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Aujourd’hui
encore : vigilance sans affolement |
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www.eglise-protestante-unie.fr Matthieu 10, 26-33 : En ce temps-là
Jésus disait à ses Apôtres : 26« Ne craignez pas les
hommes ; * * * * * Dans ce texte de l’évangile de Matthieu plusieurs expressions se
répètent avec une certaine insistance. Parmi celles-ci, il y a la phrase, ‘Ne
craignez point,’ ou ‘N’ayez pas peur.’ Si on se limite aux évangiles, ces
paroles réconfortantes apparaissent surtout en Matthieu et en Luc. Dans
l’évangile de Matthieu, le Seigneur Jésus les a prononcées à trois reprises à
l’intérieur d’un même passage. Ce texte Matthieu 10,24-33 évoque immédiatement une situation particulière dans laquelle se trouvait
la communauté des disciples. Tout évoque l’hostilité, la persécution.
Visiblement les disciples de cette communauté sont exposés à l’opposition,
leur message est mal reçu. La foi chrétienne naissante
n’est pas acceptée, mal comprise et mal reçue. Les autorités du Temple voient
alors dans ces disciples de Jésus de Nazareth un danger. Selon elles ils
diffusent un message qui n’est pas conforme à la conception qu’ils ont de
l’alliance de Dieu. Ainsi la communauté de Matthieu se souvient des paroles
de Jésus qui leur avait annoncé qu’ils seraient eux-mêmes rejetés, chassés. En raison du lien qui les unit au Christ, ils devaient s’attendre à
être traités de la même manière. Si on me persécute, vous serez persécutés
aussi. Si je fais l’objet de médisances, préparez-vous à recevoir le même
traitement. Matthieu rapportera plus loin qu’en guérissant un démoniaque
aveugle et muet, Jésus fut aussitôt accusé par ses ennemis d’avoir utilisé la
puissance de Belzébul, le prince des démons (Matthieu 12,24). Ses disciples
risquent d’encourir les mêmes accusations s’ils agissent pareillement. Le
disciple ne doit pas s’attendre à être mieux traité que le maître. Mais Jésus s’il les met en garde, ne sombre pas dans le pessimisme,
il affirme qu’ils n’ont rien à craindre, car un jour toute la vérité sera
connue. C’est l’argument que Jésus utilise pour nous rassurer. ‘’Ne craignez
pas vos persécuteurs, car Dieu dévoilera leurs méfaits au jour du jugement,
et possiblement même avant.’’ Aucun secret ne peut rester indéfiniment caché.
Tous les mensonges, toutes les paroles haineuses, tous les mauvais
traitements infligés aux croyants devront se soumettre au jugement du Christ.
Nous pouvons être certains que la vérité sera alors connue. Si nous croyons
sincèrement que Dieu mettra en pleine lumière toutes les activités des hommes
et si la justice divine nous inspire confiance, alors nous n’avons pas à
craindre les attaques de nos persécuteurs ou de nos détracteurs. Au-delà de
ce que dit Jésus il faut aussi entendre que tout ce qui s’édifie dans notre monde
sur le mensonge, la haine, l’orgueil et la mégalomanie humaine s’effondrera.
