Apaisement au cœur de la dépression

 

 

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1 Rois 19, 9-13 : dépressif, Elie le plus grand des prophètes

9Là-bas, il entra dans la grotte et y passa la nuit. Soudain la parole du SEIGNEUR lui parvint, qui lui disait : Que fais-tu ici, Élie ? 10Il répondit : J'ai montré une passion jalouse pour le SEIGNEUR, le Dieu des Armées ; car les Israélites ont abandonné ton alliance, ils ont rasé tes autels, ils ont tué tes prophètes par l'épée ; moi, je suis resté, seul, et ils cherchent à me prendre la vie ! 11Il reprit : Sors et tiens-toi dans la montagne, devant le SEIGNEUR. Or le SEIGNEUR passait. Un grand vent, violent, arrachait les montagnes et brisait les rochers devant le SEIGNEUR : le SEIGNEUR n'était pas dans le vent. Après le vent, ce fut un tremblement de terre : le SEIGNEUR n'était pas dans le tremblement de terre. 12Après le tremblement de terre, un feu : le SEIGNEUR n'était pas dans le feu. Enfin, après le feu, un calme, une voix ténue. 13Quand Élie l'entendit, il s'enveloppa le visage de son manteau, sortit et se tint à l'entrée de la grotte. Soudain une voix lui dit : Que fais-tu ici, Élie ?

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Elie, le plus grand des prophètes !

Si nous avons lu la Bible ou fréquenté l’école biblique nous avons en tête quelques souvenirs relatifs au prophète Élie. Dans la première partie de la Bible nous trouvons de nombreux livres attribués à des prophètes. Ils proclament la parole à temps et à contretemps. Ils dénoncent les exactions et remettent en cause la politique des puissants…

Ils posent aussi des gestes symboliques mais Élie et Élisée son, successeur selon la Bible sont eux des prophètes qui ne nous ont pas laissé de livre comme Ésaïe ou Abdias. Par contre, ils vont sillonner les routes d’Israël et de Juda. Élie nous est présenté comme le prophète de la puissance de Dieu !

Nous allons parler d’Élie. Il est considéré comme le plus grand des prophètes, celui qui incarne parfaitement la figure prophétique et dans les évangiles il sera mentionné comme celui qui apparut avec Moïse lors de la transfiguration. Élie apparaît soudainement, c’est un homme semblable à nous dit le texte, nous ne savons rien de sa jeunesse, de ses origines, si ce n’est qu’il est Tishbite, d’entre les habitants de Galaad… Il apparaît sur la scène du dessein de Dieu en Israël dans un temps qui nous est décrit comme un temps de déclin spirituel et même d’apostasie… On nous dit que le culte de YHWH avait disparu en Israël. Et que les Baals l’avaient partout remplacé… Les textes laissent encore transparaître que l’idolâtrie, la superstition, régnaient et que l’état moral et spirituel du peuple était retombé au plus bas… Son ministère sera marqué par l’empreinte du surnaturel et il nous est présenté dans un premier temps comme un homme qui vit sa foi au Dieu vivant, qui se confie en Dieu et croit en la force divine. En trois affirmations disons qu’Élie croit au Dieu vivant, au Dieu de l’alliance, et qu’il s’efforce de vivre consciemment jour après jour dans la présence de Dieu. À cela nous pourrions ajouter qu’il comptait sur la force de Dieu !

Depuis une cinquantaine d’années, la terre d’Israël, qui formait jusque-là un seul et même pays, avait été divisée en deux royaumes : le royaume de Juda au sud, et le royaume d’Israël au nord, sur lequel règne un couple infernal. La reine Jézabel est une étrangère originaire de Phénicie – l’actuel Liban – et elle a introduit dans le pays sa religion phénicienne, le culte du dieu Baal, une divinité de la nature. Elle défend ce culte avec fanatisme et fait tuer tous ses opposants…

Élie est un homme qui croit en la force : lorsqu’il a tué les 450 prophètes de Baal, il a montré devant le peuple, de manière évidente, que le Dieu d’Israël est le seul vrai Dieu. Élie s’est fait le champion d’un Dieu Tout-Puissant. Élie vient donc de livrer un combat contre les prophètes de Baal et après avoir annoncé que Dieu fermerait le ciel, il prie et annonce que le ciel va enfin à nouveau s’ouvrir, que la pluie va venir.

