Parole, semence et reproduction

 

 

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Matthieu 13, 1-9 et 18-23 : Parole et semence

25En ce temps-là, Jésus prit la parole et dit : « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits. 26Oui, Père, c’est ainsi que tu en as disposé dans ta bienveillance. 27Tout m’a été remis par mon Père. Nul ne connaît le Fils si ce n’est le Père, et nul ne connaît le Père si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler. Prenez mon joug28« Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous donnerai le repos. 29Prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes. 30Oui, mon joug est facile à porter et mon fardeau léger. »

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Réfléchir sur la Parole de Dieu

Ce texte de l’Evangile de Matthieu nous invite à réfléchir sur la Parole de Dieu. Dans le premier testament le prophète Ésaïe compare la Parole de Dieu à la pluie et à la neige qui font germer la terre (Esaïe 55,10-11). Les deux textes se concluent par l'affirmation que la Parole accomplit une mission. C'est bien dans la perspective de cette mission que se place aussi l'évangile de Matthieu. Jésus y parle en parabole : la parabole du semeur. Et dans le texte de Matthieu il s’agit moins de la qualité du grain (comme dans Ésaïe) que de celle du terrain.

Le semeur est sorti pour semer. La Parole accomplit une mission. Elle ne se sème pas en serre chaude mais dehors, à tout vent. La Parole n'est pas réservée. Pas rationnée ou une denrée rare ! Le semeur n'est semeur que parce qu'il jette sa graine, parce qu'il s'en dépossède, et cesse de la garder. Car s’il le faisait elle se détériorerait et périrait ! Le semeur ne commence pas par apprécier les bons et les mauvais terrains, la terre et les cailloux. Son geste est celui du risque. Il ne calcule pas, il sème…

Justement, si Jésus parle en parabole, c'est pour rendre à la Parole son langage. Il n'y a pas de Parole de Dieu en dehors d'un langage d'homme. Dieu ne veut parler qu'en utilisant les mots des hommes et ce qu’ils peuvent entendre, comprendre, saisir, accepter et qui peut changer leur vie. Recevoir la parole nous apprend à connaître Dieu. Mais nous ne pouvons saisir de lui que ce qu’il nous révèle. Cela d’entrée nous conduit à une certaine humilité et à reconnaître que nous ne savons pas tout en ce qui concerne Dieu et son plan et sa manière d’agir. Cela devrait conduire les religieux et les édificateurs de dogmes à beaucoup plus de réserve et d’humilité. Car en réalité Dieu fait ce qu’il veut et pas ce que nous voulons qu’il fasse à partir de nos définitions !

Ceci dit, il faut comprendre aussi que c'est Dieu qui prend le risque de ne pas être compris : mais c'est la condition même de la liberté et donc de la Parole.

Ainsi, nous pouvons mieux comprendre ce que dit Paul dans l’épître aux romains lorsqu’il compare la création - fruit de la Parole - à un véritable accouchement. La Parole créatrice connaît les douleurs de l'enfantement. Notre histoire en est le témoin. L’expérience de nos vies quotidiennes le chantier…

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Les terrains de la parole

La parabole que Jésus propose et son explication, nous présente trois circonstances, en fait trois terrains, où la Parole de Dieu, représentée par la graine qui est semée, restera malheureusement improductive :

Le premier terrain correspond à l'homme qui entend la Parole et ne la fait pas sienne ; il est comme le chemin sur lequel tombe le grain. Il reçoit un enseignement, il étudie la Parole comme une philosophie ou un enseignement de sagesse, mais sans se laisser pénétrer par elle. Sans le travail de l'Esprit-Saint l'enseignement de la Parole ne permet pas à l'Évangile de prendre racine et de porter du fruit.

Le second terrain correspond à un homme qui entend la Parole, la reçoit et s'en réjouit, mais ne l'approfondit pas par l'étude. Il est comme un terrain pierreux, par l'Esprit il se réjouit de l'Évangile, mais celui-ci ne s'enracine pas et les distractions de la vie détournent cet homme de la Parole.

Le troisième terrain improductif nous présente l'homme qui par l'Esprit entend la Parole et qui la comprend intellectuellement par l'étude, mais n'en tire pas les conséquences pratiques. Il ne met pas en application cette Parole dans sa vie quotidienne. Il se laisse emporter par les distractions du monde, il se laisse aller à la dérive et il finit par se perdre.

Ainsi, pour que la Parole puisse nous nourrir et faire de nous des enfants de Dieu qui portent du fruit, il nous faut tenir compte de ces trois aspects.

Il nous faut la recevoir dans notre cœur. Il faut que cette Parole nous enflamme, il faut que cette Parole nous pousse à la conversion.

Mais pour qu'elle porte du fruit, il faut aussi qu'avec notre intelligence, nous soyons capables de la comprendre. Et surtout il faut aussi que cette parole trouve un enracinement dans notre monde, dans notre vie de tous les jours afin qu'elle nous donne la force de lutter contre tout ce qui peut nous détourner de l'Évangile : les séductions du monde et les soucis de la vie.

C'est seulement si nous pouvons trouver un équilibre entre ces différents aspects que nous porterons le fruit semé par cette Parole.

Si l’on poursuit l’interprétation de la parabole nous pourrions aussi imaginer qu’à certains moments de notre vie nous sommes semblables soit au premier, au second ou au troisième terrain. Il y a des domaines de notre vie où nous sommes prêts à accepter la Parole, mais il y a d’autres aspects où nous n’y sommes pas prêts pas réceptifs. Dans certains domaines de nos vies nous ne sommes pas toujours disposés à ce que la Parole nous guide et nous transforme. Nous résistons, nous combattons avec Dieu comme Jacob au torrent de Jabok.