De manière ultime tout ce qui est bâti sur le sable s’écroulera… Au travers de l’histoire de
l’Église bien des croyants ont vu leur réputation ternie par la médisance de
certains hommes hostiles à la foi chrétienne, ou par ceux et celles qui au
sein même de la communauté des croyants refusaient de modifier les choses
pour que l’Église soit plus enracinée dans la vérité de l’Évangile. Ainsi, la médisance, la critique, les accusations ont pu être
formulées par d’autres croyants. Mais Jésus laisse entendre que ceux qui
souffrent ou veulent que la parole du Christ soit reconnue pour vraie, n’ont
pas à craindre leurs persécuteurs, car Dieu manifestera sa justice et leur
rendra justice. Jésus dit que le jour viendra où les secrets et les
intentions cachées des hommes seront exposés à la vue de tous. Il ne s’agit
pas ici de nos petits penchants, de nos faiblesses, mais de tout ce que les
hommes inventent pour asseoir leur pouvoir et leurs illusions sur d’autres
humains. À lire de près ce récit, ce sont bel et bien les intentions des
hommes que Dieu regarde et qu’il voit. Ceux qu’il combat ce sont ceux qui
visent à nuire à autrui tant sur le plan religieux que politique mais aussi
dans nos familles ou de petites associations diverses. S’il est vrai qu’on vous a attaqués par des propos calomniateurs,
vous pouvez être assurés que Dieu rétablira un jour votre réputation. Chacun
recevra alors de Dieu la louange qui lui revient (1Corinthiens 4,5). * * * * * Aimés au-delà de la mort ! Le deuxième type de crainte que ressentaient les disciples est présenté
au v. 28. Il s’agit de la peur de mourir. Jésus dit, ‘Ne craignez pas les
hommes. Ils ne peuvent que tuer le corps. Craignez plutôt Dieu, car il peut
faire périr autant le corps que l’âme. Bien sûr, nous n’aimerions pas que
l’on nous mette à mort Mais Jésus insiste et nous dit souvenez-vous que la
puissance de l’homme est limitée. Le pire qu’il puisse faire, c’est détruire
le corps. Il ne peut pas attaquer l’âme d’une personne. Les hommes peuvent seulement nous séparer de ce monde et non pas de la
vie. Gardons à l’esprit que tous les croyants possèdent la vie éternelle.
Nous sommes déjà passés de la mort à la vie, à une vie qui ne s’éteindra plus
(Jean 5,24). Dieu a donné la vie éternelle aux croyants en transférant leur
vie de ce monde matériel vers un monde de nature spirituelle, les textes
bibliques disent, dans les lieux célestes en Christ. Nous sommes souvent inquiets pour notre vie, notre corps. Animé par sa foi,
plutôt que de craindre les hommes qui menacent son existence physique, le
chrétien devrait éprouver une crainte respectueuse de celui dont la puissance
est illimitée : Dieu. Dieu est à craindre bien plus que les hommes, car
il peut anéantir complètement un être humain en faisant disparaître à la fois
son corps et son âme. * * * * * Être des témoins de la vérité de l’œuvre
de Dieu Toutefois cela ne doit pas nous dispenser de
nous engager pour défendre les droits de l’homme et la dignité humaine. Il nous
appartient au nom du même Évangile de combattre pour la justice, de dénoncer,
de combattre, d’interdire, de proscrire tous les mauvais traitements qui
peuvent être infligés aux humains pour des motifs quelconques qui ne
respectent pas l’individu dans sa spécificité et qui sont le fruit de
fantasmes délirants et pervers. Ici il ne s’agit pas de se soumettre et de se
laisser dénaturer, mépriser et écraser, mais de s’engager dans le droit de
résister à ce qui est injuste. On retrouve ici une pensée forte de la Réforme
qui est le principe du droit de résister. Il ne s’agit pas de manifester pour
n’importe quoi ou de transformer un délinquant en héros, mais de combattre pour
ce qui est juste et qui donne à tous, la liberté de vivre dans la
dignité ! C’est l’itinéraire spirituel de Martin
Luther ; c’est ce qui le
mît en route. Un jour, un passage des Écritures s’illumina pour lui : c’était ce
verset de l’épître aux Romains : Le juste vivra par la foi. Ce
jour-là, il eut la révélation du cœur du message de l’Evangile. Ce qu’il
découvrit, ce ne fut pas un jugement plus clément de la part de Dieu, mais
l’absence totale de jugement. Et cette révélation changea radicalement sa
vie. Alors cette révélation, il voulut la faire connaître. Ce moine, vous
l’avez tous reconnu, c’était Martin Luther. Pour le moine Martin Luther, ce
sera le début d’une aventure qu’il n’aurait jamais pu imaginer. Très vite, il
perdra la maîtrise de sa vie. Mais sur ces chemins surprenants, il restera
toujours fidèle au message évangélique. C’est ainsi que, quelques années plus
tard, devant la diète de Worms, il aura cette parole célèbre qui expliquera
sa détermination sans failles : Je suis lié par les textes de
l'Écriture que j'ai cités, et ma conscience est captive de la Parole de
Dieu ; je ne peux ni ne veux me rétracter en rien, car il n'est ni sûr,
ni honnête d'agir contre sa propre conscience. Me voici donc en ce jour. Je
ne puis faire autrement. Que Dieu me soit en aide ! Aujourd’hui,
le contexte ecclésial est différent, mais ce texte nous invite à avoir cette
même détermination sans failles pour transmettre le cœur du message de
l’Evangile. Car ce message libérateur que nous avons reçu, comment
pourrions-nous le garder pour nous ? Nous sommes appelés à parler, à ne
pas nous taire et à devenir ainsi une Église de témoins. Et pourtant, il faut
bien le reconnaître, nous nous montrons parfois très discrets et très
timorés. Il y a bien sûr des raisons à cela. D’abord, nous ne pourrons parler
que si nous avons reçu, nous aussi la révélation du message libérateur de l’Évangile.
