Un mariage à Cana

 

 

Un mariage à Cana
Jean 2,1-12

1.    La traduction

2.    La lecture

1.   La traduction

Le troisième jour, on célébra un mariage à Cana de Galilée, et la mère de Jésus était là. Jésus aussi était invité aux noces avec ses compagnons.
Or le vin s’épuisa et la mère de Jésus lui dit : Le vin leur manque.
Jésus lui dit : Que me demandes-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore venue.
Sa mère dit aux serviteurs : Ce qu’il vous dira, faites-le ?
Se trouvaient là six jarres de pierre, destinées aux purifications des juifs. Chacune contenait deux à trois mesures.
Jésus dit aux serviteurs : Remplissez d’eau les jarres.
Ils les remplirent à ras bords.
Il dit ensuite : Puisez maintenant, et portez-en à l’intendant.
Ils en portèrent.
L’intendant goûta l’eau devenue vin et il s’interrogeait sur sa provenance, mais les serviteurs qui avaient puisé l’eau, eux, n’avaient aucune hésitation. L’intendant aborda le marié et lui dit : D’habitude, on sert d’abord le bon vin, et quand les invités sont gris, le moins bon. Toi, tu as réservé le grand cru pour la fin ! Tel fut le premier signe de Jésus. Il l’accomplit à Cana de Galilée. Il manifesta sa grandeur et ses disciples crurent en lui.
Puis il redescendit à Capharnaüm avec sa mère, ses frères et ses disciples et ils demeurèrent là quelques jours.

* * * * *

2.   La lecture

Une noce de village, mal commencée. Pourquoi la pénurie ? Trop d’invités, et intempérants ? Le marié est-il pauvre, avare, étourdi ? On l’ignore ; on sait seulement que chez les hommes on donne peu. Même un jour de fête, on lésine sur la qualité, parce que cela passe inaperçu, comme le texte le suggère malicieusement ; ici c’est la quantité qui est mesurée et on le découvre aussitôt.

Climat mesquin, tendu, qui annonce une fin de soirée misérable. On voici que tout s’élargit et s’aère, parce qu’une des invitées, nommée Marie, prend des initiatives de maîtresse de maison. Elle s’inquiète du vin que boivent les autres : ce n’est pourtant pas elle l’assoiffée, qui a déjà bu à la vivante source !

Femme par ce souci de la table, mère par sa foi éblouie en un fils incomparable. Leurs conversations à voix basse, au temps de Nazareth, de leurs silences ou ces regards dont une mère enveloppe son enfant à son insu, lui ont enseigné qui il est, où il ira et déjà s’achemine. Il n’a pourtant rien fait encore. Le texte précise que les disciples ont attendu pour croire qu’il ait accompli son premier signe. La mère croit avant le signe.

Avec quelle témérité Marie se retourne vers les serviteurs ! « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » On croit entendre la propre voix de Dieu devant le fils transfiguré : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le. » Marie ne parle pas du haut des cimes, elle demeure parmi champs et colline, mais elle aussi peut dire : celui-ci est mon fils bien-aimé, et par conséquent, en hélant ces humbles échansons, inviter tous les hommes au Royaume : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » Notons que le signe implique le concours des serviteurs : le Christ a besoin de leurs mains, de leurs jarres, de leur cœur livré. Ses miracles sont toujours le fruit d’un miracle antérieur, fin et simple, qui le oui des hommes.

C’est donc son premier signe et il s’expose dans le contraste d’un éclat et d’un secret. Les invités croient ce vin tiré de la cave, l’intendant s’interroge, seuls, serviteurs et disciples savent, sans rien ébruiter. Mais quel flot d’aménité jeté sur la misère terrestre ! Le vin nouveau coule à ras bords. Dieu est venu mêler sa noce à celle des hommes et il les gratifie de ses coutumes somptueuses, l’abondance, l’allégresse, le grand vin pour finir, mais finir quoi ? Tout en effet commence.

France Quéré, Une lecture de l’évangile de Jean, 1987, Desclée de Brouwer éditeur, 78 bis, rue des Saints-Pères, 75007 Paris, pages 19-21.

Lire dans la préface, les circonstances de la traduction et de la lecture de cet Evangile par France Quéré. Cliquer ici

 

 

 

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