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Marie, dissipons
quelques malentendus
Résumé
de la conférence à 2 voix, à partir de leurs textes
Pascale Watine,
théologienne catholique
cliquer ici pour consulter le texte complet
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1 Un peu d’histoire
Marie n’a été pour rien dans la rupture
des Églises au XVIème siècle. Marie n’a pas été la cause de la
séparation, mais elle en est devenue la victime. Il faut savoir que la
doctrine mariale des temps de la Réforme était très proche de celle des
catholiques. Luther a d’ailleurs écrit un très beau commentaire sur le
Magnificat. Des écrits réformés témoignent également d’une grande
vénération à Marie, il suffit de lire le traité intitulé: « De
l’honneur qui doit être rendue à la sainte Vierge Marie », publié en
1633, pour en être convaincu. Donc la Réforme protestante au XVIe siècle
n’a pas d’abord été hostile à Marie. Elle a surtout été hostile aux
indulgences et aux abus du clergé, d’où au départ, son désir de réformer
l’Église
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2 Un peu d’histoire
C’est
seulement à partir du XVIIIe siècle que les protestants se sont raidis vis-à-vis de
Marie, suite à des développements de la mariologie. Il y a eu
tellement d’abus, d’excès de dévotions mariales chez les catholiques que
les protestants avaient beaucoup de mal à nous entendre parler de Marie.
Nous pouvons dire que nous, catholiques, nous avons une part de
responsabilité dans ce rejet, parfois épidermique, que l’on peut rencontrer
chez nos frères d’autres Églises.
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3 Un peu d’histoire
Depuis
le Moyen-Âge,
certaines pratiques étaient devenues déviantes et finalement faisaient tort
à l’image de Marie. Pour donner un exemple, certains parlaient de Marie comme de la quatrième personne de la
Trinité. On faisait de Marie un intermédiaire
entre Dieu et les hommes, et le Christ était en quelque sorte relégué,
oublié. Les protestants ont eu raison de réagir. Il fallait sortir de cette
impasse où la mariologie était
parfois devenue de la mariolâtrie
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Entre membres d’une même confession, il
peut y avoir des sensibilités mariales très diverses. Soit on a tendance à
situer Marie très haut, et on la contemple surtout comme la Reine du ciel,
soit on la regarde plutôt vers le bas, vers la terre, et on la voit
davantage comme l’humble servante du Seigneur. Par rapport à ces tendances que l’on qualifie dans
l’Église catholique de maximalisante
d’un côté et de minimisante
de l’autre, il est intéressant d’interroger les Écritures, non pas pour
faire une étude exégétique des textes sur Marie, mais pour regarder ce que
Marie nous dit d’elle-même. Que dit Marie à l’ange lors de
l’annonciation : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit
fait selon ta parole ». Je suis la servante du Seigneur. Le mot grec,
c’est le mot doulos qui signifie
l’esclave. Marie se situe donc très
bas. Mais par ailleurs d’aucun personnage biblique il avait été dit auparavant :
« Désormais toutes les générations me diront bienheureuse » (Lc 1, 48). Marie ici se situe très haut. Alors peuvent naître des
tensions, des oppositions, voire des allergies au sein d’une même tradition.
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5 Qu’est-ce qui nous unit ?
Tous, catholiques,
protestants, orthodoxes, anglicans, nous
vénérons Marie, tous nous l’honorons comme la mère du Seigneur, la mère
du sauveur. Les orthodoxes ont par exemple une très grande vénération à la
Vierge.
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6 Qu’est-ce qui
nous unit ?
Pour tous, elle est le modèle
de toute existence chrétienne, tout particulièrement dans le domaine de
l’obéissance filiale et de la foi, l’espérance et la charité. Marie nous
apparaît comme modèle de tous les croyants, elle qui fut la première en
chemin, étant devenue elle-même disciple du Christ.
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7 Qu’est-ce qui nous unit ?