Ce thème de la semence qu’il faut lancer, trouver, chercher, jeter, planter, revient avec insistance dans l’évangile selon Matthieu avec d’autres paraboles qui visent toutes à mettre en avant la force de transformation de la Parole de Dieu et de Dieu lui-même !

Alors que certains annoncent la venue future d’un Royaume de Dieu, Jésus laisse entendre que la semence qui peut croître en nos vies en est déjà la manifestation.

Tout d’abord, le semeur, c’est Dieu lui-même, qui sème sa Parole avec prodigalité, en tout lieu, en tout terrain. Cette parabole s’appelle aussi dans certaines traductions, la parabole des 4 terrains. Ces 4 terrains, c’est l’Humanité tout entière, dans sa diversité.

Le quatrième terrain, alors parlons en un peu…

Déjà par la voix du prophète Ésaïe Dieu disait cela : "Ma Parole qui sort de ma bouche ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir accompli sa Mission". Manière de dire : au commencement, il y a une Parole bonne, elle descend de Dieu, elle vient d’une source non polluée, elle permet à la personne humaine d’exister en vérité. Elle est pour l’être humain, pour qu’il vive. Cette Parole ouvre toujours de nouveaux commencements, elle vient nous recréer et faire émerger en nous la vie selon Dieu. Elle ne se résigne pas à ce que le pouvoir du néant ait le dernier mot.

La semence, c’est la Parole de Dieu, contenue dans notre Bible, mais qui ne devient véritablement Parole que si elle est proclamée, semée, ce qui est la condition pour qu’elle porte du fruit. Sinon, cette Bible n’est qu’un livre comme un autre. Cette Parole est en même temps une parabole d’espérance, pour ranimer notre confiance. Elle nous dit : voyez un peu la fécondité de cette Parole. Si elle tombe dans une bonne terre, elle va donner, cent, soixante, trente grains pour un seul grain semé. Soyez confiants, nous dit-elle : chacun de vous a reçu de quoi porter du fruit...

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La Parole de Dieu, c’est la vie

Gardez courage ! Celui qui a des oreilles, qu’il entende. L’humain est guéri quand il est guéri de ses surdités, quand il réentend dans sa vie ce dont il s’était coupé par ses résistances de toutes sortes (orgueil, démission, oubli ...).

Selon Jésus, il me semble, que l’être humain a une tâche spécifique : la Parole de Dieu reçue permet de porter du fruit. Elle nous rend productif, efficace. Elle doit permettre de rendre visible que nous sommes des enfants de Dieu, traversés par ce flux d’énergie créatrice non seulement qui nous Ce texte laisse entendre que nous sommes impliqués, insérés dans la création et qui nous rend productif nous-même, mais qui, en même temps, nous permet de transmettre la vie et d’assumer notre responsabilité vis-à-vis de la création, dans sa gestion et être créateur nous-même. Nous devons prendre conscience de ce implique. Notre chance : c’est la capacité la Parole de Dieu nous offre.

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Reproduire : c’est transmettre la Parole reçue et qui nous fait vivre !

Reproduire la semence, c’est notre mission. Ensuite, cette semence tombera dans les ronces, les cailloux, elles sont brûlées par le soleil, mangées par les oiseaux ? Ou bien elle tombera en bonne terre, et fructifiera, à nouveau. Peu importe ! l’endroit de sa chute n’est pas notre problème.

Telle personne écoute, puis oublie. Où se moque. Telle autre se réjouit, puis trouve mieux à faire, accaparée par ses problèmes ou ses intérêts. Ou bien elle adhère au témoignage. Peu importe ! Ce n’est pas notre problème. Ce n’est pas au nombre d’adhésions obtenues que nous justifierons et conserverons notre place à la table du Seigneur.

C’est pourquoi dans l’Église, nous devons rester enracinés dans la paix que Dieu donne, et n’avoir aucune inquiétude. Parce que nous ne risquons rien à témoigner de notre foi, car le rendement du témoignage n’est nullement notre problème. Nous vivons, en Église, une mission libérée du moindre compte à rendre à Dieu. De même que ce n’est pas notre rendement, dans quelque domaine que ce soit, qui nous fait vivre ; mais c’est l’amour qui nous a donné naissance, et qui s’est révélé à nous, par Jésus-Christ, comme notre salut.

Notre responsabilité, c’est le témoignage, c’est l’Église, oui ; mais le fruit de ce témoignage, c’est la responsabilité de Dieu. Nous témoignerons en paix, l’esprit tranquille, l’esprit libre avec l’Esprit Saint, parce que le salut, le nôtre et celui du monde, c’est la responsabilité, l’œuvre et le problème de Dieu et en rien les nôtres : voilà quel est le don de Dieu, créateur en nous d’une bonne volonté véritable, parce que libérée du souci de notre impuissance…

L’Église est une œuvre surprenante, mais si nous avons un jour cru qu’elle était stable, qu’elle ne devait pas changer, qu’elle n’était pas atteinte par l’évolution de notre société et si nous ajoutions à cela qu’elle devait toujours agir de la même manière nous nous sommes trompés. L’Église est profondément le reflet de la vie avec tous les aléas qui y sont associés… Tous les chrétiens n’ont pas le goût des discussions théologiques… Mais tous sont invités par le Christ à témoigner de leur foi… avec leurs convictions et dans le respect des autres… L’Église est une communauté d’hommes et de femmes qui tente de témoigner de l’œuvre de Jésus Christ et de l’amour inconditionnel de Dieu.

Frédéric Verspeeten

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Parole, semence et reproduction