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Marie,
dissipons quelques malentendus Texte complet
de Pascale Watine Bonsoir
à tous. Je tiens à vous dire combien je suis heureuse et honorée d’être parmi
vous ce soir. Pour plusieurs raisons, d’abord pour les circonstances qui nous
rassemblent, fêter un millénaire, c’est un événement historique important,
ensuite pour le sujet abordé, Marie, la mère de Jésus, le Christ notre
Seigneur, celui qui est venu dans le monde pour notre salut, enfin pour le
groupe œcuménique qui nous accueille et qui a organisé ce soir cette
conférence à deux voix. Car c’est devenu aujourd’hui pour moi une évidence
qu’on ne peut faire de la théologie, en l’occurrence ici de la théologie
mariale, sans être à l’écoute de ce que pensent et disent les autres Églises.
Pour nous catholiques, c’est une implication ecclésiologique directe du subsistit in, vous savez, ces deux
petits mots du Concile Vatican II qui précisent que l’unique Église du Christ
déborde les frontières de l’Église catholique. Aussi je me réjouis de la
présence à mes côtés du pasteur Frédéric Verspeeten. Une autre évidence pour
moi, je ne peux parler de Marie sans avoir, avec un regard catholique, une
approche œcuménique sur la question, d’autant plus qu’il s’agit de dissiper
les malentendus tant du côté protestant que du côté catholique. Aussi ne vous
attendez-pas à une présentation exhaustive de la théologie mariale
catholique. Enfin, je voudrai dire que si nous sommes là ce soir, c’est
d’abord pour mieux connaître nos traditions ecclésiales et respecter leurs
différences, un principe fondamental en œcuménisme, mais c’est surtout pour
nous enrichir et nous interpeller mutuellement. * * * * * * * Avant
d’entrer dans le vif du sujet, je ferai deux remarques préliminaires qui nous
aideront à mieux saisir les enjeux de la question et permettront déjà de
dissiper quelques malentendus ou idées préconçues. La
première que le groupe des Dombes a soulignée,
c’est que Marie n’a été pour rien dans la
rupture des Églises au XVIème siècle. Marie
n’a pas été la cause de la séparation, mais
elle en est devenue la victime. Il faut savoir que la doctrine mariale
des temps de la Réforme était très proche de celle
des catholiques. Luther a d’ailleurs écrit un très
beau commentaire sur le Magnificat. Des écrits
réformés témoignent également d’une
grande vénération à Marie, il suffit de lire le
traité intitulé: « De l’honneur qui doit
être rendue à la sainte Vierge Marie »,
publié en 1633, pour en être convaincu. Donc la
Réforme protestante au XVIe siècle n’a pas
d’abord été hostile à Marie. Elle a surtout
été hostile aux indulgences et aux abus du clergé,
d’où au départ, son désir de réformer
l’Église. C’est seulement au XVIIIe siècle
que les protestants se sont raidis vis-à-vis de Marie, suite
à des développements de la mariologie aux siècles
suivants. Il
y a eu tellement d’abus, d’excès de dévotions mariales chez les catholiques
que les protestants avaient beaucoup
de mal à nous entendre parler de Marie. Nous pouvons dire que nous,
catholiques, nous avons une part de responsabilité dans ce rejet, parfois
épidermique, que l’on peut rencontrer chez nos frères d’autres Églises.
Depuis le Moyen-Âge, certaines pratiques étaient devenues déviantes et
finalement faisaient tort à l’image de Marie. Pour donner un exemple,
certains parlaient de Marie comme de la quatrième personne de la Trinité. On
faisait de Marie un intermédiaire entre Dieu et les hommes, et le Christ
était en quelque sorte relégué, oublié. Les protestants ont eu raison de
réagir. Il fallait sortir de cette impasse où la mariologie était parfois
devenue de la mariolâtrie. Deuxième
remarque concernant Marie : Il n’y a pas qu’entre catholiques,
protestants, orthodoxes, évangéliques qu’il nous faut vivre l’œcuménisme.
Entre membres d’une même confession, il peut y avoir des sensibilités
mariales très diverses. Je pense à un prêtre anglican qui disait : si vous
demandez à des anglicans la place de Marie dans leur vie, vous auriez sans
doute 10 réponses différentes. S’excluent-elles pour autant ? Toute la
question est là. Alors quelles sont ces positions ou plutôt ces principales
tendances que l’on rencontre au sein d’une même Église et que l’on absolutise
parfois ? Soit on a tendance à situer Marie très haut, et on la contemple
surtout comme la Reine du ciel, soit on la regarde plutôt vers le bas, vers
la terre, et on la voit davantage comme l’humble servante du Seigneur. Par
rapport à ces tendances que l’on qualifie dans l’Église catholique de
maximalisante d’un côté et de minimisante de l’autre, il est intéressant
d’interroger les Écritures, non pas pour faire une étude exégétique des
textes sur Marie, mais pour regarder ce que Marie nous dit d’elle-même. Que
dit Marie à l’ange lors de l’annonciation : « Je suis la servante
du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole ». Je suis la servante
du Seigneur. Le mot grec, c’est le mot doulos
qui signifie l’esclave. Marie se situe donc très bas. L’annonciation nous
montre Marie, une jeune femme juive toute simple, ouverte à l’inattendu de
Dieu, disponible, capable de donner sa vie, en toute liberté, pour faire la
volonté de Dieu. Et quand elle apprend que l’enfant serait conçu du Saint
Esprit, Marie ne cherche plus à tout comprendre puisque cela dépasse son
entendement. Mais parce qu’elle a fait confiance à l’envoyé de Dieu et avait
confiance en Dieu, elle a pu s’abandonner et se libérer de tout ce qui aurait
pu la retenir. Marie avait la liberté de refuser. Cette
annonce prophétique de l’ange qui l’a remplie de joie, joie de l’Esprit et du
service de Dieu, Marie ne peut la garder pour elle-même, elle a besoin de la
partager à ses proches. Aussi part-elle en toute hâte à travers les montagnes
de Judée pour rejoindre sa cousine Elisabeth et lui annoncer la Bonne
nouvelle du salut. C’est la visitation. Et réalisant à quel point toutes deux
avaient bénéficié d’une attention toute particulière de Dieu, Marie se met à
le glorifier en chantant son Magnificat.
Que dit alors Marie ? « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon
Esprit en Dieu mon sauveur » (Lc
1, 47). Puis elle dit : « Il s’est penché sur son humble
servante » (Lc 1, 48). Marie
se situe encore du côté des petits, mais elle ajoute
aussitôt : « désormais toutes les générations me diront
bienheureuse ». Étonnante, cette parole prophétique de Marie. Abraham,
son Père dans la foi, n’a jamais osé dire cela. Pourtant Dieu lui avait
promis une descendance innombrable. Aucun personnage biblique n’a dit cela
auparavant. « Désormais toutes les générations me diront
bienheureuse » (Lc 1, 48).
Marie ici se situe très haut. Alors
on peut préférer une vision de Marie exalté dans la gloire à celle de Marie
comme servante obéissante à son Seigneur, ou vice versa. Cela ne fait aucun
problème. Ces visions ne s’excluent pas. Mais pourquoi vous avoir dit tout
cela ? D’une part, parce que ces
tendances vont se retrouver chez les pères du Concile Vatican II lorsqu’ils
aborderont les questions mariales, d’autre part, parce qu’il peut y avoir
problème lorsqu’on absolutise la tendance, ou lorsqu’on glisse sur une pente
qui n’est plus dans la droite ligne de l’Évangile. Alors peuvent naître des
tensions, des oppositions, voire des allergies au sein d’une même tradition.