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Grandeur, mais aussi fragilité

Élie se sent menacé, poursuivi, recherché et il fuit. L’homme que l’on, nous a présenté comme un roc, à la parole virulente et inflexible, qui plaçait sa confiance en Dieu est ici déstabilisé, il se sent humilié et se demande à quoi sa vie peut bien avoir servi ? Il a peur, il s’isole, se sent accablé déprimé plongé dans le désespoir et il s’interroge : était-il nécessaire de faire monter vers Dieu cette prière qui appelait à la destruction des autels des prophètes de Baal ? Est-il amené par la menace de Jézabel à considérer que sa victoire du Carmel sera sans lendemain, qu'il lui sera impossible d'arracher en profondeur l'idolâtrie du cœur de son peuple ? A-t-il seulement honte de sa propre lâcheté ? Se sent-il coupable d'avoir outrepassé la volonté de Dieu en égorgeant ses rivaux païens ? Ce scrupule est cependant peu probable dans le contexte de l'époque... Est-il tout simplement à bout de forces après un combat épuisant ? Si nous n'arrivons pas à démêler ces divers sentiments possibles, Élie nous rejoint par là même dans la complexité de nos propres déprimes ! Nos sentiments dans ces cas-là ne sont-ils pas toujours ambigus : l'impression d'être victimes de l'adversité, se mêlant à un sentiment diffus de culpabilité, ce qui nous enferme dans une vision pessimiste de notre situation, voire nous mène à des pensées suicidaires...

Nous aurions pourtant tort de nous moquer de lui. Si nous y réfléchissons bien Élie nous ressemble. Qui, d’entre nous ne s’est jamais senti déprimé ou abattu ? Qui de nous ne s’est jamais trouvé aux prises avec le désespoir ? La crainte nous gagne, nous aussi, parfois pour différents motifs ! N’avons-nous pas connu ces périodes où le doute l’emporte sur la foi et la confiance en Dieu ? Ne nous est–il pas arrivé de nous sentir isolé et d’être là comme quelqu’un que personne ne comprend ? Ou encore de vous sentir au bout du rouleau ?

Alors, ce qui arrive à Élie est bien humain et nous ressemble, l’épître de Jacques au chapitre 5 verset 17 nous dit : ‘’Élie était un homme semblable à nous ; il pria avec ferveur pour qu’il ne plût pas, et il ne plut pas sur la terre pendant trois ans et six mois ; puis il pria de nouveau, le ciel donna de la pluie, la terre produisit son fruit…’’

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Homme de la même nature que nous ! Tout est dit ! En pleine dépression, il veut mourir

Pris de panique, Élie s'enfuit pour sauver sa vie. Cela peut paraître une défaillance inattendue chez ce vaillant serviteur du vrai Dieu. Le récit biblique ne nous cache pas que le prophète passe alors par une profonde crise de découragement. L'homme exceptionnel nous devient ainsi bien plus proche, bien plus humain ; Cependant le récit, dans sa sobriété, ne nous permet pas d'interpréter avec certitude ce qui se passe à ce moment critique dans la conscience d’Élie.

Et c’est en plein désert, sur le Mont Horeb, loin de tout, que Dieu lui dit que fais-tu ici Élie ? Le vent violent se tait, la terre tremble, le feu s’apaise et soudain un murmure une voix discrète s’adresse à lui… Élie connaît à ce moment un état de grand surmenage mental, il est épuisé physiquement et a du mal à garder un contact spirituel avec Dieu. Élie en est là. Non pas à vouloir se donner la mort, mais à demander à Dieu de mettre fin à sa vie. Mais la voix qui se fait entendre en son cœur lui rappelle qu’il n’est pas abandonné ; Élie retrouve la foi, Dieu ressuscite en quelque sorte le prophète

Élie comprend que sa vie reste précieuse aux yeux de Dieu, même si le sens qu'elle peut prendre lui reste encore caché. La suite du récit est à nouveau d'une importance capitale et d'une grande beauté littéraire.

