Nombres

-          les deux récits du don de l’eau (Exode 15, 22 – 27 et Exode 17, 1 – 7) sont à rapprocher de Nombres 20, 11 à 30

-          Le récit du don de la nourriture en Exode 16 (la manne) trouvent un parallèle en Nombres 11, 4 à 35 (les cailles)

-          Le récit de l’institution des juges en Exode 18, 13 à 27 ressemble à celui de Nombres 11, 11 à 30

De plus, il faut noter la continuité littéraire narrative entre les récits de l’Exode et ceux des Nombres.

Le peuple est délivré grâce à l’intervention de Dieu (Exode 1 et Exode 2 à 15). Mais cela débouche sur la marche au désert (Exode 15, 22 à 18, 27, qui se retrouve dans Nombres 11, 1 à 14, 45, puis Nombres 20, 1 à 21, 35).

Sur le plan de l’analyse synchronique il y a continuité entre ces deux livres. Cette continuité se vérifie aussi entre l’Exode et le Lévitique. Les lois relatives à la construction du lieu de culte (Exode 25 à 31 et 35 à 40) précèdent celles sur les sacrifices (Lévitique 1 à 7) et l’institution des prêtres ‘Lévitique 8 à 10). Sui vent tous les rites de pureté de la communauté cultuelle (Lévitique 11 à 16 et 17 à 27). Mais le livre des nombres n’échappe pas à la comparaison (Nombres 1, 1 à 10, 10) car il évoque la mise en service de la demeure cultuelle et le rôle des prêtres, des lévites, des chefs et du peuple.

Quand l’Exode a-t-il eu lieu ?

Si l’on s’en tient à la tradition biblique le récit de l’Exode est limpide et miraculeux.

Tout commence avec un certain Joseph dont la famille s’installe en Egypte. Le séjour se prolonge 400 ans (Exode 15, 13) mais les chiffres sont trompeurs. Au verset 16 du même chapitre il est question de quatre générations. En Exode 12, 40 il est question de 430 ans. S’en tenir à l’histoire biblique pose déjà un problème et si l’on se dit que Joseph était un personnage important notre surprise est grande lorsque nous étudions l’histoire de l’Egypte qui ne fait aucunement mention de Joseph ni de l’Exode. Bien sûr l’historiographie égyptienne a peut-être, elle aussi, gommé tout ce qui ne glorifiait pas Pharaon et le passé de la nation, mais cet argument est, en partie, insuffisant.

400 ans plus tard Dieu se souvient de sa promesse et suscite Moïse qui va faire traverser la Mer des Joncs à un peuple en servitude.

Si l’Exode a eu lieu, sa date est incertaine. C’est alors un fait qui pose problème. Deux chronologies sont maintenant retenues : une chronologie dite courte et une seconde dite longue.

Ce qu’il faut savoir c’est qu’au-delà de l’année 931 av. JC (mort de Salomon) tout ce qui précède est approximatif.

Nous disposons d’une stèle érigée par le Pharaon Merneptah vers 1220 avant JC. Cette stèle nomme Israël comme peuple de la région. Certains, à partir de ce repère, placent l’Exode au 15ème siècle et d’autres au 12ème siècle avant JC.

A.- Les avocats de la chronologie longue (15ème siècle av. JC) s’appuient sur quatre éléments :

1.      Le chantier du Temple de Jérusalem aurait commencé 480 ans après la sortie d’Egypte (1 Rois 6, 1), soit douze générations de 40 ans (c'est-à-dire 933 + 480 = 1413). Mais ce symbolisme de générations de 40 ans n’est pas forcément littéral.

2.   Ils s’appuient encore sur un second élément, les trois siècles mentionnés en Juges 11, 26 que l’on veut situer entre – 1100 et – 1400. Mais ici encore le nombre d’années est incertain. La période concernée pourrait ne représenter qu’un siècle

3.      Le troisième argument vient du Livre des Juges encore. Si l’on reprend le Livre des Juges en mettant bout à bout les cycles de 40 ans, il faut une durée totale de trois siècles (- 1400 à – 1050). De plus le total des années citées en Juges dépasse même les 400 années. Les périodes d’oppression – délivrance des Juges se chevauchent. On ne peut pas donner à ces renseignements une base historique solide.

4.      Le quatrième argument consiste à identifier les Pharaons mentionnés dans l’Exode à certains rois du 15ème siècle av. JC. Mais la même opération est possible pour le 13ème car les données bibliques sont volontairement schématisées.

La Bible ne fournit pas de précisions sur l’époque à laquelle a eu lieu l’Exode. « La sortie des Hébreux » n’a livré aucune indication … Il s’agissait, semble-t-il, d’une minorité confondue en Egypte avec d’autres étrangers.

Dans la chronologie longue l’Exode se serait déroulé sous la 18ème dynastie. Thoutinasis III serait le Pharaon constructeur d’Exode 1 et Aménophis II ou III serait le Pharaon d’Exode 5 à 15. Les évènements qui nous intéressent se situeraient donc dans la seconde moitié du 15ème siècle avant JC. Les raisons que l’on donne à ceci sont les suivantes. L’expulsion des HYKSOS sémites aurait eu pour conséquence la disqualification des asiatiques en Egypte et la persécution d’Exode 1.

On essaie aussi ainsi d’établir une convergence entre l’apogée de la puissance sous la 18ème dynastie et les constructions auxquelles sont asservis les hébreux.