Et là il nous faut être veilleur pour rester dans la communion les uns avec
les autres. *
* * * * * * Après
ces deux remarques préliminaires, puisque je vous ai proposé une approche
œcuménique de Marie, je vais dans un premier temps commencer par relever ce
qui nous unit avant de regarder les questions qui fâchent, celles qui font
problème entre les Églises. Puis dans un deuxième temps, nous regarderons ce
que dit Vatican II sur Marie et où l’on en est aujourd’hui entre catholiques
et entre Églises. Ne soyez pas étonnée par la méthode que je vous propose.
C’est une pratique courante en œcuménisme aujourd’hui de partir de ce qui
nous unit, et d’aller aussi loin que possible dans l’affirmation commune.
Cela permet souvent de réaliser qu’il y a plus de convergences que l’on ne
pensait au départ. * * * * * * * I. Qu’est-ce qui nous unit ? Tous,
catholiques, protestants, orthodoxes, anglicans, nous vénérons Marie, tous
nous l’honorons comme la mère du Seigneur, la mère du sauveur. Les orthodoxes
ont par exemple une très grande vénération à la Vierge. Pour
tous, elle est le modèle de toute existence chrétienne, tout particulièrement
dans le domaine de l’obéissance filiale et de la foi, l’espérance et la
charité. Le fiat de Marie est un
oui inconditionnel, un oui qui accepte de ne pas tout maîtriser, un oui qui
fait confiance et accepte de se laisser conduire par le Seigneur. Marie
s’appuie donc sur Dieu et non sur ses propres forces, ce qui lui donne de
passer à travers les épreuves de la nuit et d’être debout au pied de la
croix, continuant d’espérer dans les promesses de l’ange. Jusqu’au bout, la
foi de Marie est indéfectible et son espérance intacte. L’espérance est cette
vertu théologale qui n’a jamais cessé d’habiter Marie, quelques soient les
événements, la fuite en Égypte, la perte de Jésus au temple, la passion,
Marie espère dans le Seigneur et cela dès le début de la vie publique de
Jésus. Lorsqu’à Cana, en Galilée, elle voit que les serviteurs n’ont plus de
vin, que leur dit Marie ? « Faites tout ce qu’il vous dira ».
Ce qui importe avant tout pour Marie, c’est faire la volonté de Jésus. C’est
ainsi que Marie nous apparaît comme modèle de tous les croyants, elle qui fut
la première en chemin, étant devenue elle-même disciple du Christ. Du statut
de mère, Marie est en effet passée au statut de disciple. On l’a vu à Cana,
on le voit aussi à Capharnaüm quand on dit à Jésus « ta mère et tes
frères sont là qui te cherchent. Vous connaissez la réponse de Jésus :
« Qui sont mes frères, qui est ma mère ? Mes frères, mes sœurs, ma
mère, ce sont ceux qui font la volonté de mon Père ». Marie
se situe donc toute entière du côté des hommes. C’est ce que toutes les
confessions chrétiennes affirment. Marie est une créature humaine, une femme
de l’humanité. Elle n’est donc pas une divinité. Toute mariolatrie est donc à
exclure. Marie avait la foi de son peuple, elle vivait l’attente et
l’espérance messianiques. Marie se situe donc du côté de l’humanité, et comme
chacun d’entre nous, Marie a besoin d’être rachetée, sauvée. * * * * * * * Jusqu’ici,
je ne pense pas me tromper en disant que nous sommes tous sur la même
longueur d’onde. On peut encore continuer. Que confessons-nous ensemble dans
notre foi ? Qu’est-ce qui est central dans notre foi chrétienne au sujet
de Marie ? Nous
confessons ensemble la virginité et la maternité divine de Marie. Dans le
second article du symbole des apôtres, nous disons : « nous croyons
en Jésus-Christ, qui a été conçu du Saint-Esprit et qui est né de la Vierge
Marie ». Dans celui de Nicée-Constantinople (381), nous disons :
« par le Saint-Esprit, il a pris chair de la Vierge Marie et il s’est
fait homme ». Ce credo est commun à toutes les Églises puisque toutes
les Églises chrétiennes reçoivent les conciles de l’Église des premiers
siècles. Ces conciles étant œcuméniques sont normatifs pour toutes. Donc
tous, nous croyons en la virginité et la maternité divine de Marie. C’est
fondamental. C’est ce qui est au cœur de notre foi. Nous
confessons encore ensemble, dans le troisième article du symbole des Apôtres,
que nous croyons à la communion des saints et à la place privilégiée de Marie
dans cette communion. Et
puisque les conciles œcuméniques des premiers siècles sont normatifs,
normalement tous nous confessons que Marie est la Theotokos, c’est un mot grec qui signifie la mère de Dieu. Bien
sûr, non la mère de la divinité, du Dieu Trinité, mais la mère du Dieu fait
homme, du Dieu incarné, du Verbe qui s’est fait chair et qui a habité parmi
nous, pour reprendre le prologue de St Jean. Il faut savoir que c’est dans le
contexte d’un problème christologique que Marie fut proclamée la Théotokos au concile d’Éphèse, en 431.
Ce titre, Marie mère de Dieu, est donc à comprendre dans le sens de Marie,
Mère de Jésus-Christ, fils de Dieu. Il
me semble que tout ce que je viens de dire peut être entendu par les
différentes Églises, ce qui nous invite à éviter des jugements trop hâtifs du
style « les protestants ne croient pas en Marie » !…. *
* * * * * * II. Mais alors quelles sont les
questions qui fâchent et font difficulté ? Tout
d’abord, l’invocation de Marie. Tous nous honorons et vénérons Marie, mais
tous, nous n’invoquons pas Marie. Catholiques et orthodoxes demandent à Marie
d’intercéder pour eux, ils lui adressent des prières d’intercession comme l’a
fait l’ermite Bertholin il y a mille ans. Nos frères protestants, qui
refusent toute intercession de Marie et des saints (c’est une des raisons
pour lesquelles ils ne peuvent dire avec nous la seconde partie du « je
vous salue Marie ». Sainte Marie, priez pour nous, pauvres pécheurs
maintenant et à l’heure de notre mort), ont raison de nous rappeler que la piété
mariale ne doit pas occulter la relation du chrétien avec le Christ. C’est
d’ailleurs pourquoi les orthodoxes représentent toujours Marie avec l’enfant
Jésus. Vous ne trouverez pas d’icône de Marie sans que Jésus ne soit
représenté. Marie nous montre son fils, elle le présente au monde parce qu’il
est le chemin, la vérité et la vie. C’est vers lui que doit se fixer notre
regard. Le
deuxième point concerne la coopération de Marie au salut. Nous, catholiques,
nous affirmons que Marie a coopéré au salut. Par son fiat
exprimé en toute liberté, Marie a accepté de jouer
un rôle dans l’histoire du salut. Elle a accepté de
porter en son sein le sauveur de l’humanité qu’elle
a enfanté à Bethléem. Les Églises issues de
la Réforme n’aiment pas beaucoup ce mot de
coopération, par crainte que l’on donne à Marie une
place presque aussi importante que celle de Jésus dans le salut.
