John Cobb (1925 – ----)

 

 

-         Dieu, un dynamisme transformateur et créateur

-         La justification : le souci du soi brisé

-         Cobb, une théologie en devenir

-         Citation à méditer

Dieu, un dynamisme transformateur et créateur

Pour John Cobb, Dieu est un dynamisme transformateur et créateur.

Il nous pousse vers l'avant, vers l'avenir.

John Cobb est aujourd'hui le principal représentant de la théologie du Process. Il a enseigné pendant de nombreuses années à Claremont, en Californie, avant de prendre sa retraite il y a quelque temps. Cobb publie beaucoup, sur mille et une choses très diverses, et a construit petit à petit une des théologies les plus rigoureuses et originales du XXe siècle.

Comme tous les théologiens du Process, John Cobb applique dans le champ de la théologie les grands principes de la philosophie du mathématicien et philosophe anglais Alfred Whitehead. Celui-ci part du constat que le réel n'est pas composé d'entités statiques et autonomes, mais que ses éléments sont dépendants les uns des autres et en constante transformation. La réalité est dynamique et changeante, la création n'est pas achevée mais toujours en cours d'élaboration, la personne humaine n'est pas figée dans une identité invariable mais se transforme au gré des événements qui la traversent et des rencontres qu'elle effectue. Dieu lui-même participe à ce mouvement de modification perpétuelle. Il n'est pas inerte, immuable et hors du temps, il transforme, met en mouvement et change. Il motive le processus de transformation qui affecte et nourrit le réel et se retrouve lui-même modifié par ce processus. Ainsi, pour Cobb, Dieu est une puissance dynamique qui ne cesse de travailler le réel pour l'enrichir de nouvelles potentialités. Dans une résistance acharnée contre l'immobilisme et la fatalité, Dieu est résolument le Dieu des possibles, du coup de grâce absolument inattendu. Mais la nouveauté qu'il provoque ne peut surgir que dans un ordre déjà constitué de potentialités. Tout n'est pas absolument possible. Des résistances et des impuissances peuvent mettre provisoirement en échec l'action créatrice de Dieu. Pour être réelle et perceptible, la nouveauté doit être enracinée, combinée, associée à ce qui est déjà là. L'action créatrice de Dieu dépend de sa propre force de persuasion et de l'aptitude de chaque composante du réel à se laisser transformer et à se libérer des conforts de l'habitude.

Cobb utilise le terme « Christ » pour désigner cette action de transformation de Dieu dans le monde. A chaque fois que Dieu agit dans l’histoire, l’événement Christ est produit. Christ ne nous renvoie pas à un Dieu omnipotent et omniscient, mais à un processus organique de transformation qui produit de la nouveauté, condamne l’ordre établi, nous propulse dans l’avenir. Christ ne désigne pas non plus, comme on finirait parfois par le croire, le nom de famille de Jésus, mais il signale une fonction, celle d'être oint, choisi, habité par la présence transformatrice de Dieu. Ainsi, dire de Jésus qu'il est le Christ signifie pour Cobb que l'intégralité de la vie de Jésus est soumise à l'exercice de cette fonction, que son moi est entièrement associé à la présence agissante de Dieu en lui. Jésus est le paradigme de l'incarnation mais, s'il est intégralement le Christ, il n'épuise pas la possibilité d'autres christs.

La justification : le souci du soi brisé

Ce Christ qui transforme et nous laisse sans repos est aussi celui par lequel s'expérimente notre salut. Car être justifié consiste précisément pour Cobb à être changé par une puissance de résurrection, à être saisi par le rayonnement et l'efficacité d'un événement de transformation créatrice. L'être est justifié dès lors qu'il s'ouvre, sort de lui-même, se transcende et se transforme. La justification se vit ainsi dans la libération de l’être de tout processus d’autojustification, de replis sur soi toujours à construire et à valider. Non pas parce que cette justification aurait été réalisée une fois pour toute, nous libérant définitivement du souci de nous-mêmes, ce qui, pour Cobb, relèverait d’une pure abstraction, mais parce que la justification se vit à chaque transformation créatrice, à chaque ouverture du soi vers autre chose que lui-même, dès lors précisément.que le souci de soi est brisé. A l'image d'une grâce pleinement perceptible dès qu'elle ne s'inscrit plus dans le registre de nos préoccupations, la justification se rend perceptible dans l'expérience du détachement de l'être de toute forme d'autojustification.

Pour toutes ces raisons, et pour bien d'autres encore, John Cobb a formulé une théologie extrêmement dynamique et pertinente. Dynamique, car cette pensée aime un Dieu bien vivant, qui nous met en marche et conduit chaque chose vers de nouveaux horizons. Pertinente, car la réflexion de Cobb ouvre de nombreuses perspectives théologiques: que ce soit dans le champ du dialogue interreligieux, de l'écologie, des débats avec la science contemporaine ou de la spiritualité.

Cobb, une théologie en devenir

Cobb applique à l'élaboration de sa propre théologie les concepts de « Process » et d’« interdépendance » qui caractérisent sa pensée. C'est ainsi qu'il accepte souvent de revenir sur sa réflexion, de la réviser, voire de la corriger. Pendant longtemps, par exemple, la discussion sur la signification du Christ est restée absente de ses travaux. Dieu seul était le thème central, un Dieu censé englober toute image du Christ.

Cobb est revenu sur cette position, et revendique depuis un christocentrisme radical. Jésus-Christ sert désormais pour lui de cadre normatif à toute affirmation théologique. De même, Cobb a pour spécificité de travailler à plusieurs et de revendiquer une forte interdisciplinarité. Biologiste, philosophe, astrophysicien, artiste, historien de l'art : tous sont fréquemment associés à la réflexion du théologien. On retrouve ici deux traits bien caractéristiques de la culture théologique américaine : celui du goût pour l'innovation- attrait stimulé par une certaine liberté par rapport aux héritages intellectuels -, et celui d'une profonde connivence avec les sciences humaines. La théologie occupe une place à part entière dans l'Université américaine. Cette reconnaissance favorise forcément la rencontre des disciplines entre elles

Texte rédigé par Raphaël Picon

pour le Journal Réforme

Pour poursuivre

Bouddhisme et christianisme. John Cobb. Labor et Fides, 1988.

Le Christ et Jésus. André Gounelle. Desclée de Brouwer, 1990.

Substance catholique et principe protestant. Paul Tillich. Cerf - Labor et Fides ­PUL

 

 

 

Lire : Dieu dans son rapport au monde, une dynamique de vie sans égale

 

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« Dieu n’est pas celui qui sanctionne l’ordre établi…
Répondre à Dieu signifie quitter
la sécurité des habitudes, des coutumes, des conformismes.
Cela veut dire vivre pour un avenir nouveau. »

John Cobb

 

 

 

 



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