Sinon, il nous manquera toujours l’enthousiasme nécessaire pour rendre nos
paroles crédibles. * * * * * Craindre
Dieu Enfin dans notre texte, le plus surprenant se trouve sans aucun doute
dans les dernières paroles de Jésus. Il dit aux versets 32-33 : C’est
pourquoi, quiconque me confessera devant les hommes, je le confesserai aussi
devant mon Père qui est dans les cieux ; mais quiconque me reniera
devant les hommes, je le renierai aussi devant mon Père qui est dans les
cieux. Confesser Christ signifie que nous voulons vivre selon ce qu’il nous
a enseigné. Il ne s’agit pas de recevoir dans notre vie tous les sacrements,
mais de vivre sa parole au quotidien et de reconnaître qu’il est celui qui
vient établir la justice et la paix et, en conséquence, de tenter de vivre
devant les hommes comme son serviteur. Une simple reconnaissance verbale de
Christ ne suffit pas. Nos paroles doivent s’accompagner d’une vie d’engagement.
La marque du christianisme qui peut changer le monde, c’est l’engagement et
non les rites. Alors que peut attendre Dieu de chacun de nous d’abord que nous nous
engagions nous-mêmes dans ce combat d’un Dieu qui veut réconcilier l’humanité
et organiser le monde, le cosmos. Il nous invite à semer sa parole afin
qu’elle éclaire nos décisions. Dieu ne peut se satisfaire de la corruption
qui est présentée dans la Bible comme le mauvais levain qui fait lever toute
la pâte. Il nous invite à nous joindre à toute cause juste. Oui, selon Jésus
nous avons le devoir de nous compromettre en prenant parti pour la justice,
la paix et la vérité, pour la lutte contre la violence stérile et destructrice
de la vie d’autrui. Térence disait en latin pour les puristes :’’nihil
humani a me alienum puto’’, ce qui peut se traduire par, je pense que
rien de ce qui est humain ne m’est étranger. Paul dira que tout ce qui
est juste aimable et qui mérite l’approbation soit l’objet de vos pensées
(Philippiens 4,8). Alors, nous avons le droit et le devoir de nous compromettre dans la
cité des hommes pour ce qui touche à la paix, à la vérité, à la justice, à la
liberté, à la lutte contre la faim, contre l’esclavage, contre la violence
indigne, l’exploitation, la torture ou la guerre. Nos engagements peuvent
parfois être inconfortables, car ils peuvent susciter des mécontentements
chez les ‘’dits révolutionnaires’’ qui nous trouveront peut-être trop
conformistes ; les anarchistes ou les totalitaristes aussi. Loin de
tomber dans ces excès qui privent l’homme de liberté au nom de la pensée
unique ou livrent l’humain à tout désordre possible, la pensée biblique
encourage à un combat toujours à renouveler au sein de la démocratie.
L’Évangile interroge toujours les humains, mais ne les renvoie pas sans
solution. Bref, nous devons être des veilleurs ! Frédéric Verspeeten * * * * * |
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