Et c’est justement cela qui fait vraiment problème,
c’est quand nous parlons de Marie comme co-rédemptrice. Et
ils ont raison de se fâcher. C’est un titre qui a
été donné à tort à Marie, un titre
qui a circulé dans les décennies qui ont
précédé le concile et que, malheureusement
certains catholiques continuent encore à utiliser. Or
l’Église catholique, le 31 octobre 1999, a clairement
affirmé avec les luthériens : « Seul
Jésus-Christ nous sauve ». Nous n’y sommes pour
rien. Il est l’unique sauveur, le seul sauveur. Le salut vient de
Dieu qui, en Jésus-Christ, nous a manifesté la puissance
de son amour. Le salut est donc tout entier du côté de
Dieu. Ce qui ne contredit en rien que Marie ait coopéré
au salut comme instrument de Dieu. Un
autre terme qui fâche, c’est le terme « médiatrice » appliqué à
Marie. Nous savons bien qu’il n’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les
hommes. C’est Jésus, le Verbe fait chair, conçu de l’Esprit, né de la vierge
Marie. Vrai Dieu et vrai homme, dira le concile de Chalcédoine en 451. Il n’y
a donc pas d’autre intermédiaire entre Dieu et les hommes. Il est le seul
médiateur par lequel Dieu se donne lui-même dans l’Esprit Saint. Lui qui est
dans le sein du Père, nous dit l’évangéliste Jean dans son prologue, lui qui
est l’engendré du Père, non pas créé, de même nature que le Père, disons-nous
dans le credo de Nicée-Constantinople, il est le seul à pouvoir nous
dévoiler, nous révéler le vrai visage de Dieu. Les protestants ont raison de
nous rappeler ce dogme de l’unique médiation du Christ qui est aussi le
nôtre. Viennent
ensuite les deux dogmes mariaux : le dogme de l’Immaculée conception,
promulgué en 1854 par Pie IX [Voir la Bulle Ineffabilis Deus (DzS 2803)]et celui de l’Assomption en 1950 par
Pie XII.[Voir la constitution apostolique Munificentissimus
Deus (DzS 3903)] Ces deux dogmes constituent
la principale pierre d’achoppement entre les Églises concernant Marie. Alors
que leur reproche-t-on ? D’une
manière générale, on leur reproche de ne pas être suffisamment fondés sur les
Écritures, et de ce fait, ils apparaissent inacceptables. La Sola Scriptura étant un des grands
principes de la Réforme, tout ce qui n’est pas explicitement dit dans les
Écritures fait difficulté pour ces Églises. Pour eux, le dogme de l’immaculée
conception semble contredire le témoignage de l’Écriture qui nous dit que le
Christ est venu dans le monde pour les pécheurs. Pour les anglicans, ce qui
faisait difficulté, ce n’était pas tant le contenu de ces deux dogmes, mais
le fait qu’ils soient déclarés comme des éléments authentiques de la foi
apostolique révélée. Quant
aux orthodoxes, ils estiment que ces dogmes ont été définis unilatéralement
par l’Église catholique, sans concertation avec leurs Églises, par
conséquent, ils n’engagent que les catholiques. À cela s’ajoute pour eux le
fait que ce sont des définitions papales et non des définitions conciliaires.
Mais les orthodoxes proclament aussi Marie, comme « la toute
pure », et « la toute immaculée », mais pour eux Marie n’est
pas immaculée du fait de sa conception, mais parce qu’il lui a été accordé de
ne pas se laisser dominer par le péché, et de réaliser avec l’aide de Dieu,
la grâce de Dieu, sa vocation d’image de Dieu. Quant à la destinée finale de
Marie, la tradition orthodoxe parle le plus souvent de dormition, même si
elle emploie aussi le mot Assomption. La mort de Marie est attestée, mais le
corps de la Mère de Dieu n’a pu subir de dégradation. Nous
catholiques, que disons-nous ? Soit nous soulignons que le corps de
Jésus n’aurait pu naître d’une chair marquée par le péché, soit nous
comprenons l’immaculée Conception comme la marque d’une sainteté qui est
accordée à Marie de façon toute gratuite, faisant d’elle une femme comblée de
grâce (Lc 12, 28) lui permettant de
prononcer un jour le fiat. Quant au
dogme de l’Assomption, Marie élevée en corps et en âme à la gloire céleste,
il est à comprendre comme le parfait exemple de cette réalité de la résurrection
déjà à l’œuvre. Ces
deux dogmes sur : Marie conçue sans péché et Marie élevée en corps et en
âme à la gloire céleste, nous les considérons comme des privilèges de la theotokos, les privilèges de la mère
de Dieu qui a bénéficié, par anticipation, de la grâce rédemptrice du Christ
et de la grâce prévenante de Dieu. Dieu donne à Marie dès sa conception la
grâce qui sera donnée à l’humanité par la Croix et la Résurrection de son
Fils. Pour
dissiper des malentendus, je rappellerai que ces définitions dogmatiques
promulguées par Pie IX et Pie XII ne sont en aucun cas des définitions
arbitraires et autocratiques des papes. Elles entrent dans le cadre de
l’adage lex orandi, lex credendi (
ce passage du vécu au cru) et font suite à une consultation de tous les
évêques chargés d’exprimer le sensus
fidelium des fidèles de leur Église locale. Les évêques de Rome se sont
ensuite prononcés, non pas au nom d’une infaillibilité personnelle, mais au
nom de l’infaillibilité de l’Église. J’ajouterai que ces définitions ne sont
pas à considérer comme des additions au donné révélé, mais comme un
déploiement, un approfondissement du donné révélé. *
* * * * * * III.
Après avoir dressé ce tableau, qui ne se prétend pas exhaustif, de ce qui
nous unit et de ce qui fait problème,
je voudrai voir avec vous comment
le concile Vatican II s’est situé par rapport à Marie, et comment il a réagi
devant ces difficultés que je viens d’énoncer ? Le
problème marial s’est très vite posé au concile. Les Pères étaient partagés
sur la question. Certains voulaient que le concile s’arrête plus longuement
sur la figure de Marie, comme c’était le cas dans le schéma préparatoire, en
en faisant un texte à part, d’autres voulaient inclure un chapitre sur Marie
dans la constitution sur l’Église, d’autres encore préféraient uniquement des
allusions à la Mère de Dieu ou même un silence total. Finalement,
c’est la discrétion vis-à-vis de Marie qui l’emporta. Pourquoi ? Quel en
était l’enjeu ? Il ne s’agissait pas de mettre délibérément dans l’ombre
le mystère de Marie pour éviter d’accentuer les différences séparatrices
entre Églises. Le véritable enjeu pour les Pères conciliaires, c’était
l’équilibre de la foi. Pour le concile qui se voulait
essentiellement pastoral, le besoin d’un rééquilibre dans ce domaine était
devenu nécessaire car, pour beaucoup de catholiques, Marie était mise sur le
même pied que le Christ, parfois elle semblait même compter davantage que son
Fils. Devant cette montée de la foi en la médiation et en la
co-rédemption de Marie, le grand dogme chrétien de l’unique médiateur
semblait s’estomper. C’est donc
pour une mariologie plus vraie et plus adulte qu’ont milité les Pères. Il
n’était pas question de nuire à l’honneur de la Mère du Sauveur, ni de mettre
Marie à l’écart, mais de respecter son mystère. Concrètement,
comment cela s’est-il traduit ? Les pères conciliaires ont finalement
mis le chapitre sur Marie à l’intérieur de la Constitution sur l’Église.
