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Être
disciple du Christ, qu’est-ce ? |
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www.eglise-protestante-unie.fr Matthieu 10, 37-42. Jésus disait à ses Apôtres : 37« Celui qui
aime son père ou sa mère plus que moi * * * * * Ce chapitre de Matthieu décrit
ce que c’est qu’être disciple de Jésus. Il y a comme une ligne directrice
qu’il ne faut pas oublier, une sorte de maillon qui relie le disciple à Jésus
et à Dieu. Un proverbe rabbinique dit : « L’envoyé est comme celui
qui l’envoie ». Ce qui est dit du disciple doit se comprendre en pensant
à Jésus et au Père. Jésus livre ici quelques règles
bien surprenantes. Il était de ceux qui proclamaient avec vigueur, tu aimeras
ton prochain comme toi-même ; il n’avait jamais remis en cause les dix
commandements et il n’ignorait pas celui qui dit « Honore père et mère » !
Mais voilà qu’il ajoute celui Qui préfère son père ou sa mère plus que
moi n’est pas digne de moi ! Le texte grec dit : qui
“affectionne” plus que moi. Il s’agit ici de l’amour naturel, de
l’amitié, que l’on porte spontanément à ceux pour qui on a de la
sympathie à cause des affinités de sang, de sentiments ou de pensée. Mais
même si ces mots sont troublants Jésus ne veut certainement pas nous dire que
ces liens sont mauvais. Il ira jusqu’à dire et il le
rappelle souvent : Vous n’appellerez personne du nom de père sur
la terre, car vous n’en avez qu’un seul, le Père des cieux (Mt 23,9).
Sans remettre en cause ces liens qui nous unissent à d’autres humains Jésus
nous invite à réaliser que derrière l’amour que nous portons à nos proches se
cache l’amour de Dieu et que si nous sommes animés de cet amour de Dieu alors
notre manière de vivre va aussi devenir plus libre et plus vraie. Jésus, qui nous révèle l’image
parfaite de son Père, parce qu’il agit comme le Père, est pour nous comme le
rappel visible de l’amour de ce Père que nous ne voyons pas. Dans notre relation avec lui,
il est celui qui nous renvoie constamment au Père. Alors, il nous dit en
quelque sorte : ‘’ne me préfère pas père et mère’’ mais
découvre en moi l’amour infini dont le Père t’aime. ‘’Ne me préfère pas
fils ou fille’’, mais découvre en moi l’amour
inconditionnel dont Dieu aime chaque humain pour en faire son frère. * * * * * Mais Jésus ajoute encore : Celui qui ne
prend pas sa Croix… Suivre Jésus, c’est être son
disciple. Suivre Jésus suppose d’accepter la Croix. Il ne s’agit pas
seulement ici de ce que nous appelons parfois nos petites croix
quotidiennes : les petits ennuis de santé, les contradictions au
travail, les préoccupations avec les enfants. Il s’agit de cette manière
d’aimer qui est propre à Dieu. Aimer même son ennemi, aimer jusqu’au
pardon, ce qui il faut bien le dire, n’est pas simple et ne coule pas de
source. Un amour qui nous conduit à aimer jusqu’au don de notre vie. Dans les conflits, et tout
spécialement ceux qui se vivent avec les plus proches, il s’agit d’aimer
jusqu’au pardon en exposant sa vie, en portant sa croix. Cela peut se
vivre, malheureusement, à l’intérieur de la famille ou entre
frères et sœurs, un frère qui salit notre réputation, cela peut arriver
et n’est à vrai dire malheureusement pas rare. Cela peut arriver aussi entre
amis : lorsque l’on fait passer l’idéologie avant les
liens d’amitié, ce qui dans certains pays et régimes politiques est allé
jusqu’à faire arrêter le meilleur ami au nom d’un aveuglement idéologique
diabolique. Prendre sa Croix, c’est refuser
de laisser monter la haine en nous. L’amour qui vient de Dieu nous conduit à
choisir de livrer notre vie face à la haine destructrice de
l’autre dans l’espérance que l’amour puisse guérir de la haine celui qui
nous hait. Cela peut arriver au travail… lorsque la collaboration
s’avère difficile avec quelqu’un qui ne pense qu’à lui, qui est prêt à tout
pour son avancement. Et Jésus va aussi en venir à
parler de l’accueil des plus petits des plus faibles et de perdre notre vie,
ce qui revient à dire, renoncer à croire que nous sommes le centre du monde.
Pour lui la vie n’a de sens que si elle est un don. Les paroles de Jésus
paraissent exigeantes et parfois elles semblent prendre le contre-pied de
certains préceptes de la loi. Il ne faut pas pour autant en conclure que Jésus
se trompe ou que Dieu serait un Dieu pervers. Jésus propose simplement un
nouveau paradigme de lecture de la loi. Et pour lui mettre Dieu avant toute
autre relation humaine c’est se donner toutes les chances pour que cette
relation soit une relation de qualité. Cet amour-là est plus fiable et plus
solide. * * * * * L’amour agapê est
plus fiable et plus solide que l’amour philia Le
verbe, philein, en grec du nouveau testament désigne un amour
fondé sur le sentiment, un amour dépendant de la personne qui
l’inspire : les membres de la famille ou les amis. C’est un amour
naturel : on aime sa famille parce qu’elle nous construit, on aime ses
amis parce qu’on trouve chez eux des intérêts partagés. C’est l’amour philia.