On va même encore plus loin et l’on assimile dans cette chronologie Hatshepsout (première Pharaon femme d’Egypte et qui régna 21 ans) avec la fille du pharaon d’Exode 2 … et l’on imagine que celle-ci décédée Toutmasis III reprend le pouvoir et que cela entraîne la fuite au désert. Les lettres d’El Amarna (14ème siècle) dans lesquelles les gouverneurs des villes vassales d’Egypte en appellent à celle-ci contre les invasions d’asiatiques et notamment d’Habirou ou Apirou pourraient faire penser aux Hébreux du temps de Josué et des juges. Et l’on s’appuie aussi sur des inscriptions alphabétiques du 15ème siècle, inscription pré – hébraïques à Séralut El Khadim dans le massif du Sinaï, et sur les ruines de Jéricho qui avait été daté par certains archéologues de la fin de la seconde moitié du 15ème siècle …

Mais les découvertes archéologiques récentes battent en brèche l’hypothèse d’un Jéricho dont les murs se seraient effondrés au 15ème siècle avant JC. (Il y eu une cité beaucoup plus tard).

Il s’agit donc d’harmonisation beaucoup plus que de preuves.

B.- La plupart des savants, des exégètes et des biblistes adoptent don plutôt la chronologie courte (12ème siècle av. JC)

Les arguments en faveur de cette chronologie se fondent surtout sur des recherches faites sur le terrain :

1.      La ville de Ramsès que les esclaves israélites ont contribué à fortifier avec PITHOM (Exode 1, 1) qui doit tenir son nom de Ramsès II (roi de 1304 à 1224 ou de 1290 à 1224 selon les égyptologues) serait un élément.

2.      Plusieurs villes cananéennes auraient été détruites par le feu au 13ème siècle (cf. Josué 6, 24, 8, 28 et 11, 11) et reconstruites ensuite de manière moins élaborée … mais était-ce des israélites qui firent le saccage.

3.      L’unification politique des Amoréens (Siho et Og selon Nombres 21, 21 à 24), des Moabites et des Ammonites n’ont lieu qu’au 13ème  siècle.

Si l’Exode a eu lieu au 13ème siècle, les Pharaons de l’époque résident dans le Delta ; ce sont ceux de la 19ème dynastie. Les royaumes d’Edom, de Moab, d’Edom qui vont barrer la route aux hébreux venant du Sinaï sont identifiés à cette époque. La destruction des cités cananéennes (Béthel, Lakish) sont situées dans la deuxième moitié du 13ème siècle.

Merneptah ou Mineptah (1232 à 1223) signale avoir arrêté un groupe d’Israïlou dans le sud de la Palestine. Le règne de Merneptah est marqué en Egypte par 30 années d’anarchie qui rendent possible l’entreprise de Josué. L’expulsion des hébreux ont donc eu lieu à la fin du règne de Ramsès II ou sous celui de Merneptah.

On propose alors comme date de l’Exode : - 1225 ou – 1250.

Les historiens reconnaissent aujourd’hui que des clans nomades sémites se sont infiltrés en Egypte au 2ème millénaire avant JC. Leur venue avait été favorisée par les HYKSOS, souverains sémites qui dominèrent l’Egypte de 1730 à 1550 avant JC. Les HYKSOS ont mis fin au Moyen Empire ; ils régnèrent donc pendant deux siècles. Le documents égyptiens trahissent une réelle répugnance à parler d’eux. Même l’origine de leur nom est contesté. « Rois pasteurs ». Selon ce qu’en dit Manethon. Mais on parle aussi de rois du désert, peuplade en partie sémitique. Ils auraient traversé les déserts syro-palestiniens avant d’envahir l’Egypte. Ils remportèrent une victoire sur l’Egypte due à leur suprématie et armement (utilisation d’armes nouvelles : cimeterres de bronze ainsi que chars et chevaux inconnus jusque là).

Ils ont introduit avec eux des notions sémitiques. Ils séjournèrent essentiellement dans la région de Tanis (Est du delta du Nil). Leurs dieux tutélaires étaient Seth et la déesse Anati qui rappelle le couple divin Baal – Anat (divinités cananéennes). Ils occupèrent donc l’Egypte et suscitèrent la haine. Ils furent chassés vers - 1580.

Ces clans chassés, il dut en rester quelques uns mineurs en Egypte.

Le nouvel empire qui succédera à cette période fixera sa capitale à Thèbes.

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Ainsi il faut bien reconnaître que les historiens anciens n’écrivaient pas l’histoire comme nous. Le rapport au temps n’était pas le même. L’homme de cette époque distingue le temps où il vit et les temps aux origines lointaines où s’enracinent les mythes fondateurs … le passé fondateur. Nous sommes dans des catégories littéraires qui font penser à l’Iliade, à l’Odyssée, à l’Enéide.

Il faut ainsi accepter que le récit de l’Exode dont nous disposons s’est fixé par écrit à la fin du 6ème siècle avant JC, alors qu’il est censé évoquer une histoire du 12ème siècle avant JC.

Les traditions orales ont précédé le récit écrit. Dans ces traditions se sont mêlés des éléments légendaires, des faits racontés embellis, modifiés, enjolivés. La fiction et la demi-fiction se mêlent aux faits. Et il y a des vides, des absences, des manques, des souvenirs à jamais disparus. L’ancien testament est le produit de l’histoire du peuple d’Israël mais il en témoigne et le reflète de façon multiple. L’écriture de l’histoire est dépendante de l’évolution de l’histoire d’Israël. Il n’est pas exclu de penser que des vides ont été comblés et d’autres laissés. Les livres de la Torah comme les récits de la conquête sont avant tout des textes religieux.

Lorsque nous abordons l’Exode nous sommes obligés de constater que l’Egypte ne nous laisse aucune source relative à cette histoire. Israël a construit son histoire, l’a formée et n’a pas seulement voulu informer.

Toutefois le récit biblique ne manque pas de vraisemblance et de cohérence même si l’on sait assez mal qui étaient les HAPIRU ou les SHOSHOU mentionnés par les égyptiens.

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