Marie n’était donc pas située au-dessus de l’Église, mais au sein du peuple
de Dieu, à l’intérieur de l’Église. Ce
chapitre 8 sur Marie n’a donc pas constitué un traité à part, comme le
souhaitaient de nombreux Pères, il est le dernier chapitre de Lumen Gentium, la constitution
dogmatique sur l’Église. Il faut savoir que cette décision fut votée avec une
majorité de 40 voix sur plus de 2000. Il y eut exactement 1134 voix
favorables à l’intégration du chapitre sur Marie dans la constitution sur
l’Église et 1074 voix contre. Ce qui reflète les deux tendances dont je vous
parlais tout à l’heure. La tendance maximalisante (ou inflationniste),
héritière du mouvement marial qui s’était développé durant les 150 dernières
années et qui militait en faveur d’affirmations mariales nouvelles, de
nouveaux titres à donner à Marie, de nouvelles pierres à apporter à sa
couronne. Le premier projet sur l’Église allait dans ce sens. L’autre
tendance, la tendance minimisante, se voulait plus fidèle au renouveau
biblique et théologique. Cette majorité de justesse fut un tournant pour le
concile qui élabora un discours sur Marie dans un ton nouveau. * * * * * * * Quel
fut l’enseignement du concile sur Marie ? Le concile situe Marie dans le
mystère du Christ et de l’Église, c’est le titre du chapitre VIII de Lumen Gentium : « La bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu, dans le mystère du
Christ et de l’Église ». Ce
qui signifie que la méditation de la foi n’est pas rivée, centrée sur Marie,
comme sur un objet ultime, mais Marie dans sa relation au Christ avec
l’histoire générale du salut, et Marie dans le mystère de l’Église à laquelle
elle appartient comme membre. Dans le salut, elle se situe bien du côté des
rachetés. Certes ajoute le concile, dans l’Église, « la bienheureuse
Vierge Marie occupe la première place, offrant à un titre éminent et
singulier, le modèle de la Vierge et de la mère. À la naissance et à
l’éducation des croyants, elle apporte la coopération de son amour
maternel » (LG 63).
Et au lieu d’élaborer de nouveaux titres mariaux, le concile a préféré le
retour aux sources bibliques et traditionnelles. C’est là un changement de
direction. On laisse de côté l’idée que le dogme doit sans cesse se
développer de définition en définition. Le concile ne définira donc rien de
nouveau. Pour les Pères, le respect le plus fondamental et l’hommage le plus
grand qui pouvait être rendu à Marie, c’était de nuancer certaines
affirmations concernant Marie et de les resituer face au mystère du Christ.
C’était pour eux le plus grand honneur que l’on pouvait lui faire, c’était
aussi la resituer à sa juste place. Le
concile présente le rôle et le destin de Marie en suivant le cours de son
existence. Il souligne fortement la foi de Marie qui a avancé dans le
pèlerinage de la foi jusqu’à l’épreuve de la croix où elle se tint debout (LG
58). Il a évité toute idée de
co-rédemption, le terme est donc absent, de même
qu’il a voulu éviter toute idée de
médiation. Les pères l’ont évité pour
respecter les Écritures. L’affirmation scripturaire de
l’unique médiateur se trouve dans la première
épître à Timothée : « Car il
n’y a qu’un seul Dieu, qu’un seul médiateur
entre Dieu et les hommes, un homme : Christ Jésus, qui
s’est donné en rançon pour tous » (1 Tm 2,
5). L’expression de «médiatrice » apparaîtra quand même une fois, à la
suite d’une succession de titres qui indiquent que cette médiation est à
comprendre dans le sens d’une intercession. Par
contre, il est clairement dit que Marie a coopéré au salut des hommes dans la
liberté de la foi et de l’obéissance (LG
56). Marie n’est donc pas qu’un instrument passif. Le rôle de Marie dans
l’incarnation et la rédemption est présenté comme celui d’une
« associée généreuse » et
d’une humble servante du Seigneur » (LG
61) à qui la grâce de Dieu a permis de « coopérer » au salut. Le
concile reprend cette citation de St Irénée : « par son obéissance,
Marie est devenue, pour elle-même et pour le monde, cause du salut » (LG 56). Elle est devenue « la
mère des vivants », reprenant les Pères de l’Église qui la comparaient
avec Ève. L’obéissance de Marie apportait la Vie, disaient les Pères, la
désobéissance d’Ève la mort. Quant
au culte de la Vierge Marie, le concile marque bien la différence entre le
culte rendu à Marie (le culte marial) et le culte rendu à Dieu. « Si le
culte envers Marie présente un caractère absolument unique ; il n’en est
pas moins essentiellement différent du culte d’adoration qui est rendu au
Verbe incarné ainsi qu’au Père et à l’Esprit Saint » (LG 66). Le concile réclame que le
culte à la Vierge Marie soit avant tout centré sur le Christ et qu’il rende
gloire à Dieu. C’est bien dans ce sens là que va le rosaire. Telles
furent les orientations du concile où la majorité des Pères ont voulu aboutir
à une piété mariale plus vraie et plus adulte en 1963. * * * * * * * Alors,
que s’est-il passé après le concile, du côté catholique? Il
me faut d’abord souligner que les Églises ont été touchées d’une façon
générale par l’ouverture œcuménique du concile, et ici par le fait que l’on
ait situé Marie au sein du peuple de Dieu. Du
côté catholique, on peut dire que les orientations conciliaires ont été
respectées pendant tout un temps. Le terme de co-rédemption n’a jamais plus
été utilisé officiellement. On est passé d’une théologie de Marie-reine à une
théologie de Marie-servante. Ce n’étaient plus les privilèges d’une
Mariologie triomphante qui occupaient l’attention, mais la vierge d’Israël,
celle qui représente les pauvres de Yahvé, la servante de l’annonciation, la
mère de famille qui a couru les risques et les épreuves liées à l’enfance de
Jésus et qui a mené à Nazareth une existence ordinaire. Celle qui s’est
effacée devant son Fils pour se retrouver présente à l’épreuve de la croix.
C’est Marie s’offrant à notre imitation comme exemple d’existence selon le
royaume. Il
faut savoir que Paul VI lui-même avait donné des orientations à la piété
mariale, notamment une orientation œcuménique intéressante. Il dira
« Sans atténuer le caractère propre du culte marial, la volonté de
l’Église catholique est d’éviter avec soin toute exagération susceptible
d’induire en erreur les autres frères chrétiens sur la doctrine authentique
de l’Église catholique, et de bannir toute manifestation cultuelle contraire
à la pratique catholique légitime » (n. 32) [Voir
l’exhortation
apostolique sur le culte marial, Marialis
cultus, 2 février 1974, in DC 71 (1974) 301-318].