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Elie « au bout du rouleau », réconforté par Dieu

Fortifié par la nourriture angélique, Élie en effet se lève et "marche 40 jours et 40 nuits jusqu'à la montagne de Dieu, l'Horeb". Ce chiffre de 40 est conventionnel, il signifie que le prophète refait en sens inverse le parcours d'Israël au désert, qui avait duré 40 ans, pour un pèlerinage aux sources de la révélation à Moïse, sur la montagne de l'alliance et du don de la Loi (Horeb est un autre nom du Sinaï), Il passe la nuit dans la caverne, probablement celle où la tradition disait que Moïse avait séjourné.

Élie a surmonté sa défaillance personnelle. Au Seigneur qui l'interpelle, il répond avec une certaine véhémence, comme pour se justifier, qu’il s'était passionné pour sa cause, que son échec est dû à l'infidélité de son peuple. Il est resté le seul fidèle et on veut le faire mourir. Il semble faire reproche à Dieu de cette situation : sous-entendu„ comment ton plan pourrait-il se réaliser ? Ton histoire avec le peuple de l'alliance est dans l'impasse ! Et Dieu lui rappelle alors qu’il n’a cessé d’œuvrer et que 7000 personnes n’ont jamais plié le genou devant les Baals.

Les Jézabel d'aujourd'hui s'appellent dictatures sanglantes, puissances financières inhumaines, dégradation de la biosphère etc... Les Baal modernes s'appellent l'argent roi, la compétition forcenée, le repli identitaire, le fanatisme etc. Notre monde est entré dans une crise sans précédent, les dirigeants, même lorsqu'ils sont lucides et de bonne volonté semblent dépassés par la complexité des problèmes. Tout nous pousse vers le défaitisme, sinon vers un catastrophisme radical, l'injustice et la violence sont comme une fatalité qui nous écrase. Comment ne pas nous sentir impuissants avec nos bonnes volontés aux mains nues, nos professions de foi idéalistes ? Nous nous sentons proches du désespoir d’Élie.

Mais, nous ne sommes pas seuls à vouloir changer la vie, alors en dépit de toutes les déceptions et de toutes les craintes il faut continuer notre combat et notre témoignage. Tout n'est pas joué ! Il est vrai que la course à l'autodestruction de l'humanité peut s'accélérer. Mais tout peut aussi basculer du côté de la vie, si les résistances grandissent et deviennent plus efficaces. Dieu est toujours le maître de nos vies le maître de la création et dans le silence de nos vies il peut nous rejoindre et reconstruire, restaurer, nous rendre les forces et le courage.

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De même, Pierre, en train de couler sauver par Jésus

Cette histoire a beaucoup de points communs avec le texte de Matthieu. L'Évangile de Matthieu nous dit que la main de Pierre cherche la main de Jésus, juste un petit écart pour ne pas couler... qui va le combler ? C'est Jésus : il lui saisit la main ! (Matthieu 14,31) Pierre, en sortant de la barque, a cru pouvoir marcher sur l'eau, ce qui est devenu une expression familière, mais l’homme n’est pas Dieu, il y aura toujours cet écart, celui de notre fragilité, celui de notre finitude dont nous ne pouvons sortir qu’en appelant Jésus : Sauve-moi ! En sortant de sa barque-refuge, Pierre a failli couler. En sortant de nos temples-refuges nous risquons d’être happés, engloutis, par ce monde hostile auquel nous n’appartenons pas. Ce n'est pas Pierre qui saisit Jésus, c'est Jésus qui saisit Pierre, c'est lui qui fait le trajet vers nous dans la tempête de nos vies, de notre temps, de nos histoires. Dieu fait ainsi si nous prenons le temps de nous placer devant lui. Il ouvre un chemin jusqu’à nous pour que nous retrouvions les forces pour avancer.

Il nous donne d'abord une parole, la même que celle d’Élie à la veuve de Sarepta, la même que celle dite à Jaïrus dont la fille venait de mourir : Ne crains point, crois seulement. Et puis, il y a sa présence : il monte dans la barque et le vent tombe. Alors, maintenant nous savons que nous pouvons sortir, rien ne peut nous arriver, la prière de Jésus est exaucée : Je ne te demande pas de les ôter du monde, mais de les préserver du mal. Dieu ne cesse de combattre à nos côtés et de nous préserver du mal.

Oui, au coeur de la dépression il veut nous apaiser nous aussi !

Frédéric Verspeeten

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Nous aussi, apaisé au cœur de la dépression  ?