Jésus ne le considère pas comme dérisoire ou inutile. Mais Jésus introduit un
autre terme, il emploie le verbe agapân, qui exprime un amour d’une
tout autre nature, un amour qui dépend non pas de la personne aimée, mais de
la personne qui aime. C’est l’amour agapê. Oui,
l’amour agapê nous
est présenté par lui comme plus fiable et plus solide,
parce que mettre Dieu à la première place dans toutes nos
relations humaines, c’est éviter qu’une de ces
relations tourne à l’idolâtrie. C’est bien
l’avis de l’écrivain Christian Bobin, quand il
dit : ‘’Si Dieu n’est pas dans nos
histoires d’amour, alors nos histoires ternissent,
s’effritent et s’effondrent’’. * * * * * Nous
ne risquons plus notre vie, au moins dans le monde occidental, en
affirmant notre foi Nous ne sommes, certes, plus
dans le même contexte que celui des premiers chrétiens au temps de Jésus, nous
sommes maintenant dans une autre époque. Nous ne risquons plus notre vie, au
moins dans le monde occidental, en affirmant notre foi. Il ne faudrait toutefois pas
oublier que ce n’est pas le cas pour tous les chrétiens du monde. Le
christianisme est en Occident connu, accepté, parfois rejeté, contesté
critiqué et aussi suivi dans la vie courante sans interdiction légale, comme
d’autres religions. On n’emprisonne plus, on
n’exécute plus pour des faits de religion. Mais cet état de fait n’est pas un
acquis très ancien dans nos civilisations européennes puisque même si le
christianisme était accepté par le biais d’une confession des chrétiens les
adeptes d’autres confessions étaient arrêtés, jugés, condamnés, mis à mort. Suivre Jésus n’offre peut-être
plus aucun risque. Mais cela a toujours un sens : Nous sommes toujours
envoyés, comme l’ont été les disciples, pour annoncer l’Évangile et son
importance à ceux qui ne s’en soucient pas et à ceux qui ne le connaissent
pas encore. Nous n’avons plus à chasser les démons ou à ressusciter les morts
et guérir les malades. Nous concédons souvent que cela relève de la médecine.
Mais qu’est-ce que la guérison ? Sommes-nous si sûrs que l’Évangile n’a
pas en son essence une puissance dynamique de guérison de
rétablissement ? Beaucoup d’aumôniers qui ont accompagnés des malades et
prié avec eux pourraient aussi en témoigner ! Mais suivre le Christ est
toujours d’abord « aimer son prochain comme soi-même » et cela reste
toujours d’actualité et peut se manifester de nombreuses manières et en
particulier par le temps que l’on est prêt à lui donner. Quelle que soit
l’époque, la civilisation ou le niveau de vie, donner son temps est toujours
possible et c’est une manière de « donner sa vie ». Car la bonne
nouvelle de l’évangile est une puissance de Salut pour celui qui croit ! (L’apôtre Paul écrit précisément
en Romains 1,16-17 : "Car je n’ai point honte de l’Évangile c’est
une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement,
puis du Grec parce qu’en lui est révélée la justice de Dieu par la foi et
pour la foi, selon qu’il est écrit : Le juste vivra par la foi"). Nous sommes, certes, loin des
disciples quittant tout et partant sur les routes sans le moindre bagage,
vivant au hasard des rencontres, avec pour perspective d’être finalement
arrêtés et probablement condamnés pour leur croyance. Mais maintenant comme
alors, en France comme dans l’Israël d’autrefois, Jésus est toujours là pour
nous demander de le suivre, le suivre pour une vie. Il est venu et il a été dans le
monde un homme qui a mis Dieu au-dessus de tout et d’abord de lui-même. Il a
introduit là un bouleversement, une conversion des valeurs humaines les plus
traditionnelles. Il a donné un autre sens à tout ce que l’homme
cherche ; aux mots les plus lourds de notre langage : la paix, la
vie, la mort. Cela a été vécu sur la terre et
c’était le chemin de la véritable obéissance à Dieu. Cela a laissé des traces
bien visibles et sur ce chemin le Christ est toujours là pour tendre la main
et aider à marcher à sa suite. Nous ferons monter vers lui
notre appel : une prière pleine d’humilité, mais éclairée par la foi qui
est ici d’abord confiance : nous ne savons pas marcher comme il faut.
Mais nous voyons la lumière. Elle brille jusque dans notre nuit. Nous voulons
avancer, même à tâtons, et nous osons demander à Jésus de l’aide pour avancer
à sa suite. Pour que nous soyons, à la fin, à la toute fin, dignes de lui. Dans
l’Apocalypse il est promis à celui qui se réclame de lui que le Christ à son
tour le proclamera sien devant Dieu. * * * * * Face à la parole de Dieu et de ce qu’elle nous dit souvenons-nous : Dieu aime inconditionnellement,
sans égard au titre, ou qualité toute personne. Souvent lorsque nous nous
accueillons quelqu’un nous le faisons en vertu de ce qu’il représente (un
notable, un juste, un prophète), mais on ne reçoit Dieu que lorsqu’on reçoit
quelqu’un qui n’a aucun titre qui puisse mériter notre considération et notre
amour. On ne reçoit Dieu que lorsque
notre accueil est gratuit, inconditionnel. On ne manifeste l’amour de Dieu
que lorsque l’on invite, à notre table, celui qui a faim et qui ne
pourra nous rendre notre invitation. On ne rend visite à Dieu que
lorsqu’on va voir le malade ou le prisonnier qui ne sauront nous rendre la
politesse de notre visite. On ne dévoile Dieu que
lorsqu’on donne un vêtement à celui qui est nu et ne peut nous nous
récompenser de notre geste… Frédéric Verspeeten * * * * * |
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Être disciple du Christ, qu’est-ce ? |
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