Notons en passant que Paul VI avait proclamé en 1964, donc avant la fin du
concile, au nom de son autorité
personnelle et indépendamment du concile, Marie, Mère de l’Église, c’est
à dire de tout le peuple de Dieu aussi bien des fidèles que des pasteurs.
Cette proclamation qui n’est pas une définition dogmatique (pas une
définition du pape ex cathedra),
ne se trouve pas dans le concile qui ne voulait justement pas placer
Marie au-dessus de l’Église. Il lui avait
préféré le titre de Mère dans
l’économie de la grâce. En 1987, Jean-Paul II consacrera une
encyclique à Marie Redemptoris Mater.
Il se réfère constamment au concile et reprend son plan : Marie dans le
mystère du Christ, puis dans le mystère de l’Église. Son approche est
biblique. Il compare la foi de Marie à celle d’Abraham. La vierge est
inscrite dans la grande communauté des rachetés. Mais alors que le terme de
médiation avait été évité par le concile, il le reprend, non dans le sens où
il est appliqué au Christ, mais dans le sens d’une médiation maternelle,
telle qu’elle s’est exprimée à Cana dans l’intercession de Marie auprès de
Jésus. Aujourd’hui, les orientations de Vatican II restent en
vigueur. Mais on voit réapparaître dans certains milieux des orientations
mariales d’avant Vatican II. *
* * * * * * IV. Quarante ans après le
concile : Où
en est-on aujourd’hui entre Églises dans nos compréhensions de Marie ? Notons
d’abord qu’il a fallu environ trois décennies avant que des instances
œcuméniques nationales ou internationales se risquent sur le sujet et
réussissent à avoir une parole commune sur Marie, tant le sujet était
controversé. Aujourd’hui, des dialogues nationaux et internationaux mandatés
par leurs Églises ont réfléchi sur les questions mariales. Le dialogue
luthéro-catholique aux USA a permis, en 1992, de produire le document L’unique médiateur, les saints et Marie [Cf. The One Mediator, the Saints, and Mary,
Lutherans and Catholics in Dialogue VIII, H. George Anderson,. Francis Stafford, Joseph A. Burgess (eds.), Augsbourg, Minneapolis], quant au dialogue international
anglican-catholique, il a conduit au texte publié en 2004 : « Marie, grâce et espérance dans le
Christ » [Cf. Mary, Grace and
Hope in Christ, An Agreed Statement
by the Second Anglican-Roman Catholic International Commission, ARCIC II,
London, CTS / Church House Publishing, 2004. En français, voir Service
d’information 118 (2005/I-II) 46-65]. Un texte qui va loin dans
l’affirmation commune. Anglicans et catholiques affirment ensemble que le
contenu du dogme de l’Assomption est en consonance avec l’Écriture et avec
l’ancienne tradition commune, tandis que l’Immaculée Conception n’est pas
contraire à l’enseignement de l’Écriture et ne peut être comprise qu’à la
lumière de l’Écriture [Au niveau scripturaire, Anglicans et
catholiques renvoient au fait que l’Écriture montre que Dieu a souci de ses
serviteurs dès avant la naissance et fait état de la grâce de Dieu qui
précède même leur conception. “Avant de te façonner dans le sein de ta mère,
je te connaissais, avant que tu ne sortes de son ventre, je t’ai consacré; je
fais de toi un prophète pour les nations” (Jr 1, 5). La réponse, vous
la connaissez, je suis trop jeune…n’aie pas peur, je suis avec toi. Dans la
perspective paulinienne de la grâce, ils diront que Marie est, de façon
emblématique, “l’ouvrage de Dieu, créée dans le Christ Jésus en vue des
œuvres bonnes que Dieu a préparées d’avance”. Toutes ces grâces sont
orientées vers une destinée de gloire dont l’Écriture donne une expression
concrète dans Élie (2 R 2, 11),
Henoch et le larron repentant. Anglicans et catholiques parviennent à
affirmer ensemble qu’il est conforme à l’Écriture de dire que Dieu a pris
Marie dans toute sa personne dans la plénitude de la gloire.]
Ils reconnaissent en particulier que les deux dogmes mariaux sont en harmonie
ou en correspondance avec la théologie biblique de la grâce et de l’espérance
eschatologique. Quant
au groupe des Dombes (dialogue non officiel), il a opéré des clarifications
doctrinales et émis des interpellations pastorales. Au
niveau de la coopération au salut, on a pu s’expliquer en regardant exactement
ce que l’on mettait derrière les mots. Et le fait que l’Église catholique ait
affirmé avec les luthériens dans une déclaration récente sur la justification
que seul J.C. nous sauve, que le salut est 100/ 100 du côté du Christ,
cela a contribué à un autre regard des protestants sur le sujet. En
ce qui concerne les deux dogmes mariaux, des pas importants ont été faits. Le
groupe s’étant expliqué sur la coopération et la justification par la grâce
seule, les protestants ont pu dire que l’interprétation de ces dogmes ne
comporte plus rien qui soit contraire à l’annonce évangélique. En ce sens,
ces dogmes n’engendrent pas de divergence séparatrice (cf. n. 326). Ils
demandent aux catholiques, s’appuyant sur le principe de la hiérarchie des
vérités du Décret sur l’œcuménisme (UR 11),
que l’adhésion à ces deux dogmes ne soient pas une condition préalable à
l’entrée dans la pleine communion ecclésiale des deux Églises. Quant aux
catholiques, ils demanderaient alors aux protestants de respecter le contenu
de ces deux dogmes et de ne pas les juger comme contraire à l’évangile et à
la foi. Le
groupe des Dombes considère que ce qui est dogme de foi pour les uns peut
être considéré par les autres comme theologoumenon,
c.à.d. comme une opinion théologique légitime, et donc non séparatrice
d’Église. En
ce qui concerne le culte marial, l’invocation de Marie et des saints, il va
dire : « les catholiques ont à réapprendre que, selon la tradition
ancienne, on ne « prie » pas les saints, mais qu’on les
« invoque » pour qu’ils prient Dieu pour nous. Dans la litanie des
saints, que l’on entend notamment lors des ordinations sacerdotales, on ne
fait pas autre chose. Chaque invocation comporte la réponse « Priez pour
nous ». Saint Benoît, priez pour nous. Sainte Anne, priez pour
nous….Dans le Je vous salue Marie :
sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous. Les
protestants nous demandent de privilégier les représentations de la Vierge
avec son fils, que Marie ne soit jamais séparé de son Fils. Ils nous
demandent aussi d’éviter des abus de langage ou des excès dans le culte et la
pratique populaire. Et cela me paraît très important. Quant
aux catholiques, ils invitent les protestants à sortir de leur réserve
prudente vis-à-vis de Marie, et à lui donner sa vraie place dans l’intelligence
de la foi et dans la prière de l’Église. * * * * * * * En
priant sur ce que j’allais vous dire en conclusion, m’est venu à l’esprit la
première parole de Luc sur Marie dans les Évangiles, après la naissance de
Jésus : Luc nous dit : « elle gardait et méditait tous ces
événements dans son cœur ». C’était la forme de prière de Marie.
Peut-être ce soir, pouvons-nous, à notre tour, vivre cette forme de prière de
Marie : garder dans notre cœur et méditer sur ce que nous aurons entendu
pour sortir de la polémique stérile et de la culture du soupçon, pour
respecter davantage nos diverses compréhensions de Marie et voir comment
elles peuvent nous rejoindre et nous interpeller. Car
c’est tout de même incroyable que Marie, la mère du Sauveur, soit devenue
objet de tant de dissensions entre les chrétiens. Marie qui n’a jamais
cherché à attirer l’attention sur elle, qui s’est toujours effacée devant son
Fils. Car c’est le sauveur que Marie veut nous montrer, c’est le Seigneur
qu’elle nous invite à contempler et à suivre. C’est là sa mission
essentielle. Le nouveau centre œcuménique marial à Nazareth n’a pas d’autre
vocation. En
ce début du millénaire de Notre Dame du Saint Cordon, j’ai envie de rendre
grâce pour le chemin parcouru entre Églises sur ces questions mariales.
Aujourd’hui, nous nous mettons à parler de Marie avec un peu plus de
sérénité, du moins je l’espère, et du côté catholique, nous avons une
compréhension plus équilibrée, plus juste de son mystère, une compréhension
qui tient à lui faire honneur sans l’amoindrir. Mon souhait ce soir, c’est
que ces textes de dialogue théologique entre Églises soient mieux connus, qu’ils
puissent être reçus à la base et par les Églises et porter du fruit pour que
nous puissions grandir dans la communion et devenir davantage l’Église telle
que Dieu la veut. Pascale WATINE, |
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Marie, dissipons quelques malentendus Conférence
à deux voix (P. Watine, F. Verspeeten)
donnée à Valenciennes le 13 mai 2008 à l’occasion du millénaire de Notre-Dame du Saint Cordon Texte complet
de Frédéric Verspeeten I. Quelques
repères : les Réformateurs Les
protestants y pensent d’autant moins que les catholiques en parlent
davantage. Certes aujourd’hui le dialogue œcuménique concède que pour les
catholiques il y a des hiérarchies de vérité et pour les protestants des
vérités centrales. Mais
l’essentiel demeure le centre. Le centre c’est Jésus-Christ (pour le
christianisme). Le Christ seul qui nous révèle et communique la grâce de
Dieu. Les
Réformateurs –il faut le dire immédiatement- ont été très prudent vis-à-vis
de tous les excès de piété mariale hérités du Moyen Age. S’ils
sont différents, Luther et Calvin manifestent envers Marie des convictions et
comportements qui méritent d’être soulignés. Luther
considérait que tout ce qui n’est pas strictement interdit par l’Ecriture
peut être autorisé. En tout cas tout au moins cela peut être accepté avec
certaines limites … qui ne doivent pas déplacer sur l’humain l’initiative
divine. Pour
Luther, que l’on évoque Marie dans l’année liturgique, lors des fêtes de
l’annonciation, de la visitation ou de la purification, n’est pas
contradictoire avec l’Ecriture. Par
contre les doctrines non encore dogmatisées de l’immaculée conception ou de
l’assomption de la vierge Marie, qui ne bénéficient d’aucune attestation
biblique ni de légitimité évangélique, sont à écarter. Luther
est quelqu’un qui est méconnu des catholiques. Mais il faut se souvenir que
Luther est avant tout un moine, et qu’il lui fait (à Marie) une place dans sa
piété. Luther a commenté avec vigueur et ferveur le magnificat. Il y voit la
douce mère de Dieu (mais ne vous trompez pas, de grâce, dans ces termes) qui
nous enseigne par son exemple, son expérience, ses paroles et sa discrétion,
comment on doit reconnaître et louer Dieu … Marie
de Nazareth est une femme humble. Elle est pauvre, sa pauvreté (matérielle et
spirituelle) en font « la petite » que dieu choisit car il porte
son regard sur les choses faibles de ce monde afin de confondre les fortes.
L’on oublie trop souvent qui était Marie en réalité, au profit de nos
constructions ultérieures sur le mythe de Marie. Marie connaît un destin dogmatique
officiel avec le concile d’Ephèse en 433 (Théotokos). Luther
disait que : « Jésus vint naître de cette race méprisée de cette
pauvre servante. Un rameau, une fleur surgissent de cette personne que les
filles de Caïphe et Anne n’auraient pas jugé digne d’être leur domestique
… » (Luther, Magnificat, Œuvres, Tome III, 1964, p. 19-20, Labor et
Fidès édit.). Pour
Luther encore, Marie est cette humble auberge dans laquelle Dieu peut
habiter. Elle est l’atelier dans lequel le salut se met en œuvre. Joyeuse de
cette bonne nouvelle elle demeure humble
et souffrante. Elle baissera le
front devant l’Ange. Elle symbolisera par son chant le renversement des
valeurs et des autorités. Les puissants ont été abaissés, les humbles élevés.
Comme il fit pour elle de grandes choses, Dieu le fait pour nous tous. Pour Luther, Marie est un personnage
important de la longue chaîne des témoins de la révélation. Mais il ne faut
pas lui conférer autre chose que ce que l’Ecriture lui concède, ou plutôt lui
reconnaît. C’est
ainsi qu’il prendra la distance nécessaire pour souligner qu’il n’y a pas
d’absolution complémentaire qui puisse être obtenue par les mérites de la
« Bienheureuse ». Philippe Melanchton, proche de Luther et
principal rédacteur de la Confession d’Augsbourg (1531), écrit
justement : « une croyance générale a mis la bienheureuse vierge à
la place du Christ. On l’a invoquée, on a mis sa confiance en elle. Dans sa
miséricorde et par son entremise on a voulu rendre le Christ bienveillant
comme s’il n’était pas le propitiateur mais seulement un vengeur terrible. Nous
sommes au 16ème siècle quand ces mots sont écrits. Après le
scandale des indulgences et des prétendus mérites des saints. Les
Réformateurs rappellent que le Salut nous est donné en Jésus-Christ et par
Lui seulement et pleinement. Marie,
personnage important des Evangiles, est
du côté des sauvés et non du Sauveur. Calvin,
lui, s’exprime curieusement moins sur le sujet. Mais il est clair pour lui
que tout ce que l’Ecriture n’induit pas directement doit être refusé. Calvin
se méfie des gestes religieux, des images, des gestes liturgiques et des
fioritures qui attirent davantage l’attention sur la gestuelle que sur le
Sauveur. Pour Calvin tout ce qu’il
faut attribuer à Marie est le rôle de l’Esprit Saint. Calvin considère
que l’on en fait trop lorsque l’on
veut absolument prouver ou enseigner de manière unilatérale la virginité
perpétuelle ou la pureté exceptionnelle de Marie. Il se méfie de
l’appellation du titre de mère de Dieu. Mère
de Jésus de Nazareth, le Christ, certes ; et c’est ainsi qu’il faut
entendre mère de Dieu. Car Dieu n’a en vérité ni père ni mère, mais il
est lui-même l’origine de Tout. Marie est pour lui le modèle à imiter
lorsqu’elle désigne le Christ et dans l’itinéraire de la vie chrétienne. Mon
parcours des Réformateurs ne serait pas complet si je ne donnais la parole à Ulrich
Zwingli, qui est à mes yeux plus que le Réformateur de Zurich, mais
le Réformateur des premières heures de La Réforme non luthérienne. Selon lui
Marie est la parfaite image de l’Eglise servante, qui s’engage dans la
charité et la solidarité sociale. Il maintenait les fêtes de l’annonciation
et de l’assomption, l’angélus et l’Ave
Maria. Les
Réformateurs ont été assez prudents dans ce domaine. Assez critiques
vis-à-vis de la mariologie médiévale.
Ils sont courageux parce qu’ils acceptent de redonner à Marie la place
qu’elle doit avoir. Ils sont reconnaissants envers elle, mais ils rappellent
que la mariologie n’a aucun sens en elle-même. Aux origines du christianisme,
dans les premiers siècles, lorsque l’on évoquera Marie ce ne sera pas pour
écrire le chapitre de la mariologie à côté de celui de la christologie mais
tout simplement parce que l’on essayera d’expliquer l’incarnation. Car il y
avait tellement de manière de l’expliquer (13ème au 2ème
siècle), et Marie est étroitement liée au mystère de l’incarnation. *
* * * * * * II. La quête des
Ecritures Si l’on regarde maintenant les
Ecritures, il est évident que le témoignage néotestamentaire en faveur d’une
mariologie gourmande est faible. L’Evangile de Marc n’en dit pas un mot.
L’Evangile de Jean parle de l’incarnation du logos et renonce à tout récit
maternel. Marie y apparaît deux fois, à Cana et au pied de la croix. Matthieu et Luc nous livrent des
récits de l’enfance et de la naissance de Jésus plus détaillés. Surtout Luc.
Mais les deux histoires sont différentes. Dans l’Evangile de Matthieu c’est
Joseph qui est le personnage central de la révélation. C’est à lui que l’on
dit que Marie porte un enfant qu’il faut accueillir. Pour Luc il en va
autrement. C’est Marie qui est au centre. C’est dans cet Evangile que l’on nous
dit qu’une faveur (grâce) lui a été faite (Luc 1, 28). Elle est graciée
(c’est-à-dire objet de la faveur de Dieu), élue pour un destin particulier.
Ce qui est beau ici c’est cette attestation de la grâce. Elle en bénéficie.
Elle ne la possède pas. Il n’y a pas de Marie pleine de grâces au pluriel, mais Marie graciée,
touchée par l’unique grâce de Dieu. Elle en bénéficie. Cette Marie des Evangiles n’est pas la « Sainte Vierge »
que continuera la tradition ultérieure, ni
Notre Dame. Les textes bibliques sont sobres. Et
aujourd’hui il y a un consensus pour le reconnaître. Certes Luc nous livre un
texte magnifique : « Le Magnificat », mais dans ce texte même
l’Evangile s’en tient à l’essentiel : elle est graciée, bénie,
justifiée. Comme tous les mortels elle est appelée au Salut. Luc ne fait aucune place à une immaculée
conception … ! Il n’est pas possible de suivre
aujourd’hui un parcours biblique détaillé mais disons encore que les épîtres de Paul ne font aucune place
à Marie. Si ce n’est une allusion en l’épitre aux Galates (Galates 4,
4) : Dieu a envoyé son Fils,
né d’une femme et assujettie à la Loi. Le silence de Paul souligne que le
centre unique de l’Evangile est bien le Christ Jésus, et que là tout est dit. Quant à la référence à l’Apocalypse
(chapitre 12, verset 1), la femme évoque la victoire finale de l’Eglise et
non de Marie. On ne peut empêcher toutefois le
peuple de réfléchir sur le sens de l’incarnation et son mystère. Si les Evangiles canoniques laissent
entendre que ce qui compte ce n’est pas la chair, mais ce qui se passe dans
la chair, mais l’Esprit de Dieu qui vient renouveler toutes choses et nos
cœurs … il n’en demeure pas moins vrai que les humains peuvent s’interroger
sur le merveilleux divin. Et les Evangiles apocryphes vont
satisfaire dans les premiers siècles ce besoin. Ils sont eux prolixes,
bavards, et ils exagèrent. La discrétion respectueuse des Evangiles
canoniques est ici piétinée et c’est dans ces textes que l’on va trouver sans
subtilité les allusions sur l’immaculée conception et sur l’assomption, sans
oublier la virginité perpétuelle ! Il est incontestable que ce sont ces
écrits qui ont façonné l’essentiel de la piété mariale. Le proto-évangile de Jacques (2ème siècle) raconte la
merveilleuse enfance de Marie. Le pseudo-Matthieu
souligne la pureté absolue de la mère de Jésus. Le pseudo-Thomas retrace l’enfance d’un Jésus qui, enfant,
produit des miracles. Enfin l’histoire
de Joseph le Charpentier (datant environ de l’an 400) vient ajouter aux
évangiles que Joseph était veuf, père d’autres enfants qui seraient les
frères et sœurs de Jésus. Pour revenir un peu en arrière disons
que c’est bel et bien avec le proto-évangile
de Jacques, écrit au 2ème siècle et qui est aussi connu sous
le titre de Nativité de Marie, que
l’on nous présente Marie née de famille davidique aisée, de descendance
royale. Joachim son père était riche. Anne son épouse va avoir un enfant,
Marie, qui sera élevée dans le Temple. Le proto-évangile de Jacques, lui, essaie d’expliquer comment une
nuée lumineuse couvrit la grotte et que cette lumière se retira peu à peu
pour dévoiler l’enfant Jésus. Au 9ème siècle le livre de la nativité de Marie (9ème
– début du 10ème même) centre son récit sur l’histoire même de
Marie jusqu’à la naissance de Jésus ! C’est un apocryphe qui a été
largement diffusé au 12ème siècle et a construit la légende
mariale. *
* * * * * III. La question
de la théologie mariale Les travaux du Groupe des Dombes ont
permis aux théologiens protestants de préciser en quoi il peut y avoir
consensus avec l’Eglise catholique romaine et en quoi il y a semble-t-il
exagération (grossièrement, surestimation). Les protestants de manière générale
distinguent trois niveaux dans ce domaine : - Le
premier niveau est relatif à ce que l’on appelle la piété populaire. La mariolatrie. Il était surprenant pour les
protestants du monde entier d’entendre, lors
du Jubilé 2000, que le grand pénitencier proposait aux fidèles parmi les
œuvres à accomplir pour obtenir l’indulgence du Jubilé … des pèlerinages avec
invocation à la vierge, et des visites aux basiliques de la Nativité à Bethléem
ou de l’Annonciation à Nazareth … ! - Le
2ème niveau d’exagération se situe dans la proclamation des dogmes
de l’immaculée conception (1854) et de l’assomption (1950). Mais ces deux
dogmes ne posent pas seulement question au protestantisme. Ce sont des dogmes
catholiques romains. - Enfin
le 3ème niveau de difficultés se situe peut-être, non dans l’art
chrétien, mais dans le commerce de la piété populaire avec des
représentations en plâtre ou en plastique des petites médailles bénites avec
les images de type sulpicien. Au-delà
des aspects que nous venons de souligner les difficultés majeures se font
jour pour : A. La coopération de Marie au salut de
l’humanité, salut opéré par jésus. Le concile de Vatican II avait abandonné
les termes de co-rédemption et de médiation. B. La virginité. Notamment la virginité
perpétuelle. Cette idée que la virginité soit de l’ordre du matériel. C. Les deux dogmes de l’immaculée
conception et de l’assomption. D. La
dernière difficulté est liée à l’invocation de Marie. Même avec les nuances
que l’on apporte de Dulie et de Latrie. Le
protestantisme considère, qui les doctrines religieuses sont liées à
l’histoire de l’humanité, comprend les raisons du succès de la doctrine
mariale et il l’explique pour cinq raisons : 1. Marie
est image de la vierge mère. 2. Marie est considérée comme l’image de
l’Eglise idéale. Elle dit Jésus en Jean 2, 5 « Faites tout ce qu’il vous dira ». Ici elle incarne la
servante du Seigneur. Cette image est intéressante. 3. Marie est le pendant féminin de
Jésus. 4. Marie
est-elle le pendant féminin de Dieu ??? *
* * * * * IV. Marie, modèle
du croyant Si
l’on prend comme base le Magnificat, il est intéressant de remarquer que
l’Evangile de Luc nous propose au travers de la rencontre de Marie avec
l’ange un itinéraire spirituel. Ainsi Marie rencontre un ange, rencontre étonnante
et qui dit beaucoup de choses. a. D’abord Dieu vient vers elle. Ce
faisant elle veille sur ce monde, sur l’histoire, sur notre histoire. Il ne
vient pas vers elle en juge mais en ami intime. La rencontre avec Dieu est
spirituelle. Dieu révèle sa tendresse envers Marie et envers l’humanité. Il
arrive à Marie ce qui est déjà arrivé à d’autres femmes de la Bible,
rejointes dans leur intimité, dans le secret de leur âme. b. Alors elle peut prier de joie et se
reconnaître comblée de grâce. Ce qui arrive à Marie est extraordinaire. Elle
donne naissance à celui qui se révèlera être le Fils de Dieu. Mais dans son
parcours il y aura des épreuves. Marie nous enseigne que Dieu vient nous
combler de sa grâce. Ce qui arrive à cette femme nous est promis à
tous : non pas d’enfanter Jésus mais de vivre pleinement de la grâce
parfaite de Dieu. Il ne nous est pas facile de comprendre comment Dieu vient
vers chacun de nous. Il donne sens à la vie de Marie, comme il veut donner
sens à nos vies. Marie sait désormais que Dieu n’est pas indifférent à sa
vie. c. Jeune
femme vierge elle porte un enfant. La virginité mise en scène ne relève pas
selon moi de la matérialité mais du regard que Dieu porte sur les siens.
L’Evangile parle de pureté de du cœur, de l’âme, de l’Esprit (1
Thessaloniciens 5, 23). Cette femme
pécheresse est regardée pure, telle une page blanche. Ce que Dieu attend de
nous c’est la disponibilité et l’accueil de la grâce. Nous avons des
problèmes avec l’incarnation parce que nous la voyons de façon trop
charnelle, physique, sexuelle. La pureté dont parle le Magnificat est de
l’ordre du vouloir de Dieu. Il y a de multiples états de vie, mais la pureté
c’est le regard de Dieu. C’est Lui qui la confère à l’Être qui s’ouvre à sa
présence. Marie, dans le Magnificat, sait dire
à Dieu quel est son bonheur. Elle est capable de Lui dire : qu’il me soit fait selon ta parole. Je
voudrais que chacun puisse en dire autant. Son OUI à Dieu est une parole de
confiance ! Marie, plus tard, enfante Jésus. Elle
va apprendre à discerner la divinité dans notre humanité. Marie restera
humble et modeste. ! Elle est des pauvres de YHWH ! Elle est
ouvrière de la nouvelle alliance qui rend notamment aux femmes la place qu’on
leur a refusée. *
* * * * * V. Chemins
protestants En résumé le protestantisme soucieux
de fidélité à l’Ecriture Sainte qui révèle l’essentiel du salut accompli en
Jésus-Christ considère que : 1. Jésus,
né de Marie, a vécu la condition humaine et est venu annoncer le pardon de
Dieu. 2. Marie,
sa mère selon la chair, n’est pas une figure centrale de la foi ni de
l’Ecriture, mais cette figure n’est pas insignifiante. Elle propose un
itinéraire de foi et de confiance à tous les humbles. 3. Le
Nouveau Testament ne dit et ne sait rien de la naissance de Marie, ni de sa
mort. Ce que l’on peut en dire au-delà demeure légendaire. Et n’a de valeur
que si cela préfigure ce qui arrivera à tous les croyants (entrée dans le
Royaume de Dieu, regard de Dieu qui nous voit pur sans mérite et qui confère
sans grâce, qui nous accueille en son Royaume) 4. La
vocation de Marie est unique. Elle est bénie entre toutes les femmes, déclare
l’Evangile selon Luc (1, 42). Son fils se révèlera par l’œuvre de Dieu être
le témoin, le fils éternel, le révélateur de l’alliance de grâce. 5. Marie
se révèle disponible à Dieu, obéissante. Elle est image de notre vocation.
Chaque membre de l’Eglise doit pouvoir se laisser toucher par la Parole de
Dieu ! 6. Elle
participe à l’opération de salut de Dieu pour sauver le monde. Car Dieu ne
veut pas le salut des hommes sans qu’ils ne se sentent concernés. Mais elle
ne confère pas la grâce. 7. Les
Réformateurs n’ont pas combattu « bille en tête » la proclamation
du titre de Théotokos. Il ne s’agissait pas d’un dogme mais d’une
proclamation, d’une présentation de l’œuvre de Marie. Marie est mère de
Christ en tant qu’homme (nature humaine), mais il a été engendré par Dieu. Il
est fils de Dieu. 8. Par
ailleurs le culte marial se heurte à une difficulté majeure : le Christ
ne le suscite pas, ne l’encourage pas, ne l’organise pas. 9. Marie nous apprend la foi,
l’humilité, l’espérance. Elle nous montre le Christ. Toute adjonction ne fait
pas partie du dépôt apostolique. Elle occupe toutefois une place particulière
dans la grande famille et nuée de témoins. *
* * * * * VI. Quelques
pistes pour conclure Le
Pape Paul VI dans une exhortation apostolique sur le culte marial déclarait
en 1974 qu’il fallait soumettre le culte marial à un contrôle
permanent : - au
niveau de la dévotion - au
niveau liturgique, en modérant les exercices de piété - au
niveau œcuménique il faut être à l’écoute des frères chrétiens - au
niveau anthropologique enfin comme modèle qui donne courage et ouvre à
l’amour. Ces points demeurent actuels, mais la
figure de Marie ouvre un certain nombre de questions qui méritent notre
réflexion commune : 1. La
faiblesse de Dieu : quand nous confessons Jésus-Christ conçu du
Saint-Esprit né de la vierge Marie, nous refusons le paganisme antique mais
nous affirmons que Dieu veut habiter la faiblesse humaine. C’est un évènement
sans égal. 2. La
naissance, au-delà des débordements, nous révèle l’humanité du Christ.
L’Esprit veut habiter parmi les humains 3. Marie évoque l’idée de l’Eglise « mère ». Cela n’a rien d’institutionnel mais c’est l’image de l’Eglise qui, en tant que servante, transmet la foi. C’est ce qui visé dans la désignation de « mère ». L’Eglise dans sa diversité doit permettre, comme le laisse entendre le titre de Théotokos, le passage jusqu’au Dieu vivant, jusqu’au Fils.
Frédéric Verspeeten, |
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