Marie
se situe donc toute entière du côté des hommes. C’est ce que
toutes les confessions chrétiennes affirment. Marie est une créature
humaine, une femme de l’humanité. Elle n’est donc pas une divinité. Toute
mariolatrie est donc à exclure. Marie avait la foi de son peuple, elle
vivait l’attente et l’espérance messianiques. Marie se situe donc du côté de l’humanité, et comme chacun d’entre
nous, Marie a besoin d’être rachetée, sauvée.
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8 Qu’est-ce qui nous unit ?
Nous
confessons ensemble la virginité et la maternité divine de Marie. Dans le second
article du symbole des apôtres,
nous disons : « nous croyons en Jésus-Christ, qui a été conçu du
Saint-Esprit et qui est né de la Vierge Marie ». Dans celui de Nicée-Constantinople (381), nous
disons : « par le Saint-Esprit, il a pris chair de la Vierge
Marie et il s’est fait homme ». Ce credo est commun à toutes les
Églises puisque toutes les Églises chrétiennes reçoivent les conciles de
l’Église des premiers siècles.
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9 Qu’est-ce qui nous unit ?
Nous
confessons ensemble la virginité et la maternité divine de Marie. Dans le second
article du symbole des apôtres,
nous disons : « nous croyons en Jésus-Christ, qui a été conçu du
Saint-Esprit et qui est né de la Vierge Marie ». Dans celui de Nicée-Constantinople (381), nous
disons : « par le Saint-Esprit, il a pris chair de la Vierge
Marie et il s’est fait homme ». Ce credo est commun à toutes les
Églises puisque toutes les Églises chrétiennes reçoivent les conciles de
l’Église des premiers siècles.
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10 Quelles sont les questions qui fâchent
et font difficulté ?
Tout d’abord, l’invocation de Marie. Nos frères protestants, qui refusent
ainsi toute intercession de Marie et des saints nous rappelle ainsi que
Marie nous montre son fils, elle le présente au monde parce qu’il est le
chemin, la vérité et la vie. C’est vers lui que doit se fixer notre regard.
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11 Quelles sont les questions qui fâchent
et font difficulté ?
Le deuxième point concerne la coopération de Marie au salut.
Nous, catholiques, nous affirmons que Marie a coopéré au salut. Les Églises
issues de la Réforme n’aiment pas beaucoup ce mot de coopération, par
crainte que l’on donne à Marie une place presque aussi importante que celle
de Jésus dans le salut. Et c’est justement cela qui fait vraiment problème,
c’est quand nous parlons de Marie
comme co-rédemptrice. Et ils ont raison de se fâcher. Or l’Église
catholique, le 31 octobre 1999, a clairement affirmé avec les
luthériens : « Seul
Jésus-Christ nous sauve ». Ce qui ne contredit en rien que Marie
ait coopéré au salut comme instrument de Dieu.
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12 Quelles sont les questions qui fâchent
et font difficulté ?
Un
autre terme qui fâche, c’est le terme « médiatrice » appliqué à
Marie.
Nous savons bien qu’il n’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes.
Les protestants ont raison de nous rappeler ce dogme de l’unique médiation
du Christ qui est aussi le nôtre.
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13 Quelles sont
les questions qui fâchent et font difficulté ?
Viennent
ensuite les deux dogmes mariaux : le dogme de l’Immaculée conception, promulgué
en 1854 par Pie IX et celui de l’Assomption
en 1950 par Pie XII. Insuffisamment fondés sur les Écritures, et de ce
fait, ils apparaissent inacceptables. Nous catholiques, que
disons-nous ? Soit nous
soulignons que le corps de Jésus n’aurait pu naître d’une chair marquée par
le péché, soit nous comprenons
l’immaculée Conception comme la marque d’une sainteté qui est accordée à
Marie de façon toute gratuite, faisant d’elle une femme comblée de grâce (Lc 12, 28). Quant au dogme de
l’Assomption, Marie élevée en corps et en âme à la gloire céleste, il est à
comprendre comme le parfait exemple de cette réalité de la résurrection
déjà à l’œuvre. Ces deux dogmes nous les considérons comme des privilèges
de la mère de Dieu (theotokos)
qui a bénéficié, par anticipation,
de la grâce rédemptrice du Christ et de la grâce prévenante de Dieu.
Dieu donne à Marie dès sa conception la grâce qui sera donnée à l’humanité
par la Croix et la Résurrection de son Fils (à considérer non comme des
additions au donné révélé, mais comme un déploiement, un approfondissement
du donné révélé).
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14 Le Concile de
Vatican II, qu’apporte-t-il?
Les Pères étaient partagés sur la
question. Finalement, c’est la discrétion vis-à-vis de Marie qui l’emporta.
Le véritable enjeu pour les Pères conciliaires, c’était l’équilibre de la
foi. Pour le concile qui se voulait
essentiellement pastoral, le besoin
d’un rééquilibre dans ce domaine était devenu nécessaire car,
pour beaucoup de catholiques, Marie était mise sur le même pied que le
Christ, parfois elle semblait même compter davantage que son Fils. Avec
ce rééquilibrage Marie n’était donc
pas située au-dessus de l’Église, mais au sein du peuple de Dieu, à
l’intérieur de l’Église. Au Concile la tendance « minimalisante »
l’emporta donc, de justesse, sur la tendance « maximalisante ».
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15 Le Concile
de Vatican II, qu’apporte-t-il?
Pour les Pères, le respect le plus
fondamental et l’hommage le plus grand qui pouvait être rendu à Marie,
c’était de nuancer certaines affirmations concernant Marie et de les
resituer face au mystère du Christ. C’était pour eux le plus grand honneur
que l’on pouvait lui faire, c’était aussi la resituer à sa juste place. L’expression de «médiatrice » apparaîtra quand même une
fois, à la suite d’une succession de titres qui indiquent que cette
médiation est à comprendre dans le sens d’une intercession. Le rôle
de Marie dans l’incarnation et la rédemption est présenté comme celui d’une
« associée généreuse »
et d’une humble servante du Seigneur » (LG 61) à qui la grâce de Dieu a permis de
« coopérer » au salut. Le concile reprend cette citation de St
Irénée : « par son
obéissance, Marie est devenue, pour elle-même et pour le monde, cause du salut »
(LG 56). Le concile réclame que le culte à la Vierge Marie soit
avant tout centré sur le Christ et qu’il rende gloire à Dieu.
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16 Le Concile de
Vatican II, qu’apporte-t-il?
Depuis
le Concile on est passé
d’une théologie de Marie-reine à une théologie de Marie-servante. Mais on voit réapparaître dans
certains milieux des orientations mariales d’avant Vatican II.
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17 Quarante ans après le concile : Où en est-on aujourd’hui entre Églises
dans nos compréhensions de Marie ?
Position du Groupe des Dombes (non officiel) ; Côté protestant, il
demande que l’adhésion à ces
deux dogmes ne soient pas une condition préalable à l’entrée dans la pleine
communion ecclésiale des deux Églises. Quant
aux catholiques, ils demanderaient alors aux protestants de respecter
le contenu de ces deux dogmes et de ne pas les juger comme contraire à
l’évangile et à la foi. Le groupe des Dombes considère que ce qui est dogme
de foi pour les uns peut être considéré par les autres comme theologoumenon, c.à.d. comme une
opinion théologique légitime, et donc non séparatrice d’Église.
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18 Quarante ans après le concile : Où en est-on aujourd’hui entre Églises
dans nos compréhensions de Marie ?
Marie qui n’a jamais cherché à attirer
l’attention sur elle, qui s’est toujours effacée devant son Fils. Car c’est
le sauveur que Marie veut nous montrer, c’est le Seigneur qu’elle nous
invite à contempler et à suivre. C’est là sa mission essentielle. Le
nouveau centre œcuménique marial à Nazareth n’a pas d’autre